Le séisme et la menace nucléaire au Japon, la guerre du pétrole des alliés contre la Libye, la situation en Côte d’Ivoire…et aujourd’hui la mort d’Oussama Ben Laden ont définitivement éclipsé la Palestine dans les médias internationaux. Et pourtant, la souffrance de ce peuple martyr ne fait que s’accentuer par le sionisme et le blocus imposé à une population qui broyait déjà du noir. Si les Occidentaux sont prompts à agir en Libye pour "éviter qu’un dictateur n’extermine son peuple", ils font la sourde oreille aux cris de détresse des Palestiniennes et de leurs enfants. Mais, si on regarde l’histoire, l’Occident a trahi la Palestine depuis le jour où les Britanniques se sont retirés en laissant des colons juifs massacrés des familles arabes désarmées.
La question palestinienne n’a pas seulement une considération religieuse à nos yeux. L’enjeu humanitaire est très important parce qu’il s’agit d’une terre sans cesse illégalement occupée au nom du sionisme et dont les populations n’ont même pas le droit à un approvisionnement correct en produits alimentaires. "Les colonies compliquent considérablement l’existence de la population palestinienne. Et ce, à de nombreux égards. Environ 600 colons sont implantés dans la vielle ville d’Hébron où ils vivent en étroite proximité avec quelque 30 000 Palestiniens. Les autorités israéliennes imposent des mesures de sécurité très strictes. Elles ont notamment établi des points de contrôle dans cette partie de la ville, entre autres, au Caveau des patriarches, un important lieu de pèlerinage que se partagent juifs et musulmans. Certaines routes sont fermées aux Palestiniens qui ne sont pas autorisés à se rendre chez eux en voiture. Les restrictions de mouvement, ajoutées à la violence récurrente des colons, rendent le quotidien des Palestiniens très difficile", témoignait récemment Matteo Benatti, chef de la sous-délégation du Cicr à Hébron. Pour donc s’approvisionner en nourriture, des centaines de familles palestiniennes doivent ainsi franchir des points de contrôle où elles subissent fréquemment des actes d’intimidation et d’autres formes d’exaction de la part des colons. Les femmes sont tout particulièrement vulnérables à cette forme de harcèlement, d’autant plus que les Palestiniens n’ont pas le droit d’utiliser leurs voitures sur beaucoup de ces parcours. Ce qui oblige les femmes à passer les points de contrôle à pied. En raison des fermetures de routes, des personnes âgées se voient obligées de porter des sacs remplis de provisions sur de très longues distances. Sans compter qu’il arrive aussi que des ambulances emmenant en urgence des patients palestiniens vers des hôpitaux soient longuement retenues aux "check points". Les familles sont ainsi parfois obligées de transporter leurs proches malades sur des civières, ou d’avoir recours à des ânes pour les amener jusqu’à un endroit où les attend une ambulance. Et cela depuis quelques années à cause d’un blocus inhumain imposé aux territoires occupés dans l’indifférence générale de la communauté internationale.
Une économie effondrée dans la précarité
Selon de nombreux témoignages, les restrictions de mouvement et la violence des colons sont quasiment venues à bout de la vie économique de beaucoup de villes palestiniennes. Certains commerçants ont même reçu l’ordre de l’armée de fermer boutique. D’autres ont perdu leurs clients, car les Palestiniens redoutent de s’approcher de trop près des colonies juives. Ce qui fait que la pauvreté y est galopante.
Selon une étude menée par le Cicr (été 2008) auprès des foyers habitant la zone soumise aux restrictions, 86 % des familles vivent dans des conditions de pauvreté relative, ne disposant que de 97 dollars Us par personne et par mois pour se nourrir, s’habiller et subvenir à d’autres frais de subsistance. Et ceux qui ont été contraints à l’exil depuis bientôt un siècle, ne vivent pas mieux. Ainsi, au Liban, les 250.000 à 270.000 réfugiés palestiniens sont privés de tous les droits humains. Parqués, parfois depuis 62 ans, dans des camps (Chatila et Rashidieh) aux réalités très contrastées. Et pourtant, il faut s’attendre à tout sauf voire les dirigeants israéliens interpellés pour "Crime contre l’humanité". Les résolutions des Nations unies se suivent et se ressemblent en inefficacité. Les pays dits "Puissants" (???) ne sont en mesure de prendre aucune mesure coercitive contre Israël de crainte d’être la cible du lobby juif très puissant en occident. On se souvient par exemple que, en novembre 2003, l’Assemblée générale des Nations unies avait demandé à la Cour internationale de Justice de rendre d’urgence un avis consultatif sur les conséquences de l’édification du mur séparant la Cisjordanie d’Israël. Au regard du droit international. "L’édification du mur qu’Israël, puissance occupante, est en train de construire dans le territoire palestinien occupé, y compris à l’intérieur et sur le pourtour de Jérusalem-Est, et le régime qui lui est associé, sont contraires au droit international", avait souligné la Cour dans un verdict rendu le 9 juillet 2004. "Israël est dans l’obligation de réparer tous les dommages causés par la construction du mur dans le territoire palestinien occupé, y compris à l’intérieur et sur le pourtour de Jérusalem-Est", avait-elle précisé. Jusqu’à la date d’aujourd’hui, cette décision n’a été suivie d’aucun effet. Mieux, l’embargo auquel est soumise la Palestine ne fait que se renforcer avec tout ce que cela peut causer comme drames et tragédies humains. En fait, les pays occidentaux ont trahi la Palestine depuis le jour où la Grande Bretagne a tourné dos aux Palestiniens en train d’être massacrés par les colons juifs.
