Soupçons de collision entre des magistrats sénégalais et une société sénégalaise qui réclame près d’un milliard et demi de F Cfa (soient 87 années de location) à la société finlandaise Wartsila West Africa dont les machines fournissent près de 50% de l’électricité du pays.
Ses comptes bancaires bloqués depuis un an, Wärtsila West Africa (WWA) est condamnée à payer la somme de 1.231.200.000 F CFA à la SARL (Résidence les Jardins). Pour la multinationale finlandaise, la décision rendue par des magistrats de la formation spéciale de la Cour d’Appel de Saint-Louis ne laisse aucun doute quant à des soupçons de corruption. Et pour les avocats de Wärtsilä West Africa, ces soupçons ont été confortés par «la mise à l’écart du Président de la Chambre Civile de la Cour d’Appel de Saint-Louis, membre de droit de la Formation Spéciale. Il a été écarté par ses pairs parce qu’il a simplement refusé de tremper dans la corruption. Pape Aliou Sané, un des magistrats qui au regard des énonciations de l’arrêt est censé avoir siégé lors du délibéré, a déclaré lors de son audition par l’Union des Magistrats du Sénégal que « dans ce dossier il n’y a jamais eu de délibéré et que le projet d’arrêt était dans la chemise du dossier au moment de la mise en état ».
Ce même magistrat a déclaré « avoir été abusé par ses deux collègues et que le Premier Président de la Cour d’Appel de Saint-Louis lui a dit que ce dossier est une affaire dans laquelle le Secrétaire Général de la Cour d’Appel (le juge Pape Amadou Sow) est intéressé et qu’ils ont déjà délibéré alors que le dossier était dans sa phase de mise en état». Wärtsilä, par le canal de ses avocats, avait adressé des correspondances au Président de la République, Macky Sall, au Garde des sceaux Ministre de la justice, Me Sidiki Kaba, à l’Inspection générale des affaires judiciaires (IGAJ), à l’Office nationale de lutte contre la corruption (OFNAC) et au premier Président de la Cour Suprême. Les correspondances ont été adressées à ces différentes autorités pour dénoncer les soupçons de corruption des magistrats qui ont eu à gérer ce dossier à Saint-Louis.
Les avocats listent dans les incongruités du jugement le fait qu’à Saint-Louis, l’arrêt rendu sur le siège le 26 Juin 2014 a été soumis à l’enregistrement moins de deux heures après son prononcé, ce qui suppose qu’il était déjà entièrement rédigé. En moins de 24 heures, l’arrêt a été rendu sur le siège, enregistré et délivré à Madame Niang. UNE PREMIERE DANS LES ANNALES JUDICIAIRES DU SENEGAL. Ensuite, contrairement à ce que dit la loi, l’arrêt a été délivré à Madame Niang « à sa demande » et non aux avocats de la SARL « Résidences les Jardins ». UNE AUTRE PREMIERE.
Par ailleurs, il faut noter que suite à une mission de l’Inspection générale des affaires judiciaires (IGAJ), à Saint-Louis, tous les magistrats impliqués dans la gestion de ce dossier ont été mutés. Le Premier Président de la Cour muté au Ministère de la Justice, le Juge Pape Amadou Sow, ancien secrétaire général de la cour d’Appel muté à la Cour d’Appel virtuelle de Ziguinchor et le juge Sané à Dakar.
Après toutes ces péripéties, les avocats de Wartsila ont formé un pourvoi en cassation. Ce qu’ils ne comprennent pas c’est que «la Chambre Civile et Commerciale de la Cour Suprême du Sénégal rejette, par arrêt en date du 06 Mai 2015, le pourvoi en cassation». Ils soupçonnent que les tentacules de cette affaire aient atteint la Cour Suprême.
Par ailleurs, la Sarl « Résidences les Jardins » a entrepris une procédure d’exécution en bloquant les comptes bancaires de la société Wartsila West Africa. Tous les comptes bancaires de Wartsila sont bloqués depuis une année. Et Senelec (Société nationale d’électricité), leur principal client a reçu une saisie d’attribution de créances pour ne pas procéder au règlement de leurs factures. Or Wartsila West Africa fournit aujourd’hui près de 50% de la production énergétique du Sénégal et cette asphyxie financière peut avoir des conséquences lourdes sur ses charges de gestion.
Maimouna MANGARA
Correspondance particulière
Oui, en Afrique, les jugements sentent toujours une émanation douteuse. L’argent sale enfle toujours la toge des magistrats.
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