Résolution de la crise libyenne : L’Union africaine brouille les cartes

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Le panel des Chefs d’Etat africains pour la Libye s’apprête à effectuer un voyage au siège des Nations-Unies à New York. Objectif : présenter un plan africain de sortie de crise et obtenir du Conseil de sécurité la cessation des bombardements de l’OTAN sur les positions militaires libyennes, conformément à la résolution onusienne, adoptée le 17 mars,  sur l’établissement d’une zone d’exclusion aérienne en Libye pour protéger les civils.

Le préalable à cette mission de bons offices, c’est le voyage (le deuxième) que vient d’effectuer Jacob Zuma à Tripoli. Le président sud-africain avait pour mission de faire accepter par le «Guide» libyen, la feuille de route établie par l’Union Africaine (UA). Kadhafi, comme s’y attendaient nombre d’observateurs et ses pairs dirigeants africains et arabes, aurait accepté cette proposition. Mais, verbalement. Kadhafi propose le cessez-le-feu, exige l’arrêt immédiat des bombardements de l’OTAN, et accepte une transition pacifique au cours de laquelle seront organisées des élections générales libres et démocratiques. Bien entendu, l’opposition organisée et retranchée à Benghazi (même si elle commence à gagner certains quartiers de la capitale) refuse et exige le départ de Kadhafi du pouvoir. Il y a une semaine déjà, mercredi et jeudi derniers à Adis Abéba, l’Organisation panafricaine en Sommet extraordinaire s’est largement penchée sur cette crise libyenne. Aux dires du Gabonais Jean Ping, président de la Commission de l’Union Africaine, «seule une solution politique peut apporter une paix durable et satisfaire les aspirations légitimes du peuple libyen à un destin choisi dans la liberté, la démocratie et l’Etat de droit».

L’Union Africaine, comme le démontrent ses initiatives, continue ses manœuvres dilatoires qui vont à contre-courant de la volonté largement exprimée par le peuple libyen de se débarrasser de son dictateur. D’abord, l’Union Africaine n’a jusque-là jamais brillé à accompagner le vent de liberté qui a soufflé sur les pays africains dont la Tunisie, l’Egypte, le Maroc, la Côte d’Ivoire, le Burkina Faso. Au contraire, aux ordres du Syndicat des chefs d’Etat africains, l’Organisation panafricaine, particulièrement sa Commission, a toujours présenté des plans foireux de sortie de crise qui ne tiennent jamais compte de la volonté populaire, même si celle-ci s’exprime publiquement.
Aujourd’hui, il s’agit pour ces Chefs d’Etat d’obtenir un sursis à exécution. Ils entendent faire lever les différentes mesures, en arrêtant les bombardements de l’OTAN et en ralentissant l’offensive de l’opposition afin de permettre à leur protégé et ancien protecteur de se perdre dans la nature. Car, l’homme n’a d’autre issue que la fuite ou la mort. Honni par son peuple, son départ est irréversible et imminent. Il est vrai que tout le monde comprend la réticence des présidents africains à participer à l’hallali. Beaucoup d’entre eux doivent beaucoup au «Guide» et ont tous largement goûté à ses largesses. Certains caressent même l’idée de continuer à bénéficier des investissements réalisés dans leurs pays respectifs. Mais, un fait est là : ils ne peuvent pas et ne doivent pas aimer Kadhafi au détriment du peuple libyen. Si le peuple libyen s’est résolu à prendre les armes après des décennies contre son maître, c’est que celui-ci a largement dépassé les bornes. Et à ce titre, il doit payer. En aucune manière, il ne doit être permis à un Kadhafi de se soustraire à la justice de son pays. Bien entendu, il ne s’agit pas de le faire assassiner comme les Américains ont zigouillé Oussama Ben Laden au Pakistan. Il s’agit juste de le pousser dans ses derniers retranchements et, à défaut de pouvoir faire quelque chose, laisser la Communauté internationale arrêter et juger un homme auquel on reproche les pires atrocités, dont l’extermination de son propre peuple.

Pour en revenir à nos Chef d’Etat qui se plaisent aujourd’hui à jouer aux marieurs, il est temps pour eux d’oublier leurs petits (ou grands) intérêts personnels et particuliers pour penser aux seules aspirations de leurs peuples et de l’amitié entre ceux-ci. En particulier, Amadou Toumani Touré, membre de ce panel et heureux bénéficiaire de la générosité du «Guide», ne doit pas oublier l’accueil glacial dont il fut l’objet à Yamoussoukro lors de l’investiture d’Alassane Dramane Ouattara qui, semble-t-il, ne lui pardonnait pas encore son indécision dans la crise pos-électorale ivoirienne.
Aujourd’hui, il convient pour ATT de choisir son camp, et vite. Et ce camp ne peut être que celui du peuple libyen qui lutte pour la liberté et la démocratie. Le président malien serait mal inspiré de céder à ce qu’il croit être l’opinion publique de son pays, et qui n’est en réalité que les gesticulations et vociférations de quelques groupuscules et individus pas encore repus de la générosité du colonel libyen, et qui encore se font financer quelques mosquées et medersas dont ils détourneront les financements. Au président Touré de comprendre que ces parasites sont largement minoritaires et peu représentatifs du peuple malien qui, lui, aspire plus que tout à tisser des liens d’amitié et solidarité avec tous les autres peuples.
Cheick TANDINA

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