Bamadou Sidibé, Président du COGIAM : « Les dépôts de transit sont transformés en terrains à usage d’habitat par les mairies »

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L’assainissement, un sujet à l’ordre du jour dans le quotidien des maliens. Des carrés au sommet de l’état, en passant par les GIE (Groupement d’Intérêt Economique)  de ramassage des ordures ménagères, les  mairies, les directions régionales et par la direction nationale, des stratégies sont mises en œuvre pour rendre nos villes propres. Des réunions se tiennent ça et là dans les quartiers, des ateliers de formation des acteurs se multiplient à l’échelle du pays, un forum national sur l’assainissement s’est même tenu du 11 au 13 avril 2006, au centre international de conférence de Bamako qui a abouti à l’adoption d’une politique  nationale de l’Assainissement, malgré tout nos cités sont insalubres.
L’Enquêteur : Monsieur Bamadou Sidibé, vous êtes le président du COGIAM. Pouvez-vous nous présenter votre organisation ?
Bamadou Sidibé : Le COGIAM, Collectif des groupements intervenant dans l’assainissement au Mali a été créé en Mai 1996. Il est une organisation faitière des GIE de ramassage d’ordures du Mali. Ses objectifs  essentiels sont de mettre en place un cadre de concertation opérationnelle entre les GIE, de créer un cadre étroit de concertation entre les différents partenaires œuvrant dans le domaine de l’assainissement et de la protection de l’environnement, d’œuvrer pour un meilleur raffermissement des rapports entre, d’une part,  les populations et les intervenants, les pouvoirs publics et les intervenants, et d’autre part entre les intervenants eux-mêmes, d’assurer le développement des aptitudes des intervenants à travers des volets de formation  et enfin d’informer, de sensibiliser et d’éduquer la population sur les questions d’hygiène et d’assainissement
L’Enquêteur : Malgré cette parfaite organisation, les ménages qui sont vos premiers clients se plaignent de la qualité des prestations de vos membres. Comment expliquez-vous cela ?
Bamadou Sidibé : Effectivement les ménages sont nos premiers clients car notre mission fondamentale est l’organisation de la pré-collecte des ordures ménagères. Les ménages assurent le financement de ce premier niveau de l’assainissement, d’où la notion d’assainissement de proximité. Il  s’agit de ramasser les ordures quotidiennement produites et de les déposer sur les dépôts de transit désignés par les responsables communaux. Cependant depuis 2006, la ville de Bamako est confrontée à une problématique de dépôts de transit du fait de la transformation des sites en terrains à usage d’habitat sur autorisation des responsables communaux. Ainsi on se trouve en face d’une situation d’augmentation du taux de production des déchets à cause de la croissance vertigineuse de la population sans dépôt de transit.
L’Enquêteur : En tout cas la situation est grave car le District de Bamako comme les plus grandes capitales régionales sont sales ?
Bamadou Sidibé : Je ne dirai pas que la ville de Bamako est sale car elle a le même système d’assainissement que les autres capitales Africaines. D’ailleurs, la plupart d’entre elles se sont  inspirées de l’expérience de Bamako pour bâtir leur système de pré-collecte de déchets solides. Ceci dit, pour revenir à votre question, je dirais que l’assainissement étant une activité transversale nouvellement transférée aux communes, de ce fait, tous les acteurs sont appelés à assumer leurs responsabilités dans le processus. Il s’agit notamment des ménages qui  sont responsables de la production et de la mise en poubelle, les GIE chargés du ramassage pour la mise en dépôt, les responsables communaux chargés de l’aménagement et de l’évacuation régulière des dépôts de transit vers les décharges finales et enfin l’Etat, de qui relève l’aménagement des décharges finales destinées à recevoir l’ensemble des déchets issus des dépôts de transit. Voici ainsi schématisé le système organisationnel  de la gestion des déchets solides de notre capitale. Il est assez important de signaler que, de l’indépendance à  nos jours, aucune capitale régionale ne dispose de décharges finales  sauf Sikasso. Les ordures de nos villes sont évacuées et dispersées entre les champs périurbains. En conclusion, je dirais que l’Etat et les Communes sont les premiers responsables dans la situation d’insalubrité que traversent nos Villes.
L’Enquêteur : Pouvez-vous nous donner d’avantage d’explications sur vos rapports avec les mairies ?
Bamadou Sidibé : Nous avons un rapport de gestion déléguée d’un service communal qui est l’activité de ramassage d’ordures ménagères dont les règles du jeu sont consignées dans un document contractuel et accompagnées d’un cahier des charges précisant les rôles et les responsabilités de chaque acteur impliqué dans la mise en œuvre du système.