Un plan de partage discriminatoire
L’histoire de cette terre martyre abandonnée de tous, y compris par leurs frères arabes, est ainsi faite. Dès la fin du XIX siècle, alors que les Etats européens connaissent la montée du nationalisme et, parallèlement, de l’antisémitisme, le mouvement sioniste apparaît dans les communautés juives d’Europe. Il s’agissait alors de créer un "Etat des Juifs" en Palestine, un Etat laïc à l’origine. Minoritaire au départ, ce mouvement va prendre une ampleur inimaginable avec, peu à peu, l’achat sur place des terres négociées avec le Royaume-Uni qui a administré la Palestine à partir de 1922. Après la seconde guerre mondiale, c’est ce vaste mouvement sioniste qui a abouti à la création d’Israël. En effet, en février 1947, alors que l’idée d’un Etat-refuge en Terre sainte pour les rescapés de la Shoah s’impose dans l’opinion occidentale, le gouvernement britannique remet le mandat qu’il détenait depuis 1920 sur la Palestine aux Nations unies. Et le 29 novembre 1947, les Nations unies adoptent la résolution 181 prévoyant le partage de la Palestine en un Etat juif et un Etat arabe.
Ce plan de partage était à la fois mal conçu et très injuste puisqu’il donnait aux Juifs, qui représentaient en 1947 un tiers de la population du pays, 55% du territoire, dont une grande partie des terres les plus fertiles. Le lendemain du vote, la guerre civile éclata entre les communautés juive et arabe palestiniennes victimes d’une répression féroce au lendemain du retrait des soldats britanniques le 15 mai 1948. C’est ce jour que le Conseil national juif, avec à sa tête Ben Gourion, proclama unilatéralement l’indépendance de l’Etat d’Israël. Depuis 1948, du fait de ce partage, les Palestiniens sont permanemment victimes d’un impitoyable nettoyage ethnique accompagné de massacres et d’une déportation massive.
L’exil forcé ou l’extermination
Ils ont été victimes, dans l’indifférence totale de la communauté internationale, de plusieurs massacres dont le plus connu à Deir Yassin (9 avril 1948) au cours duquel 254 arabes (hommes, femmes et enfants) ont été froidement exécutés. Au moins quatre autres massacres ont été recensés. La terreur provoquée par ces tueries parmi la population palestinienne a été telle qu’au terme de la réalisation du plan de partage validé par les Nations unies, 531 villages avaient été détruits et près de 800 000 Palestiniens s’étaient enfuis ou avaient été expulsés par la force. Aujourd’hui, 4 millions de réfugiés palestiniens vivent encore dans 59 camps en Cisjordanie, à Gaza et dans les pays arabes environnants. Tous ont gardé, au fond de leurs cœurs, l’espoir d’un retour dans leur village d’origine, conservant précieusement les papiers, les souvenirs qui seuls leur restent et même la clef de leur ancienne maison transmise de génération en génération. Maintenant, comme l’écrivait un confrère, c’est une autre "Nakba" ("catastrophe" qu’a constitué pour les Palestiniens la fondation de l’Etat d’Israël) qui menace le million et demi de Palestiniens qui résident dans la bande de Gaza. Du blocus israélien et des attaques quotidiennes de son armée résulte un véritable désastre humanitaire sous le regard indifférent d’un Occident anesthésié par la supposée "guerre au terrorisme" et la sujétion aux Etats-Unis. A son élection, Barack Obama avait mis une courageuse pression sur les dirigeants israéliens suscitant un immense espoir de la fin de l’occupation et la naissance d’un Etat palestinien. Hélas, il a vite lâché prise pour ne pas se mettre le puissant lobby juif sur le dos et compromettre ainsi son ambition de briguer un second mandat. Et aujourd’hui, on étale le tapis rouge devant l’extrémiste Benjamin Netanyahu qui est le grand fossoyeur de tous les efforts de paix et de réconciliation entre juifs et arabes.
L’Onu pourra-t-il un jour réparer sa terrible erreur de 1948 et faire en sorte que les Palestiniens puissent un jour, comme tous les peuples du monde, vivre en paix dans le pays de leurs ancêtres ? Rien n’est moins sûr à l’état actuel des forces entre la Palestine et Israël, et notamment entre les puissances impérialistes et le lobby juif qui détiennent les médias et les secteurs névralgiques de leurs économies. Ce qui lui donne une influence politique non négligeable, mais le plus souvent surestimée