Notre pays s’apprête à organiser un évènement majeur phare pour attirer les investisseurs. Il s’agit d’un grand forum initié par l’Agence pour la promotion des investissements (API-Mali) dont le Directeur général, Moussa Ismaïla Touré, nourrit de grandes ambitions pour le Mali. Au terme de cette rencontre, il prévoit de générer 200 milliards F CFA d’investissement pour 2017 et 300 milliards en 2018. Lisez plutôt.
Vous êtes à la tête de l’Agence pour la Promotion de l’Investissement (API-Mali) depuis février 2015. Quel est votre bilan et quels sont vos chantiers ?
Moussa Ismaïla Touré : Il faut se rappeler d’abord de l’état dans lequel j’ai trouvé l’API-Mali : une agence en crise où le personnel avait 7 mois de retard de salaire, qui a perdu ses cadres clés, et qui roulait avec un budget annuel insignifiant de 248 millions de F.CFA, sans compter l’absence d’une bonne gouvernance, etc. Une situation chaotique en réalité !
Dans ce contexte, nous avons ouvert plusieurs chantiers pour restructurer API-Mali et la doter de l’organisation optimale, des ressources humaines et financières adéquates à l’image de ce qui se fait de mieux au niveau des meilleures agence au monde. Malgré le fait que la restructuration a pris plus de temps que prévu et n’est toujours pas finie, les premiers résultats sont là : retour de la gouvernance avec l’acquisition d’outils de gestion et la mise en place de procédures modernes ; retour de la confiance des Partenaires Techniques et Financiers ; doublement du budget ; augmentation continue des investissements (132 milliards en 2015 et 145 milliards attendus en 2016) ; le paiement régulier des salaires ; modernisation des outils de travail ; amélioration des services aux usagers ; ouverture en 2016 de 3 Antennes Régionales du Guichet Unique de création d’entreprises.
Ces quelques résultats encourageants doivent être consolidés. La restructuration au niveau des ressources humaines doit se terminer en toute urgence et permettre à l’API-Mali de se doter des compétences nécessaires pour réaliser ses missions.
Vous avez décidé d’organiser une grande rencontre au Mali en 2017, le Forum « Investir au Mali 2017 ». Pourquoi ce forum ?
Comme vous le savez, le Mali a traversé depuis quelques années une grave crise. Elle a eu pour conséquence d’affaiblir notre économie, de ralentir les investissements, et mieux que tout cela, de ternir l’image du pays au niveau international et national. Dans notre rôle de promotion de la destination du Mali, nous nous devions d’initier des activités en vue de juguler ces différents problèmes issus de la crise. Parmi ces initiatives, il y a l’organisation du forum, qui est certainement la plus forte à ce jour. Le forum Investir au Mali se tiendra à Bamako les 25 et 26 septembre 2017. Son objectif premier est de refaire parler du Mali sur le plan économique et de façon positive. Il permettra tout au long des préparatifs de véhiculer une image positive du pays et faire passer des messages positifs. Et dire à la communauté économique nationale et internationale qu’il fait bon d’investir au Mali, que les opportunités sont toujours là. Elles sont encore plus intéressantes. Il vaut mieux être parmi les premiers pour en profiter plus.
Qui sont les cibles de ce forum ?
Nous voulons un forum ouvert à tout le monde. D’abord, nous souhaitons mettre en avant les acteurs locaux. Quand je dis les acteurs locaux, il s’agit de tous ceux qui sont déjà présents au Mali et qui sont en train d’investir. Ce sont des maliens, des entreprises maliennes et de groupes internationaux qui opèrent déjà au Mali. Nous tenons à ce que ces acteurs qui sont déjà installés, soient mis en avant. Nous allons travailler de plus près avec eux dans le but de réunir les conditions idoines pour le développement de leurs affaires au Mali. La deuxième cible, c’est la diaspora malienne. Elle représente un pouvoir économique très important et qui est très active dans leurs pays d’accueil. Si vous prenez par exemple le Congo, les maliens sont parmi les plus grands opérateurs dans ce pays. Nous pensons que s’ils sont capables de porter des projets dans ces pays, ils sont capables de faire la même chose chez eux aussi. Cela devrait être encore plus facile. Ils ont juste besoin d’avoir les bons interlocuteurs, d’avoir les bonnes informations et un accompagnement digne de ce nom que l’API-Mali veut leur apporter. C’est pour cela que la diaspora est vraiment une cible majeure. Enfin, ce sont tous les investisseurs, étrangers notamment, qui ont des capitaux et qui cherchent des opportunités dans le monde. Nous allons leur faire comprendre que le Mali est une terre d’opportunités et qu’ils ont leurs places parmi nous.
Quelles stratégies avez-vous mises en place pour faire venir ces investisseurs ?
