Ségolène Royal remplace Laurent Fabius à la présidence de la COP21

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Ségolène Royal a annoncé, mercredi 17 février, qu’elle allait prendre la présidence de la COP21 jusqu’au passage de flambeau au Maroc, pays hôte de la prochaine conférence internationale sur le climat, le 7 novembre à Marrakech. La ministre de l’environnement va succéder à Laurent Fabius, qui a confirmé lundi, dans une lettre adressée au président de la République, qu’il renonçait à cumuler les présidences du Conseil constitutionnel et de la COP. L’ex-ministre des affaires étrangères avait suscité une vive polémique sur la compatibilité juridique de ce cumul. Surtout, Ségolène Royal, qui, à l’issue du remaniement, s’est vu attribuer les « relations internationales sur le climat », entend reprendre la « totalité du dossier climatique ».

« Le président de la République m’a proposé hier [mardi] de prendre la présidence de la COP et j’ai accepté, déclare au Monde Ségolène Royal, confirmant des propos qu’elle a tenus sur i-Télé. Je conçois ma présidence comme active, efficace et dans la continuité, puisque j’étais déjà chef de la délégation française pour la COP21. » L’Elysée confirme la nouvelle et François Hollande devait l’évoquer au conseil des ministres mercredi.

Face à la volonté de Laurent Fabius de poursuivre son travail à la tête de la COP21 malgré sa prochaine entrée au Conseil constitutionnel, Mme Royal avait demandé l’arbitrage du chef de l’Etat et une clarification des règles du jeu. « Un débat a lieu actuellement. Peut-être Jean-Louis Debré peut-il donner un avis et dire si les fonctions peuvent être cumulées ou non puisqu’il est l’actuel président du Conseil constitutionnel. J’attends qu’on me dise exactement comment cela va se passer », avait-elle déclaré vendredi 12 février après une réunion des ministres européens de l’environnement à Paris.

Ségolène Royal tient sa revanche sur son vieil adversaire Laurent Fabius. Car malgré son ambition, durant les deux ans de la préparation de la COP21, Mme Royal avait été reléguée à un second rôle dans les débats. Le président de la République lui avait confié « la construction d’une position européenne ambitieuse » et « la mobilisation de la société civile », tandis que M. Fabius assumait « la responsabilité globale de la négociation multilatérale ». Le 12 décembre 2015, au moment où avait été scellé au Bourget le premier accord universel sur le climat, le chef de la diplomatie française avait été salué par la presse internationale comme « le cerveau » de cet accord.

Agir plus vite

Mais beaucoup reste à faire pour transformer le texte de Paris en véritable instrument de lutte contre le réchauffement climatique. « Les trois priorités sont de faire en sorte que l’accord de Paris se concrétise, que les contributions nationales soient effectivement appliquées par les pays et que l’agenda des solutions soit mis en œuvre afin que l’action se poursuive entre aujourd’hui et 2020 », détaille Ségolène Royal.

La nouvelle présidente de la COP21 va copiloter tout au long de l’année des réunions de travail avec le secrétariat de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC), l’instance en charge des négociations multilatérales sur le climat. Laurent Fabius avait défini, avec Ban Ki-moon, le secrétaire général de l’ONU, une série de rendez-vous cruciaux, avant la COP22 de Marrakech.

Elle devra aussi délivrer des messages pour pousser la communauté internationale à intensifier la lutte contre le réchauffement qui affecte la planète. Le traité ne rentrera en vigueur qu’en 2020. Or, il faut agirplus vite et convaincre notamment les 195 Etats membres de la CCNUCC de hausser leur ambition en matière de réduction de leurs émissions de gaz à effet de serre. Le compte n’y est pas pour le moment : si les Etats restaient sur la trajectoire annoncée, la hausse des températures atteindrait 3 °C, beaucoup plus que ce que la planète peut supporter, selon les scientifiques.

Mauvais signaux

La tâche de la nouvelle présidente n’a rien de symbolique. Depuis le 12 décembre 2015, de très mauvais signaux ont été donnés : la suspension par la Cour suprême des Etats-Unis du plan climat de Barack Obama, qui visait à réduire les émissions de gaz à effet de serre liées à la production d’électricité ; les coupes sévères opérées en Australie, l’un des gros pays pollueurs, dans la recherche sur le climat.

« Pendant la conférence de Paris, elle a appris le rôle, observe l’expert pour les questions énergétiques et climatiques Pierre Radanne. Le moment difficile pour elle commence maintenant. Elle va devoirs’impliquer dans le dossier complexe de la répartition [des efforts de réduction des émissions de gaz à effet de serre] entre les Etats de l’Union européenne. » Les pays membres de l’UE avancent pour le moment en ordre dispersé dans ce domaine.

Dès l’élargissement de son portefeuille lors du remaniement, Mme Royal indiquait ses priorités : « La dimension européenne est essentielle, il faut que l’Europe garde un temps d’avance sur l’accord », expliquait-elle, ajoutant qu’« elle voulait clarifier la situation avec les Etats-Unis » après le vote de la Cour suprême américaine.

Organiser la COP22

La difficulté de la tâche sera aussi d’organiser la session de novembre avec une présidence montante qui n’est pas en position de force. En raison du conflit sahraoui, « le Maroc n’est pas membre de l’Union africaine, pointe Pierre Radanne. Cela pose un problème de représentativité pour le continent africain, quelle que soit la qualité de son travail pour la COP22 ».

Enfin, Mme Royal va devoir concilier la charge de la présidence de la COP avec l’achèvement des deux grands chantiers nationaux qu’elle a ouverts. D’une part, la loi sur la transition énergétique pour la croissance verte, promulguée en août 2015, mais dont la plupart des décrets d’application restent encore à prendre. D’autre part, la loi pour la reconquête de la biodiversité, qui reviendra en seconde lecture devant l’Assemblée en mars. Deux dossiers sur lesquels beaucoup reste à faire et qui, à eux seuls, auraient pu suffire à un ministre ordinaire. La ministre de l’environnement a également pris en charge le dossier de l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes, sur lequel elle a diligenté une expertise censée permettre au gouvernement de sortir d’un blocage ancien de plusieurs dizaines d’années.

Le Monde.fr | 17.02.2016 à 09h38

 Par Sophie Landrin, Pierre Le Hir et Simon Roger

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