Autisme : “Il n’existe pas de mesure préventive”

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Le 2 avril a eu lieu la Journée mondiale de sensibilisation l’autisme. Elle vise à mieux édifier la population sur les réalités de ce trouble du développement. Pour mieux comprendre, nous avons approché Dr. Oumar Konaté, neuropsychologue, formateur et biologiste.

 Mali Tribune : C’est quoi l’autisme ? Comment devient-on autiste ?

Dr. Oumar Konaté : L’autisme ou trouble du spectre de l’autisme (TSA) est un trouble neuro-développemental chez des enfants. Il se caractérise par une altération qualitative des interactions sociales et un trouble de la communication (verbale et non verbale) associé à un répertoire de comportements restreints, répétitifs.

L’autisme est diagnostiqué chez les enfants avant l’âge de 3 ans. Les facteurs de risques sont multiples, ils peuvent être environnementaux ou génétiques. Parmi ces facteurs de risque on peut trouver l’âge parental avancé, c’est-à-dire l’âge paternel (˃ 40 ans) et l’âge maternel (˃ 35 ans) sont un facteur de risque significatif d’autisme.

Mali  Tribune : Quels sont les signes majeurs de l’autisme ?

Dr. O. K. : Un enfant autiste présente généralement des troubles de l’interaction sociale. Il a des difficultés à communiquer avec son entourage. Il éprouve des difficultés à décoder les expressions émotionnelles et à interpréter les intentions des autres. Ce qui d’ailleurs est à la base de sa solitude, il est toujours isolé dans son coin. On observe chez la personne autiste un manque d’empathie. Il a également un trouble de langage, c’est-à-dire que l’enfant commence à parler tardivement, cela s’explique par le trouble de développement, il parle toujours avec un rythme anormal ou une tonalité anormale.

Un trouble de comportement, c’est-à-dire que l’enfant fait des gestes répétitifs. Il est fidèle à une routine et des rituels particuliers. L’autiste est toujours insensible à la lumière, au son, au toucher. Parfois, on assiste à des grises de colère, d’agression sur soi-même ou dirigée vers son prochain.

Mali Tribune : Avez-vous une idée du nombre de patients autistes au Mali ?

Dr. O. K. : Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), 1 enfant sur 100 est diagnostiqué dans le monde. Au Mali, selon mes informations, une étude menée dans les structures sanitaires de prise en charge de santé mentale (le service de psychiatrie du Centre hospitalo-universitaire – CHU du Point G – et l’Association malienne des déficients mentaux – Amaldeme – dans le district de Bamako a trouvé 7,8 % d’autistes parmi les malades neuropsychiatriques âgés de moins de 17 ans.

Mali Tribune : Quels sont les différents types d’autismes ?  Est-ce qu’il se transmet ?

Dr. O. K. : Les différents types d’autisme sont : l’autisme infantile, caractérisé par un développement anormal ou altéré chez les enfants de moins de 3 ans. Chez ces enfants, nous observons des manifestations psychopathologiques comme l’absence d’interaction sociale, le trouble de la communication et du langage, le trouble du comportement.

Après nous avons l’autisme atypique, c’est une forme d’autisme, mais qui survient plus tardivement c’est-à-dire après l’âge de 3 ans. Dans cette forme d’autisme, on observe les 3 grands symptômes chez les autistes qui sont : le trouble d’interaction, le trouble de communication ou du comportement. On peut retrouver un seul mais ça ne se manifeste pas comme chez l’autisme infantile.

Nous avons également le syndrome d’Asperger, les personnes touchées par le syndrome d’Asperger n’ont  pas de troubles du langage, ni de troubles du développement cognitif. On a également repéré qu’elles pouvaient faire preuve d’une mauvaise habileté.

L’autisme ne se transmet pas en tant que tel génétiquement, si on a un apparenté atteint d’autisme, cela peut augmenter la chance aux autres frères de la famille à avoir la maladie.

 

Mali Tribune : Peut-on prévenir l’autisme ?

Dr. O. K. : Il n’existe pas de mesure préventive contre l’autisme. Par contre, on peut essayer de diminuer les symptômes si toutefois on arrive à les diagnostiquer rapidement.

Aujourd’hui, ce que je conseille aux parents, c’est d’essayer de comprendre les enfants autistes. Dans la société africaine, on est toujours dans les traditions. Une fois qu’on voit un enfant avec un comportement, on pense directement à des choses mythiques. Prenez le temps de passer voir des spécialistes. Le degré du trouble dépend du temps de diagnostic. Si on arrive à diagnostiquer rapidement le TSA (trouble du spectre de l’autisme), on peut faire la prise en charge tôt et aujourd’hui il existe des thérapies pour atténuer les symptômes chez les enfants autistes.

TEMOIGNAGE

“Avec courage et amour on s’en sort”

 Etre maman d’enfants autistes en Afrique est vraiment un combat de tous les jours sur tous les plans c’est-à-dire médical et sociétal. Car on doit se battre pour l’accès à la santé et pour que l’enfant ne ressente pas le regard négatif de la société. Tel est le cas de Mme Keita Aïchata Kéita, mère de deux enfants dont l’aîné est un autiste.

 “Lorsque ma fille est née, j’ai tout de suite su qu’elle avait un problème. J’en ai averti les médecins qui m’ont dit : ‘les enfants sont pas tous pareils, ne vous inquiétez pas’. Personne ne m’a écouté, pas même mes proches. Mon bébé avait le regard dans le vide et fuyant.

Par la suite j’ai consulté plusieurs pédiatres qui m’ont tous dit la même chose, ils ne voyaient aucun problème, arguant que c’était dans ma tête. Mais avec insistance et le diagnostic de certains spécialistes, mes doutes ont été confirmés.

En grandissant elle présentait de plus en plus de retard de développement, des difficultés de motricité et elle était non verbale (aucun mot).

Vers 3 ans, j’ai dû batailler pour qu’elle soit prise en charge afin d’avoir un suivi de psychomotricité, psychologique, psychiatrique, orthophoniste et éducatrice spécialisée. L’assistante sociale nous a aidés pour qu’on puisse avoir les aides nécessaires, afin qu’elle puisse être scolarisée.

Avec tous les suivis, orthophoniste, psychomotricité, psychologue, éducateurs spécialisés, elle a acquis de nombreuses connaissances et parle maintenant de façon compréhensive. Aujourd’hui à 7 ans elle fait de grands progrès.

Etre parent d’autistes n’est pas chose facile, car il faut être fort de caractère pour ne pas faire ressentir à l’enfant le regard négatif de la société. Etre toujours présente afin de dissiper ses doutes, donner toujours des ondes positives avec beaucoup d’amour.

Jusque-là,  elle s’adapte et avec l’aide des proches on essaie de l’aider pour gérer ses différentes crises à longueur de journée. On ne concentre pas sur le regard des autres, elle vit sa vie du mieux qu’on peut.

Je souhaite dire à ceux qui pensent que leur enfant a un ‘problème’, que quelque chose ne va pas, qu’il faut en tant que parent, s’écouter et ne jamais baisser les bras ! Même si c’est dur, que personne ne nous écoute, il faut persévérer et continuer de chercher pour le bien être de son enfant”.

Aïchatou Konaré

 

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