Le président Mohamed Ould Abdel Aziz a effectue depuis mardi un séjour à Bamako. Dans la capitale malienne, il prendra part, ce mercredi 22 septembre, aux festivités commémoratives du Cinquantenaire de l’indépendance de ce pays voisin. Mais au-delà de ce geste, la visite, qui intervient en plein guerre mauritanienne, en territoire malien, contre AQMI, cette visite, disions-nous, revêt un intérêt capital en ce sens qu’elle marque le retour à la normale des relations entre les deux pays qui ont traversé ces derniers mois une forte zone de turbulence.
La libération d’un terroriste par Bamako met le feu aux poudres
La brouille date de février dernier avec le rappel de l’ambassadeur mauritanien à Bamako suite à la libération par les autorités maliennes d’un présumé terroriste mauritanien pour favoriser la mise en liberté du français Pierre Camatte pris en otage par des éléments d’Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI).
Ce terroriste mauritanien du nom de Beiba Ould Nafa faisait partie de quatre présumés islamistes (deux Algériens et un Burkinabé), jugés et condamnés à 9 mois de prison pour «port illégal d’armes».
La Mauritanie qui accusé ce concitoyen d’activités terroristes et d’appartenance à la branche d’Al-Qaïda au Maghreb islamique, avait réclamé avec insistance son extradition auprès du gouvernement malien, mais sans succès.
L’Algérie avait d’ailleurs présenté la même requête auprès de Bamako pour ses deux ressortissants, là non plus sans réponse favorable.
Lors de la libération des présumés terroristes, le ministère mauritanien des Affaires étrangères et de la Coopération, avait qualifié dans un communiqué, la décision du tribunal de Bamako de «mesure surprenante, la deuxième du genre suivant laquelle les autorités maliennes remettent un citoyen mauritanien à une organisation terroriste».
Qualifiant de «controversées» les circonstances dans lesquelles a eu lieu la mesure de libération des terroristes, la Mauritanie avait estimé qu’elle est «préjudiciable» aux relations entre les deux pays dans les domaines de coopération judiciaire et de la coordination sécuritaire.
C’est à ce titre que l’ambassadeur de Mauritanie au Mali avait été rappelé à Nouakchott pour «consultation». Pour les observateurs avisés, la condamnation desdits terroristes à des peines légères pour «port illégal d’armes» serait le résultat des pressions de la France pour sauver la vie de l’otage Pierre Camatte, qui était détenu au Nord-Mali par Al-Qaïda au Maghreb islamique, qui conditionnait sa libération à celle de ses membres détenus à Bamako.
Les deux pays se tournent le dos pendant de longs mois
La Mauritanie s’était ainsi beaucoup fâché contre son voisin de l’Est.
Et en mars dernier, le ministre malien des Affaires étrangères, M. Moctar Ouane, avait effectué une visite-éclair à Nouakchott où il a rencontré le président Mohamed Ould Abdel Aziz, une visite qui avait été totalement occultée par les médias officiels.
Peu après, les participants à la 2ème session du Conseil économique, social et culturel (CESC) de la Communauté des Etats sahélo-sahariens (Cen-Sad), qui se tenait à Bamako avaient dans leurs recommandations invité le Mali et la Mauritanie à garder leurs relations de bon voisinage. Cela figurait en bonne place dans la résolution finale.
Cette résolution faisait suite à l’appel lancé au Mali et à la Mauritanie par le président du CESC de la Cen-Sad, Moussa Balla Coulibaly «pour qu’ils dépassent les conjonctures actuelles parce que ce sont deux pays frères que tout lie, l’histoire, la géographie… Monsieur le secrétaire général de la Cen-Sad, avait dit Moussa Balla Coulibaly, je crois que nous ne pouvons avoir meilleur porteur de ce message que vous-même».
Mais avec le temps, les choses sont finalement rentrées dans l’ordre et la visite il y a quelques jours à Nouakchott du ministre malien de l’Intégration Africaine, et de Maliens à l’étranger, Mr Badra Aliou Makalo a montré que les nuages se sont apparemment dissipés.
En effet, au cours de cette visite, le ministre malien avait remis un message du chef de l’Etat malien Monsieur Amadou Toumani Touré au Président de la République Monsieur Mohamed Ould Abdel Aziz.
Le message était accompagné d’une invitation à Ould Abdel Aziz pour participer à la commémoration du cinquantenaire de l’indépendance du Mali.
Cette visite du président Aziz intervient au moment où l’armée mauritanienne entreprend de nouvelles opérations contre Al Qaeda au Maghreb Islamique (AQMI), sur le territoire malien, «avec l’assentiment des autorités de Bamako», précise, cependant, un communiqué du ministère mauritanien de la défense.
Cette opération militaire a pris de l’envergure depuis vendredi, l’armée mauritanienne faisant intervenir un avion dimanche dans le nord du Mali pour cibler des unités Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi), au lendemain de combats meurtriers avec Aqmi dans cette zone, mais on parle de bavure avec la mort de deux civils au cours de cette offensive.
Dans une conférence de presse tenue dimanche à Nouakchott, le président du parti au pouvoir, Mohamed Mahmoud Ould Mohamed Lemine a appelé tous les Mauritaniens à soutenir leur armée, engagée dans «une guerre sainte contre les terroristes».
Quoi qu’il en soit, la visite du président au Mali, elle, scellera pour de bon la réconciliation entre les deux pays et enterrera définitivement la hache de guerre.
Par : Bakari Guèye Correspondant permanent à Nouakchott Mauritanie
lakoom-info.com 24 septembre 2010