Cheick Oumar Tidiane Doucouré, DGA CMDT : « L’eau potable, la santé, l’éducation vont constituer les éléments majeurs qui conditionneront le nouveau programme de développement stratégique »

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Cheick Oumar Tidiane Doucouré, DGA CMDT

En sa qualité de directeur général adjoint de la Compagnie Malienne pour le Développement des Textiles, CHEICK OUMAR TIDIANE DOUCOURE joue un rôle essentiel dans la gestion de la Holding. A ce titre, sa mission consiste à assister, représenter  le président directeur général dans  sa fonction de représentation et de  premier responsable de la compagnie. Pour ce faire, il reçoit du président directeur général toutes les tâches censées pouvoir être conduites pour non seulement la supervision des missions et des activités qui sont en cours, l’annulation, la planification, la mise en œuvre et  l’évaluation des différentes activités, tant dans le domaine agricole que dans le domaine industriel, mais également les activités qui concernent la gestion des ressources humaine et  financière , le contrôle de gestion. Dans cet entretien exclusif qu’il a bien voulu nous accorder,  il fait le point sur la mise en œuvre du programme  quinquennal  de développement stratégique de  la filière coton du Mali qui arrive à terme en  2018.

Le Pouce : La CMDT-HOLDING  avait conçu un programme de développement stratégique de la filière coton du Mali  qui s’étalait sur cinq, à savoir 2013 à 2018. A quelques encablures de la fin de la mise en  œuvre de ce programme, qu’est-ce qu’on peut retenir ?

CHEICK OUMAR TIDIANE DOUCOURE

« J’ai l’avantage de conduire une équipe pluridisciplinaire au niveau de la compagnie malienne pour le développement des textiles, constituée des éléments de la production agricole, des éléments de la production industrielle et bien entendu l’équipe de la cellule qualité, de la direction des ressources humaines. Au délà même de la CMDT, dans cette équipe, qui a  eu à travailler sur la production d’un programme quinquennal intitulé  programme de développement stratégique de la filière coton du Mali, il y a eu aussi la participation d’une équipe de l’ Office de la Haute Vallée du Niger, du coordinateur et des chargés de production au niveau de la confédération des producteurs du coton du Mali. Cette équipe a eu à travailler pour sortir les orientations que la filière cotonnière devrait prendre permettant l’atteinte des grands objectifs. Le travail avait consisté en son temps de faire l’état des lieux. A partir de l’état des lieux, nous avons compris que le niveau de production en  2013,  n’était pas très satisfaisant.  Ça tournait autour de 220.000 à 230.000 tonnes de coton graine. A la même époque, le rendement coton graine n’était pas flatteur. Il était inférieur à 900kg  à l’hectare. Au plan agricole, les deux éléments qui sont la production et productivité  méritaient  d’être repensé et galvanisé. Au délà de la production et la productivité agricole, le constat avait été fait sur le potentiel même de production. Il avait été constaté que les sols en zone cotonnière étaient beaucoup moins fertiles. Il fallait travailler sur cette problématique. Au plan industriel, le constat avait montré la grande vétusté des usines, mais également celle du parc des transports ; la forte dépendance de l’autoproduction en termes d’énergie. Toutes les usines CMDT, hors mis quelques-unes, deux  ou trois, fonctionnaient en autoproduction,  sur centrale CMDT. Cet état de fait, a constitué aussi, un élément qui, du reste  a été beaucoup plus travaillé dans le plan de stratégie pour arriver à des niveaux beaucoup plus appropriés. Le niveau de production qui était attendu pendant le quinquennat, devrait s’établir à 800.000 tonnes de coton graine. A ce stade pour la campagne qui est en cours, on va être autour de 650.000 tonnes. Il y a toujours un gap à rattraper. Fondamentalement, le niveau de production va avec la capacité de nos usines.  Cette capacité d’installer tourne autour de  575.000 tonnes de coton graine.  Nous devrons continuer à travailler sur l’extension au plan industriel de la capacité avec des nouvelles constructions, avec un parc auto beaucoup plus renforcé pour faire en sorte que les 800.000 qui sont attendues courant le quinquennat et  qui va être prendre fin en  2018, que nous soyons en phase au plan industriel et production agricole. Autres résultats, c’est beaucoup plus le rendement, la productivité. Je disais que le diagnostic  en son temps avait montré un rendement moyen inférieur à 900 kg /hectare. Pour cette campagne 2017-2018, le rendement sera de l’ordre de 980Kg/hectare. Ça veut qu’il y a eu un bond assez significatif  en termes de productivité qui peut être encore renforcé. Compte tenu du potentiel des différentes variétés, on pourra aller au délà de la tonne/ hectare. Mais juste pour expliquer que  le point de départ s’est fait avec un rendement inférieur à 900kg/hectare et qu’à ce stade, avec la mise en œuvre du programme de développement stratégique, on est à peu près un peu moins de 1000 kg/hectare. En ce qui concerne la qualité, elle s’était aussi totalement effondrée. Avec les changements climatiques, les difficultés de bons stockages du coton auprès des producteurs, avec les questions de suivi, d’itinéraires techniques, portées sur la bonne récolte, nous avons connu des moments où la qualité du coton était nettement dépréciée. Au plan industriel, nous avons travaillé sur trois grands axes. Le premier axe, c’était une mise à niveau des anciennes usines que nous avons dans notre  parc.  Il fallait faire en sorte que nous  arrivions à maximiser leurs capacités. Il fallait travailler sur l’achat des pièces de qualité. Il fallait s’occuper des campagnes de révisions pour faire en sorte  que nous augmentions la capacité de production de ces usines-là.

