Rebattant complètement les cartes après trois années de guerre, Donald Trump a convenu avec Vladimir Poutine de lancer des négociations « immédiates » sur l’Ukraine, et promis une rencontre en personne avec son homologue russe.
« Il viendra ici, et j’irai là-bas, et nous nous verrons probablement en Arabie saoudite la première fois », a-t-il affirmé lors d’un échange avec des journalistes à la Maison-Blanche, sans donner de date, en prévoyant aussi un cessez-le-feu « dans un futur pas si lointain » en Ukraine.
Donald Trump a par ailleurs jugé qu’une adhésion de l’Ukraine à l’OTAN, voulue par Kiev mais absolument rejetée par Moscou, ne serait « pas réaliste ».
Il a également dit qu’il « faudrait des élections à un moment ou un autre » en Ukraine.
Sans la loi martiale, en place depuis février 2022 et qui empêche la tenue de ce scrutin, l’élection présidentielle dans le pays aurait dû avoir lieu en mars 2024.
Une heure et demie
La Russie et les États-Unis vont commencer « immédiatement » à négocier en vue de mettre fin au conflit, a affirmé le président américain sur son réseau Truth Social, en vantant une conversation « très productive » avec son homologue russe.
De son côté, Vladimir Poutine a dit à Donald Trump vouloir trouver une « solution de long terme » au conflit ukrainien grâce à des « pourparlers de paix », a annoncé le Kremlin, parlant d’un appel téléphonique de près d’une heure et demie.
Dans la foulée, le président américain a informé son homologue ukrainien, Volodymyr Zelensky.
Cette chronologie — Vladimir Poutine d’abord, Volodymyr Zelensky ensuite — souligne la rupture, dans le ton et sur le fond, avec la politique de soutien à l’Ukraine de l’ancien président Joe Biden.
Le démocrate, qui a fait des États-Unis le premier appui militaire de Kiev tout en orchestrant la réponse occidentale à l’invasion russe de février 2022, n’avait de cesse de dénoncer « l’agression » de la Russie, une terminologie totalement absente dans les déclarations de son successeur républicain.
« La conversation s’est très bien passée. [Volodymyr Zelensky], comme le président Poutine, veut faire la PAIX », a écrit Donald Trump dans une autre publication, ajoutant que le président ukrainien échangerait vendredi à Munich, en Allemagne, avec son vice-président, J.D. Vance, et le secrétaire d’État, Marco Rubio.
Pour sa part, le chef d’État ukrainien a souligné qu’ils avaient « longuement parlé des possibilités de parvenir à la paix ».
Les chefs de la diplomatie espagnole, allemande et française ont affirmé mercredi à Paris qu’aucune décision sur l’Ukraine ne pouvait se prendre « sans Kiev » et sans la participation des Européens.
Travailler ensemble
« Nous voulons mettre fin aux millions de morts liées à la guerre Russie/Ukraine. Le président Poutine a même utilisé mon très percutant slogan de campagne : “BON SENS”. Nous y croyons tous deux très fortement », s’est-il félicité, en rapportant ce premier échange avec le président russe depuis son retour au pouvoir le 20 janvier.
Barack Obama est le dernier président à s’être rendu sur le sol russe, en 2013, pour participer au G20 de Saint-Pétersbourg.
La dernière rencontre entre Donald Trump et Vladimir Poutine, particulièrement mémorable, avait eu lieu à Helsinki en Finlande en 2018.
L’appel téléphonique survient au lendemain de la libération par la Russie d’un Américain, Marc Fogel, condamné pour possession de drogue. En retour, les États-Unis ont accepté de libérer le Russe Alexander Vinnik, condamné pour des délits liés aux cryptomonnaies.
Mercredi, Washington a aussi annoncé la libération de trois personnes « détenues » en Biélorussie, dont une de nationalité américaine.
À Bruxelles où il a participé à une réunion de ses homologues de l’OTAN, le ministre américain de la Défense avait déjà abattu les cartes de Washington.
Dans le même temps, le secrétaire américain à la Défense a déjà clairement tracé les lignes rouges de Washington sur l’OTAN et l’Ukraine, lors d’un déplacement à Bruxelles mercredi, où il a participé à une réunion de ses homologues de l’Alliance atlantique.
Pete Hegseth a en particulier jugé « irréaliste » un retour de l’Ukraine à ses frontières d’avant 2014, c’est-à-dire comprenant la Crimée.
Les pays européens devront à l’avenir assurer l’« écrasante » part de l’aide civile et militaire à l’Ukraine, a-t-il encore lancé, en assurant par ailleurs que si des troupes de maintien de la paix étaient déployées à un certain moment, cela ne pourra pas être fait sous l’égide de l’OTAN.
« Pourquoi le gouvernement Trump fait-il des cadeaux à Poutine — des territoires ukrainiens et le refus d’une adhésion à l’OTAN — avant même de commencer à négocier ? J’ai négocié avec les Russes. Il ne faut jamais leur donner quelque chose gratuitement », a critiqué sur X Michael McFaul, ambassadeur américain en Russie entre 2012 et 2014.
Source: https://www.ledevoir.com/