Ibrahima Sangho, président du réseau APE : « Nous allons déployer des observateurs à Kidal»

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Dans un entretien qu’il  nous a accordé, Ibrahima Sangho, président du réseau APEM  évoque la stratégie que son organisation entend mettre en œuvre pour que les élections législatives des 24 novembre et 15 décembre prochains soient crédibles et transparentes. Dans cette dynamique, il demande aux autorités maliennes et aux partenaires techniques et financiers de privilégier  l’observation nationale des élections à l’observation internationale. Lisez plutôt.

 

Ibrahima Sangho, président APEM
Ibrahima Sangho, président APEM

Le Tjikan : Pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs?

Ibrahima Sangho : Je suis Ibrahim Sangho, président du réseau ONG  d’Appui au Processus Electoral au Mali (APEM) qui regroupe actuellement 52 associations et organisations de la société civile. Créé en 1996, et depuis lors nous intervenons dans le processus électoral à travers la formation, la sensibilisation et l’observation électorale.

 

 

Quelle stratégie allez-vos mettre en œuvre pour  les élections législatives ?

Nous avons déployé, avec l’aide de nos partenaires techniques et financiers, beaucoup d’axes d’intervention. Avec le PAPEM (Programme d’Appui au Processus Electoral au Mali) par exemple,  nous allons intervenir dans 16 cercles dans la sensibilisation électorale, la mobilisation des électeurs pour que tout le monde puisse participer à ces élections législatives.

 

 

Avec d’autres partenaires comme le NDI, l’USAID, nous allons déployer des observateurs sur le terrain. L’USAID prend en charge 500 observateurs, l’Organisation Internationale de la Francophonie 500 observateurs, le Pool de partenaires techniques et financiers (WonWorld, Oxfam, l’Ambassade des Pays-Bas) prendra lui, en charge 1000 observateurs. Il ya aussi OSIWA, une grande structure basée à Dakar  , qui s’occupera de 1500 observateurs, et le PAPEM qui va intervenir à travers la prise en charge de 200 observateurs. Donc au total, nous allons déployer 3700 observateurs sur le terrain et 200 superviseurs pour les élections législatives des 24 novembre et 15 décembre prochains, sur l’ensemble du territoire national.

 

En plus de cela, nous allons renforcer ce qu’on avait fait en termes de mobilisation des électeurs dans 16 cercles de Sikasso, Mopti et Kidal. Donc, nous allons mobiliser les gens partout au Mali à sortir massivement pour aller voter dans la paix, le calme et la quiétude.

 

Nous allons observer les élections en temps réel, pour mieux agir sur ces élections.

 

 

A cet effet,  le même dispositif est maintenu comme à la présidentielle, à savoir : le Pole d’Observation Citoyenne des Elections(POCE). Qui sera installé à l’hôtel Radisson les 23, 24 et 25 novembre pour le premier tour. Afin de suivre cette élection en temps réel et corriger les dysfonctionnements au fur et à mesure avec l’administration électorale telle que la CENI, le ministère de l’Administration Territoriale qui est le département en charge de l’organisation  matérielle des élections. Nous serons en contact avec eux pour corriger ces disfonctionnements.

 

 

Le même dispositif sera effectif aussi les 14, 15 et 16 décembre pour recueillir les informations avec les observateurs que nous avons sur le terrain. Pour cela, le dispositif qu’on avait mis en place pour la présidentielle sera renforcé pour davantage crédibiliser l’organisation et la tenue des élections au Mali.

 

 

Quel est le degré d’implication de l’Etat aux cotés du réseau APEM  dans ce processus  électoral ?

L’Etat est engagé à nos cotés dans ce processus. Mais, je dois dire que l’Etat ne nous donne pas de l’argent. Mais, si le Programme d’Appui au Processus Electoral au Mali (PAPEM) nous finance à travers 16 cercles du Mali, c’est parce que ce programme qui est placé sous l’autorité de l’Etat qui nous soutient. D’ailleurs, Il ya un comité de suivi qui est mis en place et qui est présidé par le préfet de chaque cercle.

 

Concernant l’observation électorale, pour l’élection présidentielle  et  pour les élections législatives qu’on est en train de préparer, nous avons eu des rencontres avec le ministre de l’Administration Territoriale pour lui exposer ce qu’on va faire. Dans tous les cas, tout le monde est dans le sérail de l’Etat.

 

 

Nous ne  sommes pas embrigadés, encore moins un bras armé de l’administration territoriale. Mais nous sommes des organisations de la société civile qui travaillent pour les populations du  Mali. Nous informons l’Etat malien de tout ce qui se passe sur le terrain pour que nous puissions corriger ensemble les lacunes.

