DAKAR (AFP) – Le Sénégal attendait mardi les premiers résultats officiels du premier tour de la présidentielle, qui, sauf surprise, devraient confirmer que le chef de l’Etat Abdoulaye Wade, candidat contesté à un troisième mandat à 85 ans, a été mis en ballottage après douze ans de pouvoir.
“Tout est donc encore possible, victoire ou second tour”, a déclaré lundi le président Wade à la presse, en donnant des chiffres partiels qui semblent donner raison à l’opposition, pour qui un second tour de scrutin est “inévitable”.
D’après des résultats portant sur 282 collectivités locales sur 551, soit un peu plus de la moitié, Abdoulaye Wade a assuré être “en tête avec 32,17% et 25,24% pour mon suivant”, qu’il n’a pas nommé, mais que tout indique être son ancien Premier ministre passé dans l’opposition, Macky Sall.
Ingénieur de formation agé de 50 ans, M. Sall est l’ancien homme de confiance du président Wade. Il a été son ministre des Mines (2001-2003), puis de l’Intérieur (2003-2004), son Premier ministre (2004-2007) avant d’être élu président de l’Assemblée nationale. Tombé en disgrâce, il a crée sa formation, l’Alliance pour la République (APR) et se présente pour la première fois à une présidentielle.
“Atmosphère de fin de règne au palais”, a titré mardi le quotidien Walfadjiri, tandis que L’Observateur (opposition) va encore plus loin et évoque un “discours d’adieu”, assurant que “Wade, c’est fini”.
D’autres journaux estiment comme l’As que “le Palais n’a pas dit son dernier mot”, que la déclaration du président – jugée “pondérée” par la presse – était destinée à la communauté internationale et que Wade restait “totalement déterminé à user d’un forcing pour se déclarer vainqueur au premier tour”.
Durant la campagne, Abdoulaye Wade a martelé qu’il était “sûr” de l’emporter dès le premier tour, son entourage évoquant même, avant le scrutin, un score d’environ 53%. En 2007, il l’avait emporté au premier tour avec 55,8%.
“Entendre parler de victoire au premier tour est inadmissible. Cela engendrerait des conséquences graves (…). Il ne faudrait pas bafouer encore la volonté du peuple”, a prévenu Macky Sall.
Le sous-secrétaire d’Etat américain aux Affaires africaines, Johnnie Carson, a également indiqué que “les résultats préliminaires montrent qu’un deuxième tour est très probable”, invitant l’ensemble des acteurs à “respecter l’état de droit et les résultats” quand ils seront proclamés.
“Explorer toutes les possibilités”
Les résultats provisoires officiels devraient être communiqués mardi au niveau départemental et vendredi au niveau national, selon la Commission électorale nationale autonome (Céna).
La date d’un éventuel second tour dépendra de l’examen de possibles recours devant le Conseil constitutionnel, la plus probable étant le 18 mars.
Un second tour pourrait s’avérer difficile pour le président sortant, qui, sauf retournement de situation, n’a plus de réserve de voix.
Il en est conscient et a expliqué lundi que, “dans la perspective d’un second tour”, il allait “explorer toutes les possibilités d’entente avec d’autres forces politiques selon des modalités à convenir ensemble”.
Ses principaux opposants ont, eux, proclamé comme mot d’ordre commun “Tout sauf Wade”, promettant de s’unir derrière le candidat le mieux placé en cas de second tour.
Abdoulaye Wade a été devancé dimanche par un de ses rivaux – un autre de ses ex-Premier ministres, Moustapha Niasse – dans son propre bureau de vote à Dakar où il avait été accueilli par les huées de centaines d’électeurs.
Les électeurs se sont mobilisés dans le calme dimanche après des violences préélectorales qui avaient fait en un mois de 6 à 15 morts selon les sources.
Le climat “serein et apaisé” du scrutin et la “maturité” des Sénégalais ont été salués par l’ONU, Paris, Washington, et la mission d’observation de la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cédéao).
Le taux de participation a tourné autour de 60%, selon un chiffre encore provisoire de la Céna, en baisse par rapport au taux de 70% de la présidentielle de 2007.
M. Wade, élu en 2000 et réélu en 2007, sollicite un nouveau mandat de sept ans, mais sa candidature a été jugée anticonstitutionnelle par ses opposants.
AFP