Idrissa Arizo Maiga, Avocat général des Assises de la Cour d‘Appel de Bamako en transport à Ségou : “Les populations de l’intérieur sont plus intéressées par les assises que celles de Bamako”

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En marge de la 3ème session des assises de la cour d‘appel de Bamako en transport à Ségou, l’Avocat général, près la Cour d’Appel de Bamako, Idrissa Arizo Maiga dans un entretien qu’il nous a accordé s’exprime sur les avantages de la tenue régulière des assises. En outre, il donne des explications sur les raisons des quelques défaillances enregistrées de part et d’autre et appelle surtout à combattre le communautarisme, source des génocides qui plane sur notre pays. Lisez plutôt.

 

 

Nouvel Horizon : Quel peut être l’impact de la tenue d’une session des assises hors de Bamako ?

Idrissa Arizo Maiga : Le ressort de la Cour d’Appel de Bamako couvre les régions administratives de Bamako, de Koulikoro, de Ségou et Sikasso. Donc, la Cour d’Assises peut se tenir dans n’importe quel lieu de son ressort. La justice doit être ressenti et la Cour d’Assises est une véritable école pour les populations, voilà une importance de la Cour d’Assisses dans les régions. Il faut de plus en plus les tenir à l’intérieur, car c’est là que les gens sont le plus intéressés. Il faut aussi ajouter que la tenue régulière des assises est une obligation que fait la loi sur le département. Elle permet aux détenus de très vite connaitre leur sort et permet aussi de désengorger les maisons d’arrêts.

 

 

Nouvel Horizon : Au cours des Assises, on constate très souvent des dossiers incomplets conduisant à des acquittements. Quels commentaires faites-vous de cette situation ?

            Idrissa Arizo Maiga : A l’occasion de toutes les Assises auxquelles j’ai participé, il a été constaté des insuffisances notables au niveau de l’enquête préliminaire et au niveau du juge d’instruction. Cette situation se ressent au niveau de l’instruction définitive, c’est-à-dire à la barre, quand on sait que cette instruction définitive a pour base l’instruction préliminaire et préparatoire chez le juge d’instruction. Après les faits, les investigations sur le lieu du crime doivent se faire de façon minutieuse, car c’est à cette étape qu’on peut retrouver les indices concurrents à la manifestation de la vérité. Il se trouve malheureusement que ce n’est pas le cas et à la barre l’accusé conteste et tout tombe. L’aveu n’est pas la reine des preuves, il faut des preuves circonstanciées. Au niveau du juge d’instruction, cela est incompréhensible, il y a des éléments essentiels que l’on ne trouve pas dans le dossier, notamment le certificat médical qui doit servir de base à l’enquête du juge d’instruction.

 

 

Nouvel Horizon : Qu’est-ce qu’il faut faire alors à ce niveau ?

            Idrissa Arizo Maiga : Je le dis et je le répète, c’est le manque de professionnalisme. Les textes sont clairs, la procédure est connue. Il reste aux acteurs de mettre du sien. On ne peut pas condamner des accusés sans preuves. Comme dirait l’autre, il vaut mieux laisser 100 coupables impunis que de condamner un innocent.

 

 

            Nouvel Horizon : Au cours de la session de Ségou, le plus gros dossier jugé fut celui de la localité de Tondjilla, commune de Nièna, où les Diallo ont saccagé et pillé les Sangaré

            Idrissa Arizo Maiga : C’est une affaire monstrueuse dans son déroulement. Ce qui est grave dans cette affaire, c’est le communautarisme qui gagne du terrain. Il y a des gens malveillants qui s’accrochent à ce communautarisme pour faire valoir des desseins. Il n’y a pas de raison que des gens qui vivent ensemble en bonne intelligence depuis une centaine d’années viennent à s’affronter. L’affaire se passe à Tondjilla entre les Diallo et les Sangaré. On constate que dans leurs malveillances, les Diallo de Tondjilla ont pu associer certains villages Diallo de la zone pour perpétrer l’acte crapuleux. Sous prétexte que les Sangaré avaient prospérer et avaient des ambitions sur la chefferie. Le communautarisme est la chose la plus dangereuse. Les génocides à travers le monde sont partis du communautarisme. Voilà pourquoi il faut le combattre avec fermeté. Par rapport à cette affaire, on a appris que des hommes politiques seraient derrière à manipuler pour asseoir leurs intérêts. Tout compte fait de bonnes décisions ont été prises dans cette affaire.

 

 

            Nouvel Horizon : Est-ce qu’il est normal de torturer un prisonnier ?

            Idrissa Arizo Maiga : La torture est formellement interdite. Elle constitue une infraction grave. Tous les agents de force de l’ordre qui se rendront coupables de torture seront jugés et condamnés.

 

 

Nouvel Horizon : Comment expliquez-vous l’absence des parties civiles à la barre ?

            Idrissa Arizo Maiga : Cela dépend de la nature des faits. Dans les cas de viols et de pédophilies, les victimes préfèrent ne pas se présenter pour éviter de revenir sur les faits subis. Le plus important est que les parties civiles soient informées. Après avoir été informées, elles ne sont pas obligées de venir, car elles viennent défendre des intérêts personnels.

 

 

Nouvel Horizon : Est-ce que vous avez la preuve que les assesseurs gardent le secret des délibérations ?

            Idrissa Arizo Maiga : Ils sont proposés par les préfets et les maires qui envoient une liste de 5 personnes. Ensuite, un tirage au sort est effectué pour le choix des assesseurs. La condition consiste à avoir plus de 30 ans et n’avoir jamais été emprisonné. La justice n’a aucune emprise sur le choix des assesseurs. On n’a pas encore la preuve que des assesseurs n’ont pas respecté leur serment. Dans le cas contraire, ils encourent des poursuites judiciaires.

 

 

Propos recueillis par Alpha C. SOW

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