 

 

Vous avez publié votre rapport sur l’élection présidentielle, quelles sont les grandes lignes de vos recommandations ?

Dans le rapport du Réseau APEM sur les deux tours de l’élection présidentielle, nous avons fait des recommandations qui seront prises en compte maintenant et d’autres qui le seront dans le futur. Grâce auxquelles pour ces élections législatives, on a bénéficié d’un grand programme de sensibilisation dans 16 cercles.

 

On a remarqué un manque de coopération entre les citoyens dans certaines localités du Mali  par rapport aux élections. Il ya eu une grande mobilisation lors de l’élection présidentielle. Et pour que cette mobilisation soit maintenue pour les élections législatives, il faut continuer ce travail de sensibilisation électorale, de mobilisation et d’information pour que les populations sachent que ces élections sont d’abord leur affaire.

 

 

C’est une de nos recommandations qui ont été prises en compte par l’Etat et les partenaires techniques et financiers. C’est pourquoi, on est en train de renforcer la sensibilisation, l’éducation et  l’information électorale.

 

 

Une de nos recommandations est le renforcement de l’observation nationale des élections au détriment de l’observation internationale. Car avec l’observation nationale, ce sont les organisations nationales de la société civile qui déploient des agents nationaux sur le terrain. Nous, nous sommes du Mali et nous vivons 365 jours sur 365 avec les populations. Donc, nous connaissons mieux les réalités que les observateurs internationaux qui viennent souvent comme des touristes et qui ne connaissent pas la réalité du pays. Ce qui fait qu’ils sont  obligés de se baser sur les nationaux pour avoir des informations afin de  tirer les conclusions de leurs rapports.

 

 

Donc, si on a déployé 2100 observateurs et 92 superviseurs  pour l’élection présidentielle et 3700 observateurs et 200 superviseurs pour les élections législatives, c’était une de nos recommandations qui a été prise en compte.

 

 

Les élections c’est avant, pendant et après. Et il faut préparer les populations afin qu’elles se mettent en tête que l’élection c’est leur affaire car c’est la personne qu’elles veulent élire qui sera là. Car demain si on a des mauvais députés, des mauvais conseillers, c’est notre faute à nous tous. Et il ne faudrait pas qu’on se croise les bras.

 

 

Dons, il faut continuer à former, éduquer, sensibiliser les populations par rapport à tout cela. Il faut aussi continuer à observer pour rendre crédibles les élections, corriger les disfonctionnements qui ont été signalées.

 

D’autres recommandations qu’on a faites  sont relatives à la révision du fichier électoral car, il y a  plus de 300.000 jeunes qui ont l’âge de 18 ans et qui ne pourront pas voter. Ils n’ont pas pu voter pendant la présidentielle et pendant les élections législatives ils ne pourront pas voter également. Mais en 2014, pour les élections communales, il faut revoir de fond à comble le fichier électoral pour l’adapter. Ce sont là, quelques recommandations qu’on a faites et qui méritent un suivi réel.

 

 

Allez-vous déployer des observateurs à Kidal malgré l’insécurité qui y prévaut ?

Nous allons déployer des observateurs à Kidal car nous interviendrons sur l’ensemble du territoire national. Pour l’élection présidentielle, nous avions déployé 20 observateurs là-bas. Et pour les législatives, nous allons déployer 70 observateurs plus un superviseur. Nous serons partout de Kayes à Kidal.

 

 

Avez-vous un appel à lancer ?

Aujourd’hui,  il ya beaucoup d’organisations internationales qui évoluent dans le domaine électoral  à travers la formation, la sensibilisation et l’observation électorale.

Dernièrement, le ministre de l’Administration Territoriale, lors du deuxième tour de l’élection présidentielle, a reconnu publiquement que le réseau APEM est une organisation de la société civile malienne qui a apporté quelque chose. Et  nous pensons que  les partenaires techniques et financiers, les bailleurs de fonds, tous les pays amis du Mali doivent aider davantage les organisations de la société civile malienne.

 

 

Un tronc d’arbre a beau resté longtemps dans l’eau, il ne deviendra jamais un caïman. Donc, les partenaires, les organisations internationales qui évoluent dans le domaine des élections, elles ont beau faire, elles ne pourront supplanter les organisations nationales.

Donc, on a besoin d’appui technique, d’appui financier, de transfert  de compétences, de technologies pour que demain, nous soyons aptes pour relever les défis. Car, je pense qu’au Mali, nous avons des organisations de la société civile capables de relever le défi et qui n’ont besoin que d’être appuyées.

 

Propos recueillis par Dieudonné

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