ATT sur RFI à propos de la lutte contre le terrorisme : «Dans la bande sahelo-saharienne, le maillon faible c’est le déficit de la coopération sous-régionale»

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" Dans la bande sahélo-sahélienne le maillon faible c’est le déficit de la coopération sous-régionale… Il faut renforcer la coopération qui commence à naître en Algérie et descendre  rapidement sur le terrain. Nous ne sommes pas incapables de résoudre ce problème". Telles sont, entre autres, des déclarations faites par ATT dans une interview accordée à nos confrères de RFI, en marge du sommet de la francophonie.

. le président bonjour, il y a plus d’un mois, sept expatriés ont été enlevés au Niger, on dit aujourd’hui qu’ils sont au  Mali. Avez-vous des nouvelles des otages ?

ATT : Je voudrais d’abord rectifier, ils ont été enlevés au Niger, certes, mais vous savez que le nord du Mali, c’est le sud d’un autre pays, c’est le nord d’un second et l’est d’un autre. Moi je pense que ces messieurs n’ont pas une adresse postale indiquée. Et je pense aussi que  tous les efforts que nous avons déployés ne nous ont pas permis de percer ce secret, c’est de nous rendre compte où se trouvent exactement les otages. Par contre, je peux dire clairement et c’est sûr,  qu’ils sont dans la bande sahélo-saharienne.

A votre connaissance les contacts ont-ils  été établis avec les ravisseurs ?  Connait-on les revendications de ces ravisseurs ?

Non ! Moi je ne connais pas les revendications de ces ravisseurs.  Nous  avons réaffirmé au président Sarkozy notre engagement, d’abord sur le plan humanitaire, ensuite au plan des relations d’amitié qui nous lient à  la France.   Nous ne pouvons pas être indifférents au sort  des gens qui ont été enlevés, surtout qu’il y a une femme.

Vous avez des nouvelles de sa santé?

Malheureusement non ! Mais je n’ai pas de mauvaises nouvelles non plus.

Donc, pour  l’instant, vous avez eu des preuves de vie qui vous rassurent quand même.

Je n’ai pas eu de mauvaises nouvelles, mais je vous avoue que je ne peux pas dire, d’une manière nette, ce qui se passe. Pas de mauvaises nouvelles, bonnes nouvelles, peut-être.

On accuse votre pays d’être laxiste dans la lutte contre le terrorisme. On parle souvent de maillon faible. Qu’est-ce que vous répondez à ces accusations?

Je pense d’abord, qu’il n’y a pas de chaine, où voulez-vous qu’il y ait un maillon? Je pense que cela est trop facile. La guerre contre le terrorisme, nous l’avons essayée plusieurs fois. Pendant deux ans, nous nous sommes battus seuls et avec toutes les charges que cela comporte, au plan de l’effort de guerre aussi bien qu’au plan des pertes humaines. Mais nous avons dit, depuis 2006, qu’il y a une menace, ce n’est même pas une, mais c’est une somme de menaces.  Nous avons  demandé à nos pays  voisins que nous organisions ensemble une conférence sur la paix et le développement. Nous avions essayé le tout militaire, mais il a des limites. Des gens sont venus sous le couvert de l’humanitaire pour s’infiltrer au sein de nos populations. Face à cette situation notre réponse a été le développement.

A deux reprises ces derniers mois, les forces mauritaniennes sont intervenues dans la région de Tombouctou, sur votre territoire, cela signifie-t-il  que votre armée manque de moyens,  qu’il faut la renforcer, mieux l’équiper ? Mieux l’entraîner ?

Dans tous les cas,  notre armée est prête et celui qui vous parle est un Général d’armée, donc je connais la valeur de nos hommes et les moyens dont disposons. Vous savez que le Mali et les autres pays  se sont entendus pour éviter une sanctuarisation de ces groupes. Nous nous sommes dit: accordons-nous les droits de poursuite. Si, par exemple, un évènement se passe au Mali, nous avons le droit de poursuite sur le territoire mauritanien. Et la Mauritanie a fait usage de ce droit de poursuite qui a, certainement, ses règles militaires. Mais la dernière mission que la Mauritanie a effectuée au Mali a été largement supportée sinon accompagnée parallèlement par  l’armée malienne.

