Patrick Buisson, conseiller de Nicolas Sarkozy, enregistrait à son insu des réunions avec l’ancien président français: l’affaire révélée par des médias laissait mercredi la classe politique abasourdie et menaçait de tourner au scandale d’Etat. “C’est répugnant”, a commenté l’ancien Premier ministre François Fillon.La teneur de ces enregistrements jette une lumière crue sur les jeux d’influence autour de l’ex-président (2007-2012) et leur divulgation risque de compromettre un retour en politique préparé de plus en plus ouvertement par Nicolas Sarkozy.
A l’origine de cette affaire inédite en France, une personnalité sulfureuse et controversée: Patrick Buisson, 64 ans, un historien venu de l’extrême droite. Cette ancienne éminence grise de M. Sarkozy, était déjà accusée d’avoir “droitisé” à l’excès la campagne du président sortant, contribuant, aux yeux des modérés du grand parti de droite UMP, à la défaite de mai 2012 face au socialiste François Hollande. M. Buisson a commis “une forme de viol”, selon Henri Guaino, l’ancienne “plume” de Nicolas Sarkozy, selon lequel celui-ci a le “sentiment d’avoir été trahi”. “C’est quand même une affaire exceptionnellement grave.
On parle d’écoutes qui ont été réalisées sur les plus hautes personnalités de l’Etat”, a souligné la porte-parole du gouvernement de gauche, Najat Vallaud-Belkacem. La ministre socialiste de la Justice Christiane Taubira a dénonçé une atteinte à la “morale publique” et “aux institutions”. Une affaire qui tombe mal pour l’UMP… et Nicolas Sarkozy A 18 jours d’élections municipales dont elle voulait faire le tremplin de sa reconquête, l’affaire tombe mal pour l’UMP, déjà plombée par des soupçons de favoritisme pesant sur son président Jean-François Copé.
Selon M. Guaino, “il y a apparemment des dizaines, des centaines d’heures d’enregistrement”. Ce qui laisse prévoir leur distillation au compte-goutte et fait craindre à un élu de l’UMP “un feuilletonnage” des révélations. D’autant plus que personne pour l’instant n’est en mesure de dire dans quelles mains sont tombés les enregistrements que M. Buisson dit lui avoir été volés. Mercredi, l’hebbdomadaire Le Canard Enchaîné faisait le compte-rendu sur une page d’une réunion pour préparer un remaniement ministériel le 26 février 2011. Il y est question du remplacement du ministre de l’Intérieur Brice Hortefeux.
“Brice dit que le sentiment d’insécurité a régressé, toutes les études montrent que ce n’est pas vrai”, note M. Sarkozy qui faisait de la lutte contre l’insécurité un de ses chevaux de bataille. “En matière d’immigration, Brice est inhibé”, répond M. Buisson. Le site d’informations sur internet Atlantico, réputé proche de l’ancien président, a diffusé quatre extraits mêlant entretiens politiques et privés, dont l’un concerne une conversation à bâtons rompus impliquant la Première dame Carla Bruni-Sarkozy. “Nous avons une maison en location alors qu’on a trois appartements de fonction”, lance M. Sarkozy.
“Ah oui mais ça c’est parce que je t’entretiens”, plaisante son épouse, fille d’un industriel italien et ancienne mannequin. Dans un autre enregistrement, M. Buisson se définit comme “monarchiste” et “royaliste”. L’avocat de M. Buisson, Gilles-William Goldnadel, a reconnu mardi la véracité des enregistrements mais a fait valoir qu’il s’agissait de “documents de travail”. Dans un communiqué diffusé par son avocat, Patrick Buisson se défend, en affirmant qu'”en tant qu’intervenant essentiel de ces réunions”, il “ne pouvait prendre des notes écrites et utilisait ces enregistrements pour préparer la réunion suivante”.
Ces derniers “étaient détruits au fur et à mesure sauf manifestement quelques-uns qui lui ont été dérobés et dont il est fait présentement un usage extravagant et pervers”, affirme-t-il. Selon une bonne source, Nicolas Sarkozy n’aurait pas rompu avec Patrick Buisson après sa défaite électorale, le rencontrant encore en février dernier. M. Buisson est impliqué dans une autre affaire: un juge enquête sur la régularité de contrats conclus sous la présidence de Nicolas Sarkozy, sans appel d’offres, entre l’Elysée et neuf instituts de sondage, dont la société de conseil de M. Buisson, Publifact.
source: 7sur7.be