Tollé en Algérie après des propos de Macron, la France accusée d’«ingérence»

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Dans un entretien publié vendredi par l’hebdomadaire Jeune Afrique, Emmanuel Macron a salué le «courage» d’Abdelmadjid Tebboune et promis de «faire tout [son] possible pour l’aider» dans la «période de transition» que vit le pays. Des propos qui ont été vivement critiqués dans les rangs de l’opposition.

L’engagement d’Emmanuel Macron de «tout faire» pour aider son homologue Abdelmadjid Tebboune «afin que la transition réussisse en Algérie» a été vivement critiqué dans les rangs de l’opposition, qui l’a perçu comme une «ingérence» dans les affaires du pays.

«Macron se croit autorisé à distribuer des certificats de légitimité aux dirigeants des indigènes que nous sommes», a condamné le Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD), un des principaux partis de l’opposition laïque.

Dans un entretien publié vendredi par l’hebdomadaire Jeune Afrique, M.Macron a salué le «courage» de M.Tebboune, hospitalisé en Allemagne après avoir contracté le nouveau coronavirus, et promis de «faire tout [son] possible pour l’aider» dans la «période de transition» que vit le pays.

«Dans le cas de l’Algérie, il s’autorise à délivrer une attestation de confiance au chef de l’État […]. Ceci n’est pas une simple ingérence mais la révélation que la France est aux manettes d’une feuille de route pour notre pays», a accusé le RCD dans un communiqué publié dimanche, premier jour de la semaine à Alger.

De son côté, Karim Tebbou, figure du mouvement de contestation antirégime Hirak, cité par le quotidien francophone El Watan, a qualifié la France officielle de «raciste».

«Une France qui ne veut pas accepter que dans ce pays puissent émerger des forces démocratiques, une jeunesse émancipée», a jugé M.Tebbou, détenu pendant neuf mois avant une libération conditionnelle le 2 juillet. Il doit à nouveau passer en jugement fin novembre pour «atteinte au moral de l’armée».

Né d’un immense ras-le-bol des Algériens en février 2019, le Hirak réclame un profond changement du «système» politique en place depuis l’indépendance en 1962. Il ne croit pas à la «transition» actuellement menée.

Principal parti islamiste, le Mouvement de la société pour la paix (MSP) a de son côté fustigé une France en «recul» sur la scène internationale, qui n’«éprouve aucune gêne à renouer avec ses vieilles habitudes de s’ingérer dans les affaires internes de ses anciennes colonies».

La presse elle-même se montre sévère

Le quotidien arabophone Echourouk estime aussi que les propos de M.Macron ont relancé «la polémique sur les ingérences de la France».

Paris «pèse, et lourdement, dans l’espace régional dont fait partie l’Algérie […]. Parfois, cette influence va jusqu’à confondre coopération et ingérence», écrit le quotidien francophone Liberté, proche de l’opposition.

«Aujourd’hui, il nous délivre un pur extrait de la pensée néocoloniale», déplore le chroniqueur de Liberté, Mustapha Hammouche.

Le journal arabophone El Khabar s’interroge à nouveau pour savoir si l’Algérie va accepter une «réconciliation» sans des excuses préalables pour les crimes commis durant la colonisation, les déclarations de M.Macron ayant «aggravé la confusion» sur la question mémorielle.

En affirmant que «la France a fait énormément de gestes» et que l’important est de «mener un travail historique et réconcilier les mémoires» plutôt que de «s’excuser», M.Macron a «tracé des limites au processus actuel qu’il a lancé avec son homologue algérien», analyse El Khabar.

Pour Echourouk, Emmanuel «Macron n’a pas tenu ses promesses de candidat, lorsqu’il a affirmé aux Algériens que la France présenterait des excuses pour ses crimes contre l’humanité».

MM. Macron et Tebboune ont désigné chacun un expert, respectivement Benjamin Stora et Abdelmadjid Chikhi, afin de travailler sur la mémoire de la colonisation et de la guerre d’Algérie, dans le but de «favoriser une réconciliation».

M.Stora doit remettre en décembre un rapport sur cette question à M.Macron.

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