« Monsieur François Mitterrand, venant au Burkina Faso, ce sont ces réalités que nous souhaitons que vous puissiez connaître. C’est cela que nous souhaitons que vous puissiez rapporter en France, et ailleurs. Dans le tumulte des luttes, dans la cacophonie des agressions, il est utile que des témoignages justes, sains et appropriés disent ce qui est. Et en vous choisissant comme interprète et porte-parole, nous voulons également souligner les combats constants qui ont animé votre carrière politique, votre vie tout court. Ces combats-là, nous les connaissons et ils nous inspirent également nous autres du Burkina Faso.
Vous aimez à parler, avec parfois entêtement dans certains milieux réfractaires, du droit des peuples. Vous aimez à parler, avec une lucidité que nous avons appréciée, de la dette. Vous aimez à parler également de la coopération, du Tiers Monde. C’est bien. Lorsque nous avons appris que Monsieur François Mitterrand allait fouler le sol du Burkina Faso, nous nous sommes dit que si le raisonnement nous écartait de l’élégance des propos, le sens du noble combat je veux parler des joutes oratoires saurait nous rapprocher, tant nous apprécions ceux chez qui le discours s’éloigne du négoce, des tractations, des combines et des magouilles.
Au Berri (province française), je crois, votre nom Mitterrand signifie terrain moyen ou peut-être mesureur de grains ? Dans tous les cas : homme de bon sens. Bon sens proche de ces hommes qui sont liés à la terre, la terre qui ne ment jamais. Qu’il s’agisse du grain, qu’il s’agisse du terrain, nous pensons que la constante est que vous resterez vous-même lié au terroir. C’est pourquoi, parlant du droit des peuples, thème qui vous est cher, nous disons que nous avons écouté, apprécié les appels que vous avez lancés et que vous avez répétés après mai 81.
Nous suivons et apprécions aussi chaque jour, les actes comme ils sont posés. La France est engagée avec les autres peuples du monde dans la lutte pour la paix et c’est pourquoi, à l’heure où nous nous rencontrons aujourd’hui, il convient de rappeler que d’autres, ailleurs, ignorent, et pour combien de temps, cette paix.
Il s’agit d’abord des Palestiniens. Les Palestiniens, des hommes et des femmes qui errent de part en part, bohémiens du sionisme. Ces hommes et ces femmes qui sont contraints de chercher refuge, ces hommes et ces femmes pour qui la nuit est une succession de cauchemars et le jour, une avalanche d’obus.
La paix c’est aussi le Nicaragua. Vous-même, dans un de vos discours, disiez avec force le soutien que vous apportiez au Nicaragua contre les minages de son port, contre toutes les actions qui sont dirigées, de l’extérieur, contre les Nicaraguayens. Vous-même, dans vos nombreux entretiens avec le commandant Ortega, avez eu à plaindre ce peuple qui n’en finit pas de souffrir et qui n’en finit pas de subir des actions de barbares qui ne sont pas venus de très loin, parce qu’ils sont Nicaraguayens, mais qui sont fortement appuyés par d’autres. »
Youssouf Sissoko