Cheick Keita, président de L’UDA : «La négociation et la solution militaire ne sont pas contradictoires»

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Cheick Kéita, le président du tout nouveau parti Uda (Union pour la démocratie et l’alternance), dans une interview qu’il accordée conjointement aux journaux Le Prétoire et Le Zénith Balé se prononcent sur les grandes questions de l’heure, c’est-à-dire la situation sécuritaire, les négociations de Ouagadougou, et les solutions qu’il propose au pays. A rappeler que Cheick Kéita est candidat à la présidentielle de juillet prochain.

 

Colonel Cheick Keita,

Quelle est la position de votre parti face à la situation sécuritaire du pays ?
 
Cheick Kéita : La sécurité est un droit fondamental. Elle est malmenée par la montée des incivilités, des violences à la personne, des atteintes aux biens dont les personnes vulnérables sont les principales victimes. Seule une politique cohérente dans ses objectifs et dans sa durée agissant sur les causes, associant prévention et répression pourra produire des effets significatifs

Le Nord Mali est porteur de ruptures graves qu’aucun pays ne peut endiguer seul, et qui risquaient de déstabiliser chacun de nos pays à une échelle sans précédent. Au delà des actes ignobles d’exécution, d’humiliation et de destructions de monuments historiques, il s’agit de menaces transnationales comme le narcotrafic, le trafic d’armes, les prises d’otages et l’utilisation de mines qui réduisent de façons considérables la mobilité pastorale dans toutes les régions nord dont la survie des populations repose sur le nomadisme.

Traqué par l’armée algérienne, harcelé par le Maroc, la Mauritanie, le Niger et le Tchad, le terrorisme a profité de l’immobilisme des autorités maliennes et l’extension du vaste désert malien dont il a investi la partie non contrôlée pour l’utiliser comme camp d’entraînement et rampe de lancement pour ses groupes armés.

Au cours des 20 dernières années, la nébuleuse a intensifié ses menaces dans le sud algérien, à la frontière avec le Mali et le Niger. La branche saharienne du GSPC (Groupe salafiste pour la prédication et le combat, NDLR) continuait de se développer au Sahel, recrutant des militants dans les pays où elle s’implante au vu et au su des dirigeants politiques. Au GSPC, il faut ajouter des éléments du groupe marocain de la prédication et du combat (GMPC) et une partie du front Islamique marocain (FIM), les combattants revenus de Libye, le groupe Salafiste de Iyad Ag Agaly sous la bannière du MNLA et le Boko Haram qui a des ramifications jusqu’au Tchad et au Soudan.

La région du Sahel présente de multiples avantages pour ces  combattants. La zone est immense, peu peuplée, les frontières ne sont ni matérialisées ni contrôlées. Des conflits qui perdurent, un afflux d’immigrés dont ceux (en provenance) de la Libye et un trafic illicite omniprésent contrôlé par de dangereux réseaux mafieux et qui permet aux terroristes de se ravitailler aisément.

Les fondamentalistes bénéficiaient d’une certaine bienveillance des populations musulmanes déshéritées du Sahel, auxquelles ils prodiguaient des soins médicaux élémentaires, et offraient des aides alimentaires, occupant donc le vide créé par l’échec de certains programmes nationaux et internationaux.
La récurrence des enlèvements et d’assassinats de touristes et de diplomates occidentaux dans la région sahélo-saharienne devait interpeller la communauté internationale sur la nécessité impérieuse d’une lutte sans merci contre le terrorisme. Elle mettait en évidence l’existence de réseaux terroristes qui commençait à s’activer, s’enraciner et se développer davantage dans la région du Sahel, une région devenue un lieu de refuge et une base-arrière de tous les groupuscules terroristes, mafieux et criminels.