Après, on a aussi cherché à aller vers la modernisation. C’est faire en sorte qu’il y ait plus d’équipements nouveaux. Par exemples, l’augmentation du nombre d’égreneuses. Le troisième axe a porté sur la construction de nouvelles usines. On en a fait. Actuellement, l’usine de Kadiolo est en chantier. Le chantier de Kimparana démarrera quelques semaines après plus tard. Tout ceci mis ensemble fera que, la capacité installée qui au moment de démarrage du plan quinquennal était pour 575.000tonnes  passera  à 695.000 tonnes, annuelle. Nous avons aussi donné des orientations pour que notre dépendance en termes de production énergétique soit suffisamment soulagée des centrales. Au lieu que nous continuons à s’autoproduire l’énergie, on a  pris l’option d’aller vers le raccordement des usines sur les branchements d’EDM-sa.  Ce programme est en cours. Les  trois usines de Koutiala, I, II et III, sont interconnectées.  L’usine de Koutiala IV est aussi raccordée sur le réseau EDM.  Les usines de Dioïla, de Bamako, de kita, de Sikasso I, sont sur déjà EDM. Le nouveau programme fera en sorte que celles de Kignan, de Koumantou, de Kadiolo, de karangana,  de Kimparana soient aussi raccordées sur EDM. Il y a eu déjà un grand pas, à peu près un bon paquet d’usine a été raccordé. Et le reste se fera dans le quinquennat qui commencera à partir de 2018.

En ce qui concerne le parc de transport, l’approvisionnement des usines est assuré à plus de 55% par le parc CMDT. Dans ce parc, le constat  avait montré que les camions étaient très vétustes. Les rotations jours, les chargements moyens et  les consommations, tous ces ratios donnaient des niveaux très bas. Ça méritait d’être amélioré. C’est ce qui a été  fait. On s’est procuré de nouveaux camions. Du coup, on a pu améliorer les ratios de transport, la rotation, le chargement moyen, la consommation. Tous ces ratios ont été améliorés courant le quinquennat.

