… Dr Cheick Modibo Diarra, Président du Rassemblement pour le Développement du Mali (RPDM) : On ne peut pas avoir un programme sérieux pour le développement de ce pays sans faire appel à toutes les forces vives de la nation»”

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Dans cette deuxième et dernière partie de l’entretien qu’il nous accordé, le président du Rassemblement pour le Développement du Mali (RpDM), Dr Cheick Modibo Diarra a insisté sur la nécessité de changement car, selon lui, vous trouverez seulement quelque 500 personnes qui vous diront que tout va bien. Tout le reste de la population croupit dans la misère. D’autre part, il ne fait aucun mystère quant à sa candidature à la présidentielle de 2012.

L’Indépendant : Vous dites que le changement au Mali est aujourd’hui indispensable ?

Cheick Modibo Diarra : Oui. Cela ne fait aucun doute. Tout le monde, dans le monde entier, pense ainsi. Peut-être que dans le Mali, vous trouverez seulement 500 personnes qui vous diront que tout va bien. Mais tout le reste vous diront qu’il nous faut changer, sinon on va droit au mur. Il faut, en effet, changer notre façon de faire. Nous ne pouvons pas vivre sans créer de la richesse. Il faut éviter de faire la fuite en avant en vivant simplement de dons provenant de l’extérieur. Il faut que nous commencions à créer de la richesse et à vivre selon nos moyens. Et que nous puissions, dans cette création de richesse et sa distribution, nous baser sur des valeurs d’équité. Quand on n’est pas équitable dans la distribution de richesse, on ne peut aller nulle part.

Il faut également que tout le monde soit égal devant la loi. Devant la loi, que le paysan et celui qui est au bureau bénéficient du même traitement équitable.

Vous avez vu le rapport du Bureau du Vérificateur général. Comment un pays, en un temps record, peut avoir à faire face à un manque à gagner de 388 milliards F CFA et on ne voit une seule personne inquiétée ou interrogée. C’est vous dire que tout le monde aspire maintenant au changement. Et dans cette dynamique de changement, les gens sont en train de chercher des personnes dont la valeur intrinsèque pourrait permettre d’amener des projets qui seront exécutés de façon rigoureuse. A même d’amener également un type de projet de société basé sur des valeurs qui nous sont communes, à savoir celles du travail bien fait, d’honnêteté, de justice et de dignité. C’est ça que les gens veulent voir et aspirent à ce que cela revienne dans notre pays et dans nos façons de faire.

Serez-vous candidat à la présidentielle de 2012 ?

Ah ! Oui. Sauf si on m’élimine. Comme il est question de faire passer une nouvelle Constitution. J’ai un grand respect pour les textes fondamentaux. Si la Constitution m’autorise à me présenter, je serai candidat. Et aujourd’hui, tels que non textes sont, je serai candidat.

Avez-vous des rapports avec d’autres formations politiques ?

C’est ce travail qui a commencé depuis le lancement du RpDM. On ne peut pas avoir un programme sérieux pour le développement de ce pays sans faire appel à toutes les forces vives de la nation. Notre objectif étant de rassembler une masse critique de gens qui ont des compétences, les mettre au travail et dialoguer avec les populations qui savent ce qui est bon pour eux. C’est pourquoi nous sommes partis à la rencontre avec d’autres partis pour voir avec lesquels nous partageons des éléments de notre programme et de notre projet de société. Nous sommes un parti de gens convaincus pour une cause finale qui est le développement de notre nation. Et toute personne qui croit en cette mission peut venir travailler avec le RpDM.

Si jamais la conquête du pouvoir nous réussit, je vous garantis une chose : les gens qu’il faut travailleront à la place qu’il faut. Et ces mêmes gens devront rendre compte et être performants. De même que le bien public, dont je serai le gardien, sera respecté.

Il n’y aura pas de manque à gagner ?

Le Bureau du Vérificateur général vient en tout cas de déceler un trou de quelque 388 milliards F CFA de manque à gagner pour le Trésor public.

Il n’y aura pas de manque à gagner quand je serai au pouvoir. Il n’y aura pas de trou dans le tuyau que je mettrai en place. Vous savez l’argent ne disparait pas. Il va dans l’achat de voitures, de maisons, etc. Et ces choses seront récupérées et vendues aux enchères et l’argent obtenu de cette vente sera reversé dans les caisses de l’Etat. Mais je m’empresse de le dire, les gens seront bien payés car je ne suis pas non plus partisan du misérabilisme. Se dire qu’on vit en Afrique et qu’il faut payer les gens à 200 000F CFA, ça sera fini aussi. Les gens doivent être bien payés afin qu’ils donnent en retour les résultats du niveau des salaires qu’ils perçoivent.

On raconte que vous avez déjà financé plusieurs projets aux bénéfices des populations rurales. Peut-on savoir lesquels?

En tant qu’ingénieur, j’ai appris qu’avant de mettre en place un projet, il faudrait d’abord le tester à petite échelle. Cela nous permet de connaître nos erreurs et nos propres limites afin de les régler avant d’aller à grande échelle.

