Festivals au Mali : Les explications de Kora Dembélé, Directeur national de l’Action culturelle

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Le directeur national de la DNAC (Direction nationale de l’Action culturelle), Kora Dembélé, nous a accordé, lundi dernier, une interview dont le thème portait sur les festivals au Mali. Il s’est expliqué sur la nature des festivals, les relations entre le département de la Culture et les organisateurs ainsi que sur le financement de ces manifestations culturelles.

 

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Le Républicain  Qu’entendez-vous par festival ?

 

Kora Dembélé : C’est une manifestation à caractère festif organisée à une période fixe, annuellement, le plus souvent, autour d’une activité liée aux spectacles, aux arts, aux loisirs, au tourisme, etc. et susceptible de durer plusieurs jours. Il existe plusieurs types de festivals.

 

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Que pensez-vous du nombre des festivals ?

 

Kora Dembélé : Il faut saluer  la multiplication des festivals au niveau national, parce que ça dénote de l’engouement que les opérateurs culturels – qui ont choisi d’aller sur ce terrain –  ont pour la culture. Mais qu’est-ce qui se passe ? On ne doit pas organiser un festival pour organiser un festival. Le festival   obéit à des normes.  Il doit être organisé  par des professionnels, si c’est par des communautés, le festival doit être structuré. La préoccupation  ne relève pas du niveau du nombre mais de l’anarchie qui est créée au niveau de  l’organisation de ces festivals. A titre de rappel, le ministère n’est pas resté les bras croisés en ce qui concerne les festivals. Le ministère a organisé une journée de concertation   qui a regroupé les organisateurs de festivals, les producteurs de spectacles, les gouverneurs de régions,   les présidents des assemblées régionales, les directeurs régionaux qui sont en poste et des opérateurs culturels privés. Nous avons abouti, au cours des débats, à une conclusion qui a pris en compte la réglementation  des festivals au niveau  national. Il existe donc une réglementation à laquelle on doit donner un caractère de loi maintenant.

 

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Quelle est la participation de l’Etat à l’organisation de ces festivals ?

 

 

Kora Dembélé : Tout se fait à partir d’un certain nombre de critères. C’est l’obéissance aux critères qui détermine  la participation de l’Etat à l’organisation de ces festivals.

 

 

En plus de ces critères, le ministère de la culture a un  droit de regard sur ces festivals. Tant que nous le pouvons, nous effectuons des missions pour aller voir comment ça se passe sur le terrain. Tout n’est pas négatif dans l’organisation de ces festivals, parce qu’il y a des découvertes, la promotion de la culture,  il  y a plusieurs aspects positifs. Donc, il faut mettre dans la balance les aspects négatifs et les aspects positifs. On ne peut pas interdire les festivals, ça participe de la démocratisation  de la culture.  C’est une manifestation souvent de nos communautés qui veulent s’exprimer à travers la culture, ça renforce la cohésion sociale, et du coup,  la paix dans la contrée entre les gens. De ce fait, les festivals participent au rapprochement des populations

 

 

 

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Quelle est la part du financement de l’Etat ?

 

 

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Kora Dembélé : L’Etat ne peut pas financer tous ces festivals, mais l’Etat fait de son mieux pour    apporter un appui financier et technique, à travers ses structures, c’est-à-dire   ses directions nationales. Cette volonté seule de l’Etat, vu les   maigres ressources du ministère de la Culture, ne suffit pas pour accompagner ces festivals. Le président de la République a donné des orientations, en la matière, pour que  toutes ces manifestations aboutissent à une structuration. Il faut que les festivals soient structurés. A titre d’exemple, le festival sur le Niger, très connu aujourd’hui, est  un festival qui répond à un type d’organisation, car il est  organisé par des professionnels : il  a un caractère international. Du coup, il ne se prépare pas en une semaine, mais dès qu’un festival finit, les préparatifs de la prochaine édition commencent. On peut catégoriser les festivals sur le Niger dans la catégorie des festivals répondant aux normes d’industrie culturelle parce que tous les aspects se retrouvent dedans. Vous avez le commerce général, les arts et la culture,  la promotion du développement multilatéral, des  expressions artistiques de la localité, etc. Les retombées sont énormes. Si quelqu’un veut organiser un festival, il faut  qu’au bout de la deuxième, troisième édition, on sente une structuration de ce festival, qu’il réponde aux normes et orientations définies par le président de la République   pour que   ceux qui sont dans le secteur vivent dignement des fruits de leur travail.  Que ça ne soit pas fait  en amateurisme et pour qu’on ne soit pas venu pour danser, faire la fête  ensuite croiser les bras. Le ministère insiste à ce que derrière chaque festival il y ait  un projet de développement. S’il y a une école, qu’elle soit accompagnée d’un investissement dans les  Cescom,  structures de jeunesse… Il faut que les festivals s’inscrivent dans la dynamique de développement de la localité

 

Avez-vous des statistiques concernant les retombées. ?

 

 

Kora Dembélé : Non ! Ça aussi, ce sont les  difficultés. En réalité, l’Etat a créé des cellules de planification et de statistique au niveau des départements ministériels. Les départements et les partenaires sont en train d’évaluer la part de  la culture dans l’économie nationale. Comment cette part dans l’économie nationale peut-elle  être déterminée si on n’a pas de statistiques fiables ? Or, pour avoir ces statistiques, il faut que ceux qui organisent ces festivals soient des professionnels. Aujourd’hui, le festival sur le Niger est en mesure de dire que, pour cette édition par exemple, il y a eu 4000 festivaliers qui ont participé, tel nombre de billets de 1000 F, 3000F, vendus, les réalisations des gargotières, les sommes collectées au péage entre Ségou et Bamako, le nombre d’artistes, de groupes, ainsi que leurs cachets…La question des statistiques est un problème crucial. Ce problème n’existe pas seulement au  ministère de la Culture.

 

Nous sommes en train de travailler à cela, en allant vers les organisateurs de festival. Notre cellule de statistiques et de planification a élaboré des fiches et des indicateurs pour que l’Etat puisse comprendre que les festivals peuvent amener une plus-value.  Du coup, nous serons crédibles.

 

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Quels sont les critères d’organisation de ces festivals ?

 

Kora Dembélé : A l’issue de la rencontre entre l’Etat et les organisateurs de festivals, toutes les parties prenantes ont dégagé des critères. De ce fait, les festivals sont classés au niveau national en festivals associatifs et communautaires organisés par les communautés ou des groupes associatifs dans les villages (Kumantum, Yatéla) et en festival initiés par des professionnels ( festival sur le Niger, Triangle du Balafon, Kayes-Médine…) Pour bénéficier de l’appui de l’Etat, les organisateurs doivent justifier de la régularité de la tenue de l’activité ; de leur comptabilité, l’avis de l’administration centrale et de l’autorité de la collectivité ; l’avis du gouverneur ; l’autonomie de financement après trois éditions ; la production d’un rapport technique et financier ; l’existence et la mise à disposition de supports audiovisuels, photos, coupures de journaux, images VCD ou DVD, discours, textes de conférences, banderoles, etc. Tout festival à caractère patronyme et clanique est banni. Il faut, aussi, respecter l’authenticité de notre patrimoine culturel et l’existence d’une structure organisationnelle dynamique permanente.

 

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Propos recueillis par Baba Dembélé

 

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