Elle a été un succès ?

Oui elle a été un succès. Cependant, ce sont des attaques ponctuelles dans la bande sahélo-sahariennes. Je pense que le maillon faible c’est le déficit de la coopération sous-régionale. Chacun parle, chacun veut trouver un coupable, et nous ne faisons rien depuis. Moi je pense que c’est cette coopération qui commence à naître en Algérie et qu’il faut renforcer. 

A priori, vous n’êtes pas très chaud que des militaires français viennent à Bamako, à Gao ou à Kidal ?

D’abord, je suis convaincu d’une chose, c’est que la réponse au problème dans la bande sahélo-saharienne, est sahélo-saharienne. Ce sont nos Etats  face à leurs responsabilités. Nous ne sommes pas incapables de résoudre cette question. La France joue déjà un grand rôle, elle nous appuie dans le cadre de la formation des troupes, dans l’échange des informations et dans l’équipement de nos armées, et  cela dure depuis plus d’un an et a connu une accélération, qui peut permettre d’avoir les capacités recherchées pour lutter contre le terrorisme.

Pensez-vous  que le problème est d’origine algérienne,  donc reste toujours un problème algérien ?

Non, aujourd’hui le problème est un problème de la bande sahélo-saharienne. Mais une chose est sûre, c’est que le terrorisme n’est pas malien et les terroristes ne sont pas des Maliens.

Aucun ?

Quelques uns peut-être  parce qu’il y a, aujourd’hui, du banditisme aussi dans une certaine limite.

Monsieur le président, il y a quelques jours, vous avez réuni à Bamako des experts sur la lutte contre le terrorisme et l’Algérie n’est pas venue, comment lever ce malentendu avec l’Algérie?  

L’Algérie n’a aucun malentendu avec nous. Bien au contraire. Il y a deux semaines, nous nous sommes rendus en Algérie à deux reprises.  Le chef d’Etat major des forces armées maliennes était là- bas et  a même dirigé une partie des travaux. Ensuite, c’était le directeur des renseignements. Au moment où je vous parle, nous avons des militaires maliens, des officiers maliens en Algérie, à Tamanrasset. Aujourd’hui, la coopération avec l’Algérie sur ce plan ne pose  pas de problème. Je voudrais rectifier que ce ne sont pas nous qui avons initié cette rencontre du G8. Maintenant le fait que l’Algérie ne soit pas venue, ce n’est pas nous qui avons adressé les invitations, donc j’ai du mal à porter un commentaire.

M. le président, le nouveau président de la Commission électorale en Guinée est Malien, c’est une sacrée surprise. J’imagine que vous êtes un peu moins surpris que nous. Vous devez avoir quelques informations depuis quelques jours, qui a eu cette idée et qui vous l’a proposée ?

D’abord, il faut dire que c’est un spécialiste qui, depuis très longtemps, travaille dans l’organisation des élections; c’est un fonctionnaire, un officier malien que nous avons, à la limite, prêté à l’OIF. C’est dans ce cadre qu’il s’est retrouvé en Guinée. Maintenant, je pense qu’on lui a certainement demandé son avis,  les autorités guinéennes l’on accepté, les candidats n’étaient pas contre, le médiateur, le président Blaise Compaoré, a fait un effort, la dernière décision revenait nous revenait quand même, car c’est un officier actif. Et nous nous pensons que tout ce que nous pouvons faire pour aider la Guinée ne nous gêne pas du tout. Mais si la Guinée accepte un Malien pour gérer une telle situation, on ne peut qu’être flatté  parce que l’on dit que la Guinée et le Mali sont deux poumons d’un même corps.

C’est un bon point pour la démocratie malienne ?

C’est un bon point pour la Guinée surtout. Parce que je mesure le courage politique dont la Guinée a fait preuve en l’acceptant. Et puis, le village du  Général Siaka  Toumani Sangaré  est plus proche de la Guinée que de Bamako.

   Transcrite par Youssouf Camara

 

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