 
Avant l’intervention française, le Mali était devenu la principale base-arrière des groupes terroristes qui y menaient une politique d’infiltration et d’incrustation territoriale locale très efficace, en raison de l’état d’indigence des populations locales  auxquelles ils se présentent en bienfaiteurs, en apportant une assistance médicale, alimentaire et autres services. Ils mènent une politique de proximité à travers des œuvres charitables pour monnayer leur tranquillité et renforcer leur capital sympathie auprès des populations démunies. Il faut signaler que les groupes terroristes sont matériellement et financièrement soutenus par une monarchie pétrodollars qui veut se faire grande à travers des tours gigantesques, des clubs de football célèbres et par l’envoi de bombes vivantes chez nous.

Les régions du Nord étaient clairement devenues un réservoir de recrutement, une plateforme de formation et de planification d’actions pour plusieurs groupes islamistes radicaux nationaux et étrangers liés à AQMI, dont les effectifs s’étaient accrus, notamment à Gao, devenant ainsi une source de menace majeure contre notre propre sécurité nationale et contre les pays de la sous-région et des intérêts extrarégionaux.

Leurs plans macabres étaient facilités par l’absence de l’Etat et la précarité liée à la situation économique et géographique et la nature désertique de la région.

Même après avoir bouté les terroristes hors du territoire national, l’armée malienne ne peut pas, à elle seule, contrôler les frontières vastes et poreuses du pays. Il est à souligner, dans ce cadre, que le Mali et tous les pays limitrophes ainsi que d’autres pays doivent coordonner leurs actions en vue de sécuriser ce  territoire désertique.

L’apparition de nouvelles menaces et des formes inédites de violences et l’absence d’une doctrine clairement définie posent un défi à la mise en œuvre de ripostes adéquates non seulement de notre armée mais aussi au fonctionnement des Services de renseignements simultanément confrontés aux problèmes de la sécurité extérieure et intérieure.

Les réalités d’un monde multipolaire, la contestation des fonctions régaliennes de l’Etat confronté aux enjeux énergétiques de la zone sahélo-saharienne concernée, soulèvent d’autres interrogations et nous commandent la redéfinition d’une doctrine claire et adaptée aux nouvelles menaces, une restructuration profonde de nos forces armées et de sécurité en vue de parer aux menaces nouvelles auxquelles note pays fait face.

Considérant que la restructuration de nos  Forces armées est plus que jamais  nécessaire, l’UDA a identifié un éventail de menaces : politiques et syndicales, militaires, économiques, et culturelles.
Les menaces politiques et syndicales,  notamment d’ordre insurrectionnel et liés aux pogroms et autres contestations de toute nature, devraient faire l’objet d’études approfondies au niveau du ministère en charge des forces de sécurité (Gendarmerie, Garde Nationale et Police).

Les menaces économiques et culturelles  dont les menaces de sanctions, embargos et suspension ou annulation de formes d’aide, destruction et pillages des patrimoines culturels devraient impliquer les Ministères en charge de l’économie et du commerce, le Ministère des Affaires Étrangères et de la Coopération Internationale et le Ministère de la Culture et du Tourisme.

Les menaces  structurelles parmi lesquelles la multiplicité du commandement (ingérences politiques au plus haut niveau dans la gestion des armées), la rupture de la chaine logistique (difficultés de ravitaillement des troupes à Aguelhok et à Tessalit) les critères de recrutement et de formation, le respect strict du plan de carrière et la restauration de la hiérarchie indispensable au retour de la discipline sont les préalables à toute restructuration.

                              
Qu’est-ce que l’Uda propose comme solution ?
L’UDA pense qu’il faut accorder une attention toute particulière à la lutte internationale contre les forces du mal car ce qui se trame dans la région demande une synergie des efforts militaires pérenne des pays limitrophes et des puissances mondiales.
Aujourd’hui, la négociation et la solution militaire ne sont pas contradictoires, le succès de l’une et de l’autre est fonction de l’évolution de la situation et de l’engagement politique au moment où la capacité de résistance des populations des régions occupées s’était amenuisée du fait du déséquilibre des forces.
Au plan interne,  nous proposons de faire un état des lieux de nos forces armées et de sécurité sans complaisance, et de corriger l’édifice de notre système de défense en y injectant des moyens aériens et moyens terrestres fluides plus adaptés, indispensables pour contrer les nouvelles formes de menaces.

