Dans un entretien qu’il a bien voulu nous accorder, le directeur général de la Protection civile, le colonel Seydou Doumbia, évoque les questions relatives aux missions de son service, livre les statistiques de ses activités et révèle les réformes apportées au sein de la Protection civile notamment au niveau de la formation des agents…
Aujourd’hui : Comment se porte-t-elle la Protection civile malienne ?
Colonel Seydou Doumbia : La Protection civile malienne se porte très bien parce que ses missions sont de plus en plus connues par la population malienne. Nous constatons également que ce sont les populations qui font la demande d’ouverture des postes de secours dans leur localité. Aussi, en cas d’accident, celles-ci requièrent de plus en plus l’avis des agents de la Protection civile avant toute assistance. Tous ces éléments prouvent que la protection civile est bien comprise par la population.
Quelles sont exactement les missions de la Protection civile ?
La Direction générale de la Protection civile a été créée par l’ordonnance N° 098-026/P-RM du 25 août 1998. Elle est un service central du ministère de la Sécurité et de la Protection civile avec pour mission d’élaborer les éléments de la politique nationale en matière de Protection civile et de veiller à la mise en œuvre de cette politique.
Elle est également chargée d’organiser, coordonner et évaluer les actions de prévention des risques et de secours en cas de catastrophes. Nous participons à l’élaboration et à la mise en œuvre des plans de secours et veillons à assurer la protection des personnes, des biens et de l’environnement en cas d’accidents, de sinistres et de catastrophes, en liaison avec les autres services concernés. La protection civile veille aussi à la sensibilisation et à l’information du public.
Comme autres missions, disons que la protection civile participe également aux actions en faveur de la paix et de l’assistance humanitaire ainsi qu’à la défense civile. Elle concourt à la formation des personnels chargés de la Protection civile.
Pouvez-vous nous donner quelques statistiques de vos activités ?
Dans le cadre de l’exécution de nos missions de prévention, de préparation et de réponse aux accidents, aux sinistres et catastrophes, nous œuvrons à garantir non seulement un meilleur cadre de vie aux populations, mais également à assurer la protection des populations sur toute l’étendue du territoire national.
À ce titre, de 2015 à nos jours, nos unités ont effectué au total 32 743 interventions pour secourir et assister 42 656 victimes.
Ainsi, en 2015, les unités de protection civile ont effectué 13 771 interventions pour secourir et assister 20 304 personnes. En 2016, 14 972 interventions ont été effectuées pour secourir et assister 22 352 victimes. Au cours du premier trimestre de l’année 2017, nous avons enregistré 4 085 interventions de nos unités pour sécourir 5 427 personnes. Par ces chiffres, nous constatons de manière croissante le nombre des interventions des unités de protection civile, d’une année à l’autre et corrélativement le nombre de personnes secourues.
Ces performances accrues, d’année en année, illustrent à suffisance la montée en puissance de la Protection civile de notre pays qui constitue une partie des résultats tangibles des réformes importantes enclenchées au sein de la Protection civile, sous l’impulsion du ministère de la Sécurité et de la Protection civile, le Général de brigade Salif Traoré.
Quelles sont les réformes importantes apportées au sein de la Protection civile de 2015 à nos jours ?
Il est difficile d’apprécier à leur juste valeur les changements intervenus à la Protection civile de 2015 à nos jours car si nous pouvons quantifier le nombre de véhicules et autres engins réalisés, ainsi que les unités construites ou réhabilitées, par contre il est impossible de mesurer l’impact combien positif de ces changements sur le moral de la troupe, toute chose qui se reflète à travers la présentation physique, l’allure et le rendement au service du sapeur-pompier malien d’aujourd’hui. Ces changements sont perceptibles dans tous les domaines de la vie du sapeur-pompier, au point que certains les qualifient comme une véritable révolution à la Protection civile. Nous allons donc énumérer, à titre illustratif, quelques aspects de ces réformes qui s’inscrivent en droite ligne dans le processus global de réforme du secteur de la Sécurité, notamment son volet consacré aux services de Sécurité et de Protection civile.