Au plan commercial, dans le plan  de développement stratégique, ce que nous avons mesuré comme avancée, c’est la diversification en ce qui concerne les négociants avec lesquels nous traitons. Dans la panoplie de négociants, vous allez voir qu’à ce stade, on traite avec des sociétés européennes, des sociétés d’Asie. On a aussi des sociétés africaines. On a pu multiplier nos chances en faisant en sorte que nous travaillions avec le maximum de négociants.  Ce sont ces négociants qui ont été fidélisés par rapport au résultat  de notre politique commerciale. Ce résultat va dans le sens de donner du coton de qualité, de respecter les clauses contractuelles en ce qui concerne l’évacuation au moment des embarquements. Tout ceci mis à bout, a permis d’attirer d’autres négociants vers la CMDT. Ils sont nombreux à se bousculer devant le bureau du directeur commercial pour être inscrit sur la liste de ceux-là qui sont à consulter sur la vente de la fibre.

Dans le même programme, il a été question de renforcement de capacités pour les agents de la CMDT, de l’OHVN, mais aussi  les producteurs. Beaucoup de  programmes ont été  initiés pour faire en sorte que nous soyons en phase avec les nouvelles techniques de la technologie pour  faire en sorte que les activités qui sont conduites au quotidien puissent l’être, en respectant les standards et en atteignant  des objectifs.  Ces programmes de formation ont été conduits au niveau de l’OHVN, au niveau de la CMDT et même au niveau de la confédération des producteurs de coton. Il en est de même aussi pour le programme de recrutement. Les recrutements, il y en a eu, dans le cadre de la production agricole, de la production industrielle, le cadre des finances. Dans ces domaines, nous avons recruté. Et courant du quinquennat, il y a eu plus de 400 personnes qui ont été nouvellement recrutées  tant pour des contrats à durée indéterminée, que pour ceux-là qui ont des contrats à durée déterminée.

Je m’en vais aussi donner comme éléments pour faire le point d’un bilan de mi-parcours de notre programme stratégique, c’est la  performance que nous avons pu avoir en ce qui concerne  le maintien du potentiel de la productivité. Par ce que, on avait compris qu’avec le retrait de la CMDT  des activités  de certaines missions de services publics, la partie maintien de potentiel de productivité avait  baissé un peu.  Au cours du quinquennat, nous avons renforcé notre présence avec  l’apport d’engrais, l’apport calcaire, pour inverser carrément la tendance de la fertilité au niveau des sols. Cela a été beaucoup pour le résultat que nous avons au niveau des rendements tant pour le coton, tant pour les céréales. Les céréales, il faut en parler. Nous avons pu renforcer l’autosuffisance alimentaire dans la zone cotonnière. La production par habitant qui était au moment où on commençait la mise en route du plan stratégique, de l’ordre de 278kg /hectare  est passée jusqu’à 413 kg/hectare dans la zone cotonnière. On sait qu’au niveau FAO, il est conseillé d’être  autour de 250kg/hectare par habitant  pour assurer l’autosuffisance alimentaire. En zone cotonnière, nous sommes au délà de ça. Nous avons pu faire des réalisations dans d’autres domaines. En dehors des céréales, nous avons travaillé sur les cultures de diversification. Le programme a retenu que nous développions certaines cultures de diversification entre autres, les cultures de soja, de sésame.  Ce sont des cultures qui peuvent être conduites concomitamment avec la culture céréale et avec  la culture cotonnière. Ce sont de grandes avancées. A ce stade, c’est ce  que nous pouvons retenir, comme résultats partiel bien entendu de la mise en route du programme de développement  stratégique 2013-2018 ».

Le Pouce : Est-ce que vous envisagez un autre programme au terme de celui  de 2013-2018 ?