 
Notre pays doit aussi mettre l’accent sur les menaces militaires potentielles qui nous permettront  d’organiser et de restructurer  nos forces armées et de sécurité et de savoir  les faiblesses de notre système de défense actuel, les types de conflits auxquels nos forces armées auront à faire face dans les cinq ou dix ans à venir , les sources de ces attaques et les rapports de forces, et enfin la doctrine dont l’ennemi potentiel dispose pour nous attaquer.

D’autre part, il est incontournable de mettre l’accent sur l’instruction et la formation à donner aux hommes, aux sous-officiers et aux officiers sur une base permanente qui sont aussi les gages de succès et qui permettent de contrer toutes les menaces majeures auxquelles nos Forces armées et de sécurités sont aujourd’hui confrontées.

Plus globalement l’UDA propose de procéder à une véritable révolution des relations entre le pouvoir et ses services secrets, de mettre en place une armée de métier, de renforcer les fondations de la Défense CDEAO, de retisser le lien Armée-Nation, notamment en soulignant le rôle des Armées dans la promotion sociale aussi bien que dans la sécurité civile en cas de crise, nouer un dialogue constructif avec les anciens combattants et les associations patriotiques, de bâtir une politique commune de la défense en Afrique de l’Ouest, pour que nous soyons capables de nous défendre ensemble.

Des négociations sont en cours à Ouagadougou entre le gouvernement et les groupes armés. Qu’en pensez-vous ?
Concernant les négociations de Ouagadougou, la position de l’UDA est on ne peut plus claire.
Aujourd’hui, la négociation et la solution militaire ne sont pas contradictoires, le succès de l’une et de l’autre est fonction de l’évolution de la situation et de l’engagement politique au moment où la capacité de résistance des populations des régions occupées s’était amenuisée du fait du déséquilibre des forces.
La zone de Kidal, de notre point de vue, n’est pas moins bien lotie que celle de Yélimané par exemple, et son indexation pour un éventuel statut particulier peut être une grosse erreur sauf si des avantages  accordés à Kidal sont aussi accordés systématiquement à toutes les autres régions du Mali ayant les mêmes conditions socio-écologiques.

Pour l’immédiat, le processus électoral doit être suspendu en attendant la résolution définitive du « cas Kidal ».
Si par extraordinaire le processus électoral continue comme cela semble se dessiner, l’UDA propose que les élections se passent à Kidal sous le contrôle des forces Onusiennes avec la présence massive de l’Armée Malienne pour ne pas  cautionner  la partition du pays.

Pour l’UDA, il y a un seul mot d’ordre :
PAS D’ELECTION SANS LE RETOUR DE KIDAL SOUS LE CONTRÔLE DE L’ARMEE MALIENNE.  
Dans la situation actuelle du pays, quelle est votre position par rapport à la modernisation de l’administration publique et au rôle de la religion dans les institutions,

Par rapport à la modernisation de l’administration publique et au rôle de la religion dans les institutions, l’UDA pense que la règle de conduite doit rester la règle de droit.

Il faut entamer la modernisation de l’administration publique afin de créer un cadre favorable à l’amélioration des services offerts aux collectivités territoriales et à l’exercice de leurs fonctions d’une part. D’autre part, en aucun cas on ne doit encore ériger un ministère public en ministère d’affaires religieuses car l’efficacité recherchée ne sera pas au rendez-vous, et il y aura le risque de créer des sanctuaires religieux avec des coûts financiers que rien ne justifie. Cependant, le rôle de la religion peut être pris en compte dans l’élaboration des textes de lois et d’application par la voie de la consultation des institutions islamiques reconnues d’utilité publique.
Recueillis pour le Prétoire par Birama Fall

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2 COMMENTAIRES

  1. Si tout les Maliens avaient la meme comprehension , la meme approche le Pays allait vite sen sortir.Courage mon président nous te soutenons dans le combat du parti.

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