L’Etat Islamique (EI) est en passe de réussir ce qu’aucun mouvement déclaré « terroriste » n’avait jusque-là réussi avant lui. Il tient tête à une coalition des armées les plus modernes et les plus puissantes au monde avec en tête les Etats Unis. Malgré son lot quotidien de drames et de désastres pour les populations de cette partie du monde, le constat est là, plus inquiétant que jamais.
Le monde est malade. Il est surtout malade du cynisme et de l’hypocrisie des hommes. Partout c’est le sang et les larmes des faibles qui inondent les terres de Syrie, du Nigéria, du Mali, de l’Irak, de Centrafrique, etc.
Ce qui est communément désigner désormais comme la vermine du 21ème siècle, notamment le terrorisme, découlant lui-même du fondamentalisme et du fanatisme religieux, n’est-il pas une conséquence de cette hypocrisie doublée de l’inconséquence des hommes ?
En effet, au gré des intérêts du moment, certains dirigeants des pays qui « gouvernent » le monde, ont cru bon d’emprunter le raccourci de recourir à ce dangereux et volatile outil à double tranchants dans le seul but de nuire à d’autres. Aujourd’hui, le fléau est en passe d’être hors de tout contrôle. Par conséquent, plus personne n’est désormais à l’abri de la pernicieuse et nébuleuse terroriste.
Quant à notre pays, le Mali, il est secoué depuis des années d’une crise sécuritaire aux implications multiples, multiformes et multidimensionnelles résultant de ces mêmes calculs mesquins et machiavéliques, à la limite. Elle a commencé à partir de l’instant où le territoire servait de terreau aux preneurs d’otages, aux narcotrafiquants et autres contrebandiers de tous genres. La suite est connue. Une occupation sans précédent des 2/3 du territoire par des terroristes et des djihadistes nourris et endurcis à la propagande religieuse d’abord et aujourd’hui une menace de partition de fait qui viole tant les résolutions du Conseil de Sécurité des Nations Unies que l’Accord Préliminaire de Ouagadougou, signé le 18 juin 2013 sous l’égide de la communauté internationale.
Du déclenchement de cette énième rébellion à l’ouverture des pourparlers d’Alger 1 et 2, que de péripéties affligeantes et humiliantes les unes les autres. Aujourd’hui, du fait d’une lutte d’intérêts égoïstes entre différents protagonistes, le peuple Malien semble ne plus être maître de son destin. Mais faut-il pour autant désespérer ? L’histoire nous enseigne plutôt à croire le contraire. Pourvu que chacun accepte d’assumer pleinement sa part de responsabilité dans la définition du cadre que nous voulons pour le vivre ensemble commun.
Nul besoin d’être géo stratège ou professeur émérite de science Pour savoir que tout pays, quelle que soit sa puissance ou sa superpuissance, a toujours son “petit” point faible, si infime soit-il. A force de chercher, on finit par le découvrir tôt ou tard, pourvu qu’on en fasse une priorité.
C’est ainsi qu’une fourmi qui pénètre dans l’oreille de l’éléphant provoque généralement la mort de celui-ci. Car, n’ayant d’autre solution pour extraire l’impénitent insecte de là, le pachyderme, à force de courir dans tous les sens et de se cogner la tête, finit par perdre toute ses forces. Totalement épuisé enfin de compte, le plus gros des mammifères terrestres décède dans la plupart des cas.
Les pays sont, en ce sens, à l’image des créatures.
Un adage bien de chez-nous résume de façon éloquente cette réalité. Selon cet anecdote “quelle que soit la beauté, la fortune, la grandeur et ou la puissance d’un individu, il se trouvera toujours, quelqu’un qui dira ne l’avoir jamais connu”. Sinon, l’histoire du continent africain regorge d’épopées de grands guerriers, de rois et de puissants royaumes qui ne sont aujourd’hui que simples vestiges de l’esprit.
Les « puissants » d’aujourd’hui feraient surement œuvre utile en mettant leur fortune, leur intelligence et de leur puissance au service du bien collectif et universel, plutôt que d’en user au profit du mal, de la division et la déstabilisation des autres dans le seul but de leurs intérêts égoïstes. Car, comme le vent, la roue de l’histoire n’arrêtera jamais de tourner. Autrement dit la vérité d’aujourd’hui n’est pas celle d’hier. Elle ne sera forcément pas celle de demain, encore moins celle d’après-demain.
Il est plus que facile de nuire aux intérêts d’autrui dès lors que l’on en fait sa principale raison d’être. C’est un jeu dangereux que tout Etat devrait se garder de s’en servir intempestivement. Car, les peuples sont à l’image de l’individu. En chacun dort une bête sauvage de la pire espèce qui puisse exister. Mais, à chaque instant, l’écrasante majorité d’entre-nous, fait des efforts incommensurables pour maintenir à l’état endormi la bête sauvage qui sommeille en lui.
Tâchons de faire en sorte qu’elle n’ait jamais à se réveiller. Le peuple Malien, jusque-là en tout cas, fait semblant d’assister docilement à la danse macabre que mènent, dans l’ombre des pourparlers de paix d’Alger, tous ces pays qui s’agitent de jour comme de vrais amis, mais la nuit tombée, qui se transforment en vrais instigateurs et catalyseurs de la division de ses fils et filles. Que nul ne s’y trompe ! A force de manigancer dans l’ombre, l’on finit toujours par se mettre à découvert. Malgré tous les mots qui l’attristent et l’accablent actuellement si bien de l’extérieur que de l’intérieur, le peuple Malien reste vigilant et observe de façon imperturbable les jeux d’alliance et de contre alliance qui se nouent sur le dos de sa survie en tant que Nation. La grande marche pacifique organisée par la société civile le 25 septembre dernier dans les rues de Bamako atteste, si besoin, de la capacité de mobilisation et la détermination du peuple Malien à ne rien lâcher sur l’unité et l’intégrité de son territoire.
Autant le riche n’est réellement riche que lorsqu’il côtoie le pauvre et vice –versa et autant l’on toujours besoin de plus faible que soit. L’un n’est quasiment rien sans l’autre. La vie en communauté, le voisinage et les relations entre individus ou Etats, apparaissent à ce titre comme les deux revers de la même pièce de monnaie. Dépendants les uns des autres, quel que soit le niveau de développement auquel peut prétendre l’un et l’autre.
Les « grands » n’ont pas été toujours « grands ». Comme les « petits » n’ont pas été de tous les temps « petits ». L’histoire récente et reculée de notre monde est pleine d’enseignements à ce sujet, dès lors que l’on se réfère à quelques siècles en arrière.
Il nous faut donc cultiver, les uns les autres, le respect mutuel et réciproque dans nos différences. C’est à cette seule condition que notre monde sera meilleur qu’il ne l’est aujourd’hui.
Bréhima SIDIBE