Son allégeance à Alassane Ouattara, le 19 avril, était considérée comme un pas dans la bonne direction par ceux qui redoutaient les contradictions internes au sein des anciennes Forces nouvelles désormais au pouvoir à Abidjan. Ce jour-là, IB avait certes mis en avant le rôle joué dans la chute de Gbagbo par son « commando invisible », la milice qu’il dirigeait et qui s’était, dès janvier, infiltré dans les fiefs ouattaristes d’Adjamé et Abobo Il avait également insisté sur la réinsertion de ses « 5000 combattants » dans l’armée de la République.
Mais on retiendra surtout que ce jour il annonçait la fin de sa brouille avec son frère ennemi Guillaume Soro avant de décréter : « la réconciliation et le pardon », avait-il conclu, optimiste. Visiblement à tort car hier mercredi, selon plusieurs sources, une colonne de pickups surmontés de mitrailleuses, a pris d’assaut Abobo, la base abidjanaise du sergent auto bombardé Général. Des tirs à l’arme lourde auraient été échangés dans la journée du mercredi autour du PK18 où IB a sa base.
« IB est fini »
En fin d’après-midi, il y avait peu de doute que les combats tournaient à l’avantage des Frci du Premier ministre Soro et du Président Ouattara. Le Général Gueu, avait dit alors : « il reste une poche de résistance qu’on va tenter de réduire. » Prenant d’assaut le quartier général d’IB, le commandant Chérif Ousmane des Frci a ratissé le quartier et demandé aux éléments du commando invisible de désarmer avant de déclarer aux habitants « IB c’est fini ». Celui-ci avait, en effet, reçu de Ouattara l’ordre de désarmer ses éléments. Une entrevue était prévue à cet effet mardi 25 avril entre les dirigeants des Frci et ceux du Fsid (Forces Spéciales et Impartiales) nouvelle appellation du Commando Invisible.
Les représentants de l’Onuci et de Licorne sollicités étaient là. Mais pas IB qui « est souffrant », selon son représentant. Le « Général trois étoiles » venait d’apprendre que sa demande d’audience avec le président ne pouvait aboutir que s’il partait se mettre à la disposition du Ministre de la Défense qui n’est autre que le Premier ministre Soro. Aka Meyo, l’émissaire d’IB à la réunion est en tout cas chargé de porter ce message à son patron : « le Chef de l’Etat exige qu’il désarme sans conditions et sans délai ». Quelques heures plus tard, IB demande à ses troupes de déposer les armes. « Mais ça ne se fait pas comme ça », dit à l’Afp un de ses lieutenants qui voulait « une semaine pour convaincre les troupes ». Il ne l’aura pas eue.
Ouattara pris en otage par Soro ?
Quelques heures après, l’offensive déclenchée contre le PK18 veut la tête d’un général désormais planqué: Ibrahim Coulibaly alias IB, principal contradicteur de Soro entré en dissidence en 2003, qui s’était illustré dans l’épique bataille d’Abobo où le redoutable officier pro Gbagbo, Dogo Blé avait perdu plus de cent hommes début février. Les pro IB ne s’expliquent pas que le chef de l’Etat qui a même daigné recevoir Paul Yao Ndré ne puisse pas serrer la main d’un libérateur. Alors que le président ivoirien multiplie les signes d’apaisement, -il a reçu le Général Martial Doué ces dernières heures- et que la vie reprend progressivement à Abidjan, Ouattara fait encore face au problème des derniers résistants du clan Gbabgo. Les milices de Yopougon en sont une illustration, même si elles perdent de plus en plus la main. Mais on voit dans les contradictions internes dans le camp « nordiste » une grande menace pour le président ivoirien. Celui-ci a bénéficié du concours de trois factions : les Forces armées des Forces nouvelles (FAFN) de Guillaume Soro, le «Commando invisible dit «IB» et les Frci formées d’arrivages récents proches d’Ado. Gbagbo parti, les analystes pensent que le défi de l’unification de ces trois armées est loin d’être simple. Soro n’aime pas IB qui le lui rend bien et qui l’a accusé plusieurs fois d’être un « usurpateur ». D’où l’interrogation d’un chroniqueur ivoirien connu : « qu’adviendra-t-il si chemin faisant, Soro se brouillait avec son mentor ADO dont il connaît la préférence pour IB ? » Le même chroniqueur rappelle, comme pour l’exorciser, le spectre des « chefs de guerre Charles Taylor et Prince Johnson au début de la guerre du Liberia… encore vivace dans les esprits».
Adam Thiam