Ce que nous avons prévu dans le cadre de ce forum, notamment pour sa promotion, c’est d’organiser plusieurs activités de promotion. Ce qu’on appelle des « Road show ». Nous allons organiser des évènements pour promouvoir le forum dans un certain nombre de pays où nous allons toucher nos cibles. Je parlais du Congo par exemple où nous envisageons d’organiser une rencontre destinée à la diaspora malienne pour parler du forum et des opportunités d’investissements au Mali. Nous allons mener plusieurs activités identiques en Europe, en Asie, dans les pays du Moyen Orient, en Amérique du Nord, … pour susciter l’intérêt autour de ce forum et des opportunités qu’offre le Mali.
Justement, quelles sont les opportunités que vous comptez mettre en avant ?
On a coutume de dire que dans notre pays tout reste à faire. C’est une réalité. Mais on ne peut s’attaquer à tout en même temps. C’est pourquoi, nous avons été amenés à la suite des études que nous avons faites, à prioriser un certain nombre de secteurs, en droite ligne des priorités définies par les plus hautes autorités. Nous avons limité à 4 secteurs la promotion proactive que nous allons mener. Cela ne veut pas dire que les autres secteurs sont abandonnés. Mais ces secteurs retenus vont faire l’objet d’une promotion active. Il s’agit d’abord de l’Agriculture/Agrobusiness, le secteur prioritaire parmi les priorités. Nous avons l’énergie qui est aujourd’hui un des secteurs les plus dynamiques au Mali, notamment au niveau des énergies renouvelables. Nous avons les infrastructures dont les besoins sont tangibles au quotidien. Enfin compte tenu des avantages comparatifs du Mali, nous avons retenu le secteur de l’élevage. Le Mali a le plus grand cheptel de la sous-région. Aujourd’hui, nous sommes un des grands exportateurs d’animaux sur pieds. Nous nous disons que nous devons transformer cette opportunité en réalité locale, pour créer des abattoirs, des usines pour les produits laitiers, créer des usines pour faire de l’aliment bétail. Il y en a qui existent déjà, mais il en faudrait beaucoup plus pour satisfaire une demande croissante. C’est cela notre objectif. Voilà les 4 secteurs sur lesquels nous allons nous focaliser pour réussir ce forum.
Quels sont les résultats attendus de ce forum ?
En termes de résultats, déjà nous comptons organiser un forum de standing international. Parce que nous ne pouvons faire de l’amateurisme. Aujourd’hui, tous les pays sont en compétition, toutes les économies sont en compétition. Donc, nous devons aller vers l’excellence. C’est pour cela que nous avons lancé un appel à manifestation d’intérêt au niveau international pour attirer les compétences qui peuvent nous accompagner dans l’organisation de ce forum afin de le réussir et l’inscrire dans l’agenda international des rendez-vous d’affaires à ne pas manquer. Un autre résultat attendu, c’est de voir dans notre pays le niveau des investissements s’accroitre de façon significative. Ces dernières années, nous tournons autour d’un volume moyen d’investissements de 100 milliards de francs CFA qui sont agréés au code des investissements. Notre objectif est de doubler cela sur les deux prochaines années. Et c’est possible. Nous travaillons à cela. Nous comptons sur le forum afin qu’il serve de levier pour accélérer les investissements dans notre pays. Enfin, nous espérons qu’au cours de ce forum, des partenariats solides vont se nouer entre les acteurs économiques maliens et étrangers autour de projets stratégiques et structurants. Voilà les principaux résultats attendus. In fine, tout cela va contribuer à améliorer l’image du Mali. Ce point est critique pour notre pays aujourd’hui. Le Mali doit renouer avec son image historique de pays et de peuple de paix et de fraternité. Cela est une condition sine quoi none pour le développement escompté.
Concrètement, en termes chiffrés, quel est le volume d’investissements que vous attendez après cette rencontre ?
Le forum des 25 et 26 septembre prochain sera l’aboutissement d’un long processus qui va drainer les investissements tout au long de 2017 et après. Il ne s’agit donc pas des résultats de ces deux seuls jours. Comme dit auparavant, la croissance continue des investissements est un de nos objectifs. Notre objectif pour 2017 est de générer 200 milliards de F.CFA d’investissements et arriver à 300 milliards en 2018. C’est le défi que nous nous sommes lancés et nous allons le relever !
Un appel à lancer pour mettre en confiance les investisseurs dans un contexte de crise ?
L’appel à lancer c’est dire que le Mali est riche, plein de potentiels. Les Maliens se battent pour la paix. Cette paix doit être consolidée par des victoires économiques. Ce forum sera une victoire économique pour le Mali. Nous invitons tous les acteurs d’ici et d’ailleurs à venir y contribuer et à saisir les opportunités qu’offre le pays.
Une telle rencontre a bien un budget, combien il coûtera ?
Nous avons élaboré un budget de 1,5 milliards de F.CFA. Ce dernier sera financé par le budget de l’Etat en partie, la contribution des Partenaires Techniques et Financiers comme le Groupe de la Banque Mondiale, l’USAID, la Banque Africaine de Développement, … et bien sûr la contribution du secteur privé malien.
Interview réalisée par Youssouf Diallo