Sur ce plan là, nous avons effectivement commencé à mettre en place des projets principalement dans le domaine de l’agriculture où on est en train de tester certains concepts. C’est ainsi que nous avons un projet dans ce domaine qui permet non seulement de résoudre le problème de la sécurité alimentaire dès la première année de sa mise en œuvre et de mécaniser l’agriculture dans l’ensemble des villages que compte le Mali.

Chaque village aura son tracteur avec lequel les paysans travailleront. Dans ce cas, au lieu que les paysans fassent appel aux propriétaires de tracteurs pour labourer leur champs à 25 000F CFA l’hectare, ils le feront avec leur propre tracteur à 5 000F CFA. Cet argent ira dans leur caisse et permettra d’assurer la maintenance du tracteur et le salaire du conducteur.

Si vous êtes élu président de la République, pensez-vous pouvoir réaliser cet ambitieux programme : un village un tracteur, un village un groupe électrogène ?

Oui, en trois ans cela est réalisable. Nous avons déjà chiffré cet investissement qui revient à 1/10ème du coût de l’Initiative Riz. Avec donc un 1/10ème du coût de l’Initiative Riz, nous pouvons assurer l’autosuffisance alimentaire en assurant la mécanisation de l’agriculture. Il y a également des questions de santé et d’électrification. Dès la deuxième année, chaque village aura un générateur (groupe électrogène, ndlr), en attendant l’arrivée du réseau national, pour la production d’électricité.

Vous savez, on peut réaliser tous ces projets avec tout simplement de la rigueur dans la gestion.

Il y a une crise au niveau de l’enseignement supérieur qui perdure. Que pensez-vous de l’introduction du système LMD (licence-Maîtrise-Doctorat) qui déjà fait couler beaucoup d’encre et de salive?

A mon avis, le système lui-même comme concept n’est pas un problème. Avec notre système, le problème réside dans le fait que ce que nous apprenons à nos enfants n’est pas aligné avec nos besoins. Aujourd’hui, nous avons des besoins d’alimentation, de santé et au niveau de l’énergie. Stratégiquement, il faut que nous puissions guider notre enseignement supérieur vers la production qui est automatiquement utile au développement de ce pays. C’est vrai que tous les domaines sont utiles. Mais je dis que nous devons mettre l’accent sur les domaines qui sont indispensables aujourd’hui au développement de notre pays. Il s’agit, par exemple, d’investir dans la mise en place de laboratoires. Nous n’avons pas besoin de former des étudiants qui sont devant des tableaux des équations. Mais qui, une fois ces équations résolues, ne peuvent pas aller dans un laboratoire pour concevoir une machine qui puisse aider à faire avancer notre programme agricole.

Essayons donc d’être créatifs et d’innover. Parce que nous vivons aujourd’hui à un moment, où seules l’innovation et la créativité sont des valeurs sures. Rien d’autre ne l’est. Les matières premières ne le sont pas. Et nous avons une jeunesse qui brûle d’envie de créer. Il suffit tout simplement qu’on lui ouvre une opportunité.

Aujourd’hui tout le monde sait ce qui ne va pas ; mais personne n’en parle. Au contraire, tout le monde essaie trouver une façon, qui lui convienne, de pouvoir tirer son épingle du jeu. Mais ce sont là de petites épingles que nous tirons du jeu. Au lieu donc de tirer des épingles du jeu, arrêtons tout simplement le jeu et commençons à travailler. Et en ce moment, au lieu d’une épingle, chacun aura une valise remplie d’épingles. Cela est beaucoup plus durable et digne de nous.

Votre mot de la fin…

Le Mali est un grand pays avec un potentiel absolument illimité. Le Mali a des filles et des fils qui aiment ce pays et qui sont de gros travailleurs. Il nous faut maintenant mettre en place une meilleure gestion des fruits de ce travail. De même qu’il nous faut continuer à renforcer cette capacité de travail, du travail bien fait. En faisant également en sorte que les leaders qui sont élus à la tête de l’Etat puissent, eux-mêmes, donner l’exemple, dans ce sens. Car, on dirige toujours par l’exemple et cela que ce soit dans les sociétés privées, des entreprises publiques et même dans sa propre famille a fortiori à la tête de l’Etat.

Je dis donc à tous mes compatriotes que c’est le moment d’avoir un sursaut, un réveil pour que nous puissions, ensemble, nous donner la main tous en tant qu’enfants de ce pays.

Je parle d’un sursaut pour que tous sachent que ce qui nous appartient à tous, c’est le futur, c’est demain. Si nous ne nous concentrions pas sur demain, je vous garantis que nous en payerons les frais. Mais si nous décidons aujourd’hui de nous retourner et de regarder vers l’avenir, avec sérénité et de travailler ensemble, c’est sûr que nous pourrons donner à chaque citoyen de ce pays sa dignité, sa fierté et surtout les moyens pour une vie décente.

Mamadou FOFANA

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