Sur le plan de l’encadrement institutionnel, de 2015 à nos jours, la Protection civile a bénéficié d’un meilleur encadrement institutionnel grâce à l’adoption de certains textes majeurs dont une Loi, 12 décrets, 15 arrêtés et autant de décisions ministérielles.
Parmi ces textes, il convient de mettre en exergue la Loi portant Statut des fonctionnaires de la Protection civile, le Décret portant sur le Plan d’organisation des secours, communément appelés Plan Orsec, la Stratégie nationale de gestion des risques et des catastrophes et le Décret portant sur les dispositions particulières applicables aux différents corps de la Protection civile. Nous pouvons également souligner que l’adoption de ces textes majeurs a créé la confiance auprès de nos partenaires et suscité leurs engagements de plus en plus accrus aux côtés de la Protection civile.
Sur le plan de la restructuration du service, la Protection civile a connu d’importantes réformes structurelles qui ont porté sur la création de sept nouvelles sous-directions ou services et de trois nouvelles directions régionales. Ces services sont les suivants : le Service d’audit et de contrôle interne, le Service des relations publiques et coopération, la Sous-direction des ressources humaines, la Sous-direction des finances et du matériel, la Sous-direction de la santé et du secours médical, le Centre national des opérations d’urgence, le Laboratoire d’analyse et de recherche, les Directions régionales de la Protection civile de Kidal, Ménaka et Taoudéni. La création de ces trois dernières directions régionales consacre la présence de nos services dans toutes les régions administratives de notre pays.
Sur le plan du renforcement des capacités opérationnelles, les améliorations ont porté sur le personnel, les équipements et les infrastructures. S’agissant du personnel, nous nous intéresserons aux effectifs, au recrutement, à la formation et à l’amélioration des conditions de vie des agents.
En ce qui concerne les effectifs, la Protection civile comprend aujourd’hui quatre corps à savoir ceux des Administrateurs, des Techniciens, Agents techniques et des Sapeurs-pompiers. Le dernier corps, celui des Sapeurs-pompiers a été créé en 2015.
L’effectif global est d’environ 1 700 éléments dont 12 % de personnels féminins. Nous pouvons affirmer que ces effectifs devront évoluer pour atteindre à l’horizon 2021 un total de 4 000 éléments, grâce à la mise en œuvre de la Loi de programmation relative à la Sécurité intérieure (Lpsi).
Au cours de la période 2015-2016, nous avons procédé au recrutement de 500 élèves sapeurs-pompiers. Aussi, le recrutement de 350 élèves fonctionnaires de la Protection civile est en cours. Nous avons également d’importantes innovations dans le processus de recrutement en cours, ce qui le distingue des recrutements précédents. Il s’agit, entre autres, de la participation effective de la direction des Ressources humaines du ministère de la Sécurité et de la Protection civile, de l’appui-conseil de la composante Police de la Minusma, de l’introduction de la carte Nina parmi les documents de candidatures, de l’élargissement des lieux de dépôts de dossiers jusqu’au niveau des postes de secours routiers pour rapprocher les lieux de dépôts des dossiers des candidats. Ces innovations visent à améliorer davantage la qualité du recrutement en diminuant considérablement les erreurs.
Quel est niveau de la formation des agents de la protection civile ?
De 2015 à nos jours, nous avons suivi des formations dans tous les domaines d’activités de la Protection civile, tant au Mali qu’à l’étranger. À cet effet, nous pouvons noter que durant cette période, 710 fonctionnaires de la protection civile, tous corps confondus, ont bénéficié de formations à l’intérieur, notamment grâce aux appuis de la Mission onusienne au Mali et de la France, mais aussi à l’extérieur, grâce aux bons rapports de coopération avec certains pays dont l’Algérie, la France, le Burkina Faso, le Canada, les États-Unis d’Amérique, la Suisse et la Chine.
En plus de toutes ces formations, nous pouvons également nous réjouir de l’amélioration des conditions de vie et de travail des fonctionnaires de la protection civile, notamment la dotation individuelle conséquente du personnel en effets d’habillement et l’adoption du décret octroyant des primes et indemnités aux fonctionnaires de la protection civile.
Pouvez-vous nous parler du renforcement en termes d’équipements de la protection civile ?
