Aliou Traoré, président du Conseil des maliens de Guinée : «Le Mali et la Guinée, c’est le Mandé commun»

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Aliou Traoré, président du Conseil des Maliens de Guinée (Comagui) depuis 2005, nous a accordé une interview à Conakry le 26 avril 2013. Sans langue de bois, il parle ici du bilan à mi-parcours “mitigé” de son deuxième mandat, des rapports souvent difficiles entre Maliens résidant en Guinée et des relations tout à fait fraternelles entre Maliens et Guinéens.

 

Vous avez entamé votre deuxième mandat à la tête du Comagui depuis 2010. Quel en est le bilan à mi-parcours ?

 AT- Mon bilan est assez mitigé. J’ai certes posé des actes phares mais j’ai été confronté à des agissements qui ont été pour moi une épine dans le pied par rapport à certaines composantes ethniques. Et je suis en train d’affronter ces comportements pernicieux. Au Mali, il n’y a ni Nordistes ni Sudistes, il n’y a que des Maliens. J’ai des Nordistes dans mon bureau et tout se passe très bien entre nous. J’ai subi ces intrigues de la part de gens qui ne reconnaissent pas mon bureau et qui se réclament, comme moi, représentants du Haut Conseil des Maliens de l’extérieur (Hcme) malgré la légalité et la légitimité de ce bureau du fait de sa reconnaissance par les autorités maliennes et guinéennes. Mais, je crois qu’avec la patience, mes adversaires retrouveront le bon sens. Je suis tout à fait d’accord qu’en démocratie il y ait un débat contradictoire. La division, personne n’a à y gagner. Le seul comportement dont nous puissions tous profiter, c’est le respect des lois et règlements du pays d’accueil en faisant référence à l’application correcte du même genre de textes dans notre propre pays, notre patrie, le Mali. Donc, le bureau exécutif et moi-même sommes en train de déployer des efforts pour cultiver l’esprit de convergence et d’équipe afin de mieux gérer le social des Maliens sur le territoire guinéen.

En ce qui concerne les actes marquants posés dans le cadre de la gestion de la communauté et au nom de celle-ci, nous nous sommes retrouvés en septembre 2010 pour célébrer le Cinquantenaire et souffler le gâteau d’anniversaire de l’accession du Mali à sa souveraineté. Ensuite, l’année dernière, nous avons activement contribué à la résolution de la crise du Nord en termes de don de vivres et de matériels en plus d’une somme d’argent de 2 500 000 F CFA. Un seul de nos compatriotes, Mohamed Chleu alias Mohamed Koutay, a fait un don de 80 tonnes de riz d’une valeur de 20 000 000 de F CFA pour les déplacés. Et, au nom de tous les Maliens de l’extérieur, le Président du Hcme a remis 100 000 000 de F CFA au Gouvernement dans ce cadre. Je saisis cette occasion pour l’en remercier.

 

Quel est l’état des relations avec votre pays d’accueil ?

 Avec les autorités guinéennes, les relations sont au beau fixe. Nous vivons en harmonie avec les Guinéens et nous nous sentons vraiment chez nous. Ça se passe très bien entre Maliens et Guinéens. Nous sommes même confondus les uns aux autres quand nous sommes ensemble. Nous avons les mêmes comportements, les mêmes mœurs. En gros, c’est le Mandé commun. Pour preuve, le mythique Sosso Bala, vestige du Royaume du Sosso, est cogéré par le Mali et la Guinée !

 

Quel est l’état des questions culturelles et sociales du Comagui, en particulier la situation  des étudiants maliens en Guinée ?

Je tiens à préciser que les étudiants maliens sont ici à titre privé : ce ne sont pas des boursiers. La convention liant le Mali à la Guinée en matière éducative n’est donc pas forcément appliquée dans ce cas. Ce que je déplore surtout, c’est que ces étudiants ne sont pas assez proches du Comagui. Ils restent confinés dans le cadre universitaire et ne se joignent à nous que lors d’événements particuliers tels que les compétitions sportives entre les différentes communautés estudiantines. Alors, ils nous font appel et nous les assistons matériellement et moralement.

 

Des Maliens soupçonnés d’être des jihadistes ont été rapatriés de Guinée il y a quelques mois, quelle a été votre contribution à la gestion de cette crise ?

Tout d’abord, il y a eu fausse note côté guinéen dans la forme et dans le fond. Dans la forme, le Mali et la Guinée sont unis par une convention judiciaire. Donc, rapatrier des Maliens demande une procédure qui n’a pas été respectée. Et dans le fond, ces Maliens vivent avec nous depuis plus d’une décennie. Ils étaient en réunion hebdomadaire pour discuter de leur petit commerce et de la gestion de leur caisse commune. Par exemple, s’ils paient un carton de lait, ils en partagent le contenu, le vendent et se réunissent ensuite pour en distribuer les bénéfices. Le jour où ils ont été interpellés, ils s’exprimaient dans leur langue qui n’est pas le bambara, donc incompréhensible par ceux qui les ont arrêtés. En fait, ils n’ont rien de commun avec les jihadistes a fortiori les Touaregs. Heureusement, avec l’arrivée à Conakry d’une mission malienne pour toucher du doigt les méandres de cette affaire, les autorités guinéennes ont compris et ont décidé de les remettre dans leurs droits. Le rôle joué par le Comagui, c’était de les assister en détention, d’alerter les autorités maliennes et d’engager les procédures sociales d’usage auprès de nos frères et amis guinéens. A la date d’aujourd’hui, les Maliens rapatriés sont tous à Conakry dans leurs activités respectives.

 

Quel type de rapports entretenez-vous avec les autorités pénitentiaires guinéennes à propos des Maliens prisonniers de droit commun ?

C’est l’ambassade du Mali qui s’occupe de ce genre de cas. Notre apport, c’est d’appeler nos bases dans les différentes régions de la Guinée pour connaître, à leur niveau, le nombre de Maliens en prison, d’en faire la liste, de la confronter à celle des Ong, de dresser une liste définitive et de la déposer à l’ambassade.

 

Propos recueillis par Zoubeïrou Maïga

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