CHEICK OUMAR TIDIANE DOUCOURE

« On est en train de s’organiser pour mettre un nouveau programme qui partira de 2018 et pour les cinq années à venir. Dans ce programme, les orientations qui sont données par le département de tutelle, par notre direction, vont dans le sens de faire en sorte que nous puissions renforcer la transformation de la production. Ce programme s’articulera autour des actions comme la transformation de la fibre. Il y a aussi la production à partir d’un autre  système, beaucoup moins dépendant des aléas climatiques. Il s’agit notamment de  la culture du coton en système irrigué.  C’est faire en sorte que ce que  la pression du changement climatique puisse être atténué. On va travailler aussi pour aller vers la valorisation de la graine,avec l’utilisation du linter, cette substance qui couvre la graine. La graine de coton est couverte d’une fine couche et qui permettra d’avoir une fibre  beaucoup moins longue que la fibre qui est commercialisée. Cette fibre peut être utilisée à d’autres fins. Nous envisageons la valorisation du linter. Ce sont des cultures de diversifications. En plus du soja, nous sommes en train de voir de très près, comment faire localiser d’autres cultures en faisant en sorte que nous diversifions les revenus. Il s’agit de faire en sorte que  les sources de revenus ne soient portées  que sur le coton.  Les cultures qui sont envisagées sont le  l’oseille de Guinée, l’anacarde, la culture arachidière. Suivant leur localité, il  est prévu que ces cultures puissent augmenter la chance de diversification de revenus. Au plan industriel  pour le prochain programme, nous envisageons renforcer nos capacités d’égrenage. En 2022, nous envisageons une production de 1million de tonnes. On va travailler sur le raccordement des autres usines réseau EDM pour minimiser le coût de notre  consommation énergétique. Quand on va commencer à travailler en ayant le bilan exact  du quinquennat précèdent, on peut donner suffisamment de visibilité aux orientations tant du gouvernement du Mali, que du département de tutelle, mais aussi du conseil d’administration de la CMDT.

Dans la nouvelle stratégie, nous allons privilégier le renforcement de capacité, mais beaucoup plus l’alphabétisation  fonctionnelle. Nous avons compris qu’avec le recentrage de la CMDT, qui du reste à amener l’externalisation de certaines missions, dites missions de services publics, l’alphabétisation fit partie de ces missions. A ce stade, nous avons suffisamment besoin de néo alphabètes dans toutes les exploitations cotonnières. Nous avons en termes de normes au moins deux néos par exploitation. Il y a beaucoup d’exploitation qui n’ont pas un seul néo alphabète. On va beaucoup accentuer l’alphabétisation fonctionnelle. On va travailler sur l’amélioration des conditions de vie de populations qui sont dans les zones cotonnière. C’est faire en sorte qu’il y’ait beaucoup plus de forages,  pour la production d’eau potable. Il faut que les gens soient en bonne santé pour aller travailler dans le champ, récolter le coton et venir travailler au  niveau des usines. Pour cela, il faut donner de l’eau potable. Nous ferons en sorte qu’il y ait beaucoup de forages combinés dans un programme très cohérent au niveau de zone cotonnière. La question de la        santé ne sera pas occultée.  Nous allons amélioré le plateau  technique des  infrastructures de santé existant. Là où il y a besoin d’en construire, nous allons rendre cette option. L’eau potable, la santé, l’éducation vont constituer les éléments  majeurs qui conditionneront ce programme de développement  stratégique.

L’amélioration  du capital de production, qui est la terre est au centre de ce programme.  La gestion de la terre, de l’acidité de la terre, de la fertilité de la terre, vont être prises en charge dans des programmes bien élaborés avec l’accompagnement des partenaires techniques et financiers »

Entretien réalisé par Tiémoko Traoré

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1 commentaire

  1. Bravo Mr le DGA et bon courage. Toujours beaucoup plus de production mais qu’en est-il de la transformation ? Je me souviens qu’en 2002, ATT dans une interview avait mis l’accent sur la transformation et avait dit que si le Mali pouvait transformer seulement 2% de son coton …..

    Et puis pourquoi ne pas essayer de renforcer les capacité en énergie autoproduite ? Peut-être que les paysans pourraient se raccorder à cela sinon les prix de EDM ne sont pas à leur portée.

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