La Direction générale de la protection civile (Dgpc) a bénéficié de 29 véhicules dont des ambulances, des engins incendie, des camions de transports pour le personnel et le matériel. Nous avons également réceptionné 13 motos, deux Zodiacs, deux pirogues à moteur, sept groupes électrogènes et des matériels divers. Ces équipements ont permis d’optimiser les rendements de nos unités d’intervention et améliorer la qualité de leurs prestations auprès des populations.
Sur le plan des infrastructures, nous avons pu ouvrir quatre nouveaux centres de secours, à savoir les centres de secours des 1008 logements, de Kati, de Kabala et Kita et celui de la ville de San devra suivre dans les prochains jours. Nous venons d’inaugurer le poste de secours routier de Kénieba pour couvrir la Route nationale (RN 24). C’est une localité située à 250 km de Kayes et à 233 km de Kita, donc un poste de secours routier était très nécessaire sur cet axe afin de réduire le temps d’intervention. Avant son inauguration, en cas d’accident, il fallait attendre l’intervention du centre de secours de Kati ou de Kayes, selon le lieu de l’accident. En plus, nous avons constaté que cette route est trop accidentogène. Les derniers accidents en date ont fait 28 morts.
Pour élargir nos domaines d’intervention, nous prévoyons de mettre en place des unités nautiques pour accentuer notre intervention sur les cours d’eau. Aujourd’hui, nous avons plus 60 agents de la protection civile formés dans les techniques de sauvetage sur les eaux. D’ailleurs, nous sommes en train de mener des plaidoyers auprès des plus hautes autorités de pays pour la construction et l’équipement d’une unité nautique sur le fleuve Djoliba. Dans nos prévisions, des unités seront installées dans certaines zones de la région de Mopti où l’activité fluviale est très intense.
Il y a aussi la construction en cours d’une infirmerie à la Direction régionale de la protection civile de Gao. Grâce à l’appui de la Minusma, nous sommes en train de rénover les centres de secours de Dravéla, Sogoniko, ainsi que les directions régionales de Ségou, de Mopti et de Tombouctou.
Quels sont les défis auxquels la Protection civile est confrontée ?
Malgré le tableau reluisant que présente la Protection civile, elle connait cependant quelques insuffisances qu’il mérite de prendre en compte afin de rendre le service encore plus performant. Il s’agit notamment de l’insuffisance des effectifs, l’insuffisance de formation, l’insuffisance d’infrastructures pouvant accueillir les bureaux de l’École nationale de la Protection civile (Enpc), du Centre national d’œuvre universitaire (Cnou), des unités d’interventions et des infirmeries. Nous pouvons également citer l’insuffisance d’équipements individuels et collectifs.
En termes de perspectives, nous comptons réhabiliter les unités en état de dégradation pour poursuivre le maillage du territoire par la création de plus d’unités d’interventions en vue d’assurer des secours de proximité à nos populations. Nous allons continuer à entretenir et à développer davantage nos rapports de partenariat et de coopération.
Quel appel avez-vous à lancer à l’endroit de la population malienne ?
De nos jours, la Protection civile est en pleine expansion. Ses missions concernent tous les domaines de la vie, notamment dans les foyers, sur les lieux de travail, sur les routes et les cours d’eau. Elle est un service incontournable dans la gestion des catastrophes naturelles, celles d’origines humaines ou technologiques. La protection civile se distingue par le professionnalisme avéré de son personnel.
Grâce aux efforts consentis par l’État, les appuis importants des partenaires, la protection civile s’acquitte honorablement de ses missions d’assistance et de secours auprès de nos populations. En plus des efforts de l’État et de ceux des partenaires, nous demandons à tous, notamment aux collectivités, opérateurs économiques, élus et la presse, d’apporter leur appui à la protection civile, comme le stipule le thème de la dernière Journée internationale de la protection civile : “Ensemble avec la protection civile face aux catastrophes”. Avec l’accompagnement de tous, nous y arriverons, Inchallah !
Réalisé par Boubacar PAÏTAO
32 000 interventions ? Je l’avais dit, BAMAKO est la ville des voleurs. Du DABANANI à KOULOUBA, en passant par SÉBÉNINKORO, on ne voit que des voleurs !! 😀😀😀😀😀😀😀😀😀😀😀😀
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