Vendredi 31 août 2018, après sa condamnation en appel à cinq ans de prison, Kalifa Sall a été révoqué de ses fonctions de maire par les autorités sénégalaises. Cette affaire est conçue par les défenseurs des droits de l’homme comme une violation grave desdits droits.
Accusé d’escroquerie sur les deniers publics et usage de faux, Kalifa Sall, un adversaire de taille du président sénégalais, Macky Sall, a été condamné en appel à cinq ans de prison, le jeudi 30 août 2018. Au lendemain de cette condamnation, le maire de Dakar a été révoqué de ses fonctions par les autorités en place. Cette révocation a été perçue comme une décision purement administrative.
Sur les antennes de la RFI, Alioune Tine, un défenseur des droits de l’homme, trouve que cette décision relève d’une campagne présidentielle tendue entre la majorité présidentielle et l’opposition. C’est dans cette optique qu’il précise : « La précipitation avec laquelle cela a été fait a sidéré tout le monde. C’est carrément une liquidation politique de la carrière de quelqu’un qui y a consacré toute sa vie. Il s’agit donc d’une décision grave qui ne peut pas être prise d’une manière aussi rapide, aussi facile et aussi froide ». Il poursuit en ajoutant : « « C’est la première fois, pratiquement depuis que nous sommes engagés dans une transition démocratique, qu’il y a eu la possibilité, pour le président de la République, de révoquer des adversaires politiques, de les éliminer. Ce n’est pas une affaire facile. Je pense que cela ne peut pas ne pas avoir d’impact sur le processus électoral de 2019. L’image d’un Sénégal indépendant, d’un Sénégal pays de référence en matière de droits de l’homme, eh bien cette image est aujourd’hui écornée sur le plan international et sur le plan africain ».
Toutefois, aux dires de la majorité présidentielle, cette affaire n’a rien de politique. C’est dans cette optique que joint par la RFI, le vice-président du groupe Benno Bokk Yakaar, Papa Biram Touré, précise : « Le Sénégal a des institutions qui fonctionnent très bien et cela ne date pas de maintenant. La séparation des pouvoirs est une réalité ici au Sénégal. Maintenant, il faut reconnaître que parmi ces gens cités, il y a des hommes politiques et il y a d’autres personnes peut-être qui seraient dans des lieux de détention pour des fautes similaires ou, en tout cas, pour d’autres fautes qui ne seraient pas politiques et c’est pour cela que vous ne les avez pas entendues. Or, les politiques aujourd’hui au Sénégal se donnent une immunité politique qui ne dit pas son nom. Cela veut dire que le politicien voudrait quand même sortir du lot des Sénégalais – qui sont des justiciables- et, chaque fois que le politique a des problèmes avec la justice, il s’arrange pour dire qu’on l’a condamné pour des raisons politiques, alors que cela n’existe pas et que cela n’a rien à voir ».
Cette situation n’honore nullement la démocratie africaine. Ces pratiques de réduction au silence des opposants politiques sont une pratique néfaste à l’égard de la démocratie.
Fousseni TOGOLA