L’Enquêteur : Au-delà de cela, est-ce que les GIE de ramassage des ordures ménagères prennent part à l’élaboration du PDSEC, le Plan de développement social, économique et culturel des communes?
Bamadou Sidibé : L’assainissement est un  volet du PDSEC. Pendant son élaboration, les élus font appel à tous les acteurs de développement de la commune, donc à ce titre nous participons au processus d’élaboration des PDSEC.  Cependant la plupart de ces documents dorment dans les terroirs et souffrent d’un manque de mobilisation de moyens pour leurs mise en œuvre et suivi.
L’Enquêteur : L’Etat, vous l’avez dit est à la fin et au début du processus d’assainissement de nos villes. Dans ce cas, qu’attendez-vous concrètement de lui, afin de permettre aux maliens de vivre dans des cadres de vie sains ?
Bamadou Sidibé : Je pense que nous sommes dans  le processus de mise en œuvre de la décentralisation qui est régie par des textes. Dans ce cadre, l’Etat malien a réussi à élaborer une Politique Nationale d’Assainissement. Un cadre institutionnel est aussi mis en place par l’Etat en vue d’harmoniser les interventions des acteurs de l’assainissement. Il reste à l’Etat de jouer pleinement son rôle  d’accompagnement et de  suivi des collectivités en vue d’une bonne mise en œuvre de la politique d’Assainissement.
L’Enquêteur : Aujourd’hui plus qu’hier les GIE ont besoin de renforcement de capacités, aussi bien sur le plan  structurel qu’en équipements. Y a-t-il un espoir à nourrir dans ce sens ?
Bamadou Sidibé : Effectivement les responsables de GIE sont des chefs d’Entreprises, donc ils ont besoin de renforcement de capacités dans tous les domaines de la gestion pouvant leur permettre de consolider leurs organisations. L’espoir est permis dans la mesure où  nous venons de boucler en 2012 une série de  sessions de formation des agents de GIE sur la récupération et la commercialisation des déchets. Ces sessions ont permis de partager avec les participants beaucoup d’opportunités d’affaires. En termes de chiffre avec l’appui technique et financier du Partenaire SNV/MALI, nous venons de renforcer les capacités professionnelles de 239 Responsables de GIE d’assainissement de la ville de Bamako.
L’Enquêteur : Je rappelle que vous êtes le président du COGIAM et vous êtes en fin de mandat, parce qu’élu depuis près de 3 ans maintenant. Êtes-vous satisfait de vos actions à la tête du collectif ?
Bamadou Sidibé : J’ai mis au service de mon collectif, mon expérience de conduite d’organisations de la société civile, maintenant c’est aux membres d’apprécier positivement ou négativement mon leadership.
L’Enquêteur : C’est la fin d’année, votre vœu pour l’année 2013 ?
Bamadou Sidibé : Mon vœu est que l’année 2013 soit pour tous les GIE, une année de succès et de  prospérité des activités d’assainissement sur  l’ensemble du territoire du Mali. En dehors de ces vœux professionnels, je souhaite que le Mali retrouve son intégrité territoriale.
Ange De VILLIER

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