Boubacar Keïta, maire de la Commune VI du district de Bamako : « Nous tablons cette année sur un objectif d’un milliard de francs en recettes »

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L’ambition du Maire Boubacar Kéïta et de son équipe est de faire de la commune VI, la collectivité la plus enviée du district de Bamako. Pour atteindre cet objectif, aucun sacrifice ne sera de trop. Déjà, la mobilisation des recettes connaît une nette amélioration avec plus de 692 millions FCFA en 2019 et, cette année, Boubacar Keïta et son équipe voient plus grand. Les potentialités existent sur place. Avec la ferme conviction que les populations jouent un rôle important dans le développement de la collectivité, l’édile  compte beaucoup sur leur compréhension pour une mobilisation accrue des ressources.

Dans cet entretien, le maire de la commune VI se prononce sur les grands chantiers de son mandat, les efforts faits dans le cadre de la communication, des recettes, etc.

Le Challenger : Parlez-nous des grands chantiers de votre mandat !

Boubacar Keita : Est-ce qu’il ne serait pas important d’aller faire un tour pour regarder ces réalisations ? Nous avons mis des lampes solaires dans la commune, 1 200 lampes à travers les quartiers. Nous avons fait des appuis aux ASACO et CAP. Nous avons fait des études sur l’assiette fiscale qui est très importante.

Nous sommes partis du postulat que toute politique de développement a besoin de connaître un coût et surtout d’être soutenue par une meilleure mobilisation des ressources financières. Tirant les conclusions de cette étude, nous avons essayé de nous battre au niveau des centres secondaires d’Etat-civil. Je suis heureux de vous annoncer que les recettes ont beaucoup augmenté.

Nous nous sommes battus aussi au niveau des taxes que les commerçants payaient. En 2019, nous avons fait une recette à hauteur de 692 millions. Nous nous sommes dit qu’il serait important, cette année, de serrer la ceinture. Les insuffisances ont été corrigées. Nos objectifs de recettes pour cette année sont fixés à un milliard et quelques. Nous savons que les potentialités existent. Et nous pouvons atteindre cet objectif.

Nous allons nous y atteler pour mettre la population à l’aise. Qu’elle nous aide et comprenne que ces réalisations sont faites pour elle ! Sans le paiement des taxes, nous ne pouvons pas développer notre commune. Personne ne viendra faire ça à notre place. C’est avec l’argent des contribuables que nous posons les actes de développement. Ensemble, nous allons déterminer les projets dans nos différents quartiers. La commune VI est la plus vaste, la plus peuplée. Il y a trop de défis (sécuritaires, éducatifs, sanitaires et assainissements). Et nous ne pouvons pas les relever si les contribuables ne paient pas les taxes.

Les communes marchent sur fonds propres.  Ce qui suppose une véritable mobilisation des ressources. Pouvez-vous nous parler des efforts que vous déployez dans ce domaine ?

Effectivement, les communes marchent sur fonds propres. C’est vrai qu’il y a cette décentralisation poussée, mais en réalité, nous marchons avec ce que nous gagnons. Le salaire des enseignants a été transféré. Pour la santé, on se bat. Le paiement du salaire du personnel et le développement de la commune sont faits avec nos recettes propres. Il est important que tout le monde s’y mette pour qu’on puisse résoudre les problèmes de recettes. Tant que ce problème n’est pas géré, ce serait très difficile pour les collectivités de s’en sortir et de développer les localités.

Parlez-nous, Monsieur le Maire, des atouts de votre commune, présentée comme l’une des plus grandes du district de Bamako ?

Les atouts sont énormes. En réalité, la commune VI est une commune urbaine où nous avons l’électricité, l’eau, l’école, la santé. Quand vous partez dans chaque quartier, vous trouverez des stations, des écoles fondamentales, des lycées. La commune a trois lycées. Ce qui nous manque aujourd’hui, ce sont les routes. Elles sont impraticables ! Une collectivité ne peut pas faire des routes. Il faut qu’il y ait des discussions à d’autres niveaux pour trouver des solutions. Il faut qu’on nous donne la latitude d’aller négocier pour faire des routes parce que cela nous manque en réalité. L’Etat n’a pas assez de ressources pour dire aujourd’hui qu’il va goudronner l’ensemble de nos voies, faire des pavages dans l’ensemble de nos rues.

L’Etat doit nous donner cette garantie pour qu’on puisse négocier avec des bailleurs de fonds. Les investisseurs ont besoin de garantie. Nous souhaitons que l’Etat revoie un peu sa copie pour qu’on puisse gérer cette question qui est aujourd’hui importante.

Le deuxième défi qui nous tient aujourd’hui à cœur, est la réhabilitation des établissements scolaires. Quand vous entrez dans nos établissements scolaires, vous trouverez qu’il y a à faire.

La commune VI est tellement vaste. Pratiquement, nous sommes la commune qui a le plus grand nombre d’écoles et elles sont délabrées. Nous souhaitons que le ministère de l’Education et notre collectivité se donnent vraiment la main pour réhabiliter nos écoles.

Il est aussi important de renforcer les ASACO. Le renforcement des Centres de santé communautaires et du Centre de santé de Référence sur le plan des infrastructures, équipements, ressources humaines, va beaucoup diminuer l’affluence vers les grands hôpitaux comme l’hôpital Gabriel Touré et l’hôpital du Mali.  Si on arrivait à relever ces défis, on aurait fait beaucoup de choses. Ceux qui viendront après nous, peut-être, pourront continuer. Petit à petit, nous allons bien développer la commune qui sera encore plus vivable.

Parlons à présent des ressources de votre commune pour faire face à la mise en œuvre de votre programme. Vos attentes sont-elles comblées ? Vos populations ont-elles l’esprit de civisme qui les amène à s’acquitter des impôts et taxes divers pour vous permettre d’atteindre vos objectifs ? Avez-vous une stratégie particulière de sensibilisation dans ce sens ?

S’il y a un problème aujourd’hui au Mali, c’est l’incivisme. Il va falloir que tout le monde s’y mette, surtout les journalistes, pour sensibiliser. Il faut sensibiliser les gens à payer leurs taxes. Il faut aussi que les contribuables aient un regard sur la gestion des affaires communales.

Tu ne peux pas être un contribuable et ne pas avoir un regard par rapport à la gestion. Il va falloir créer ce cadre-là. Que les contribuables payent et que les collectivités aient un cadre de concertation pour discuter de ce qui est bon à faire. Les projets seront sélectionnés entre nous. Nous allons définir ensemble les axes de développement. Dans ces conditions, je pense que tout le monde va se retrouver dans ce qui se passe dans la commune.

Pour les recettes, l’année dernière nous avons été surpris. La recette a été à la hauteur. Mais nous avons dit qu’il y a des insuffisances qu’il faut corriger pour atteindre un milliard et quelques. En 2021, on va également voir où il y a des insuffisances, les corriger pour aller à plus d’un milliard, voire deux. Cela nous permettra de recruter, d’aller chercher des bailleurs de fonds.

En ce moment, ceux qui viendront investir dans notre commune seront rassurés que les dettes sont remboursées. Je pense que c’est cela la gouvernance locale. C’est ce dont nous avons besoin.

Quelles sont les difficultés auxquelles vous êtes confrontés dans l’exercice de la gouvernance locale ?

Notre difficulté, c’est l’incivisme dont nous venons de parler. Ce n’est pas facile en réalité. Je pense que chacun doit se battre pour un changement de comportement. C’est à tous les niveaux, les populations, nous les dirigeants, etc. Il faut aussi que tout le monde ait l’esprit de patriotisme et un regard sur sa localité. Je pense que c’est de cela dont nous avons besoin. C’est comme cela que le pays va sortir de cette situation.

Depuis l’arrivée de votre équipe, les choses semblent s’améliorer, comment vous vous y êtes pris ?

Oui. Effectivement, depuis que j’ai pris la tête de la mairie, c’est une concertation qui est là, le dialogue avec tout le monde jusqu’en bas. On discute avec tous les acteurs, on regarde ensemble et on y va ensemble. Ce qui a fait aujourd’hui que nous avons fait une recette de moins de 700 millions pratiquement. Tous les acteurs sont impliqués dans la gestion. C’est ce que nous avons fait. Nous continuons à mener ce combat avec l’ensemble des acteurs.

Si vous devriez vous adresser à vos administrés, Monsieur le chef de l’exécutif communal, sur quel message fort insisteriez-vous ?

Le message que j’adresse à mes administrés, c’est de payer les TDRL sans lesquelles en réalité, nous ne pouvons pas nous en sortir. Nous sommes dans une commune où il y a plus de 800 mille habitants. En faisant un peu de calcul, on se retrouve banalement avec 1 milliard cinq. Si nous avons cela uniquement en TDRL et que les commerçants aussi paient, voyez ce que cela donne ? C’est la seule commune où il y a plein de stations, d’agences de banque, de gares routières.

Si tout le monde s’y met et participe, nous pouvons vraiment relever le défi. Nous sommes au service de la population et nous avons besoin de sa collaboration pour créer la confiance.

Propos recueillis par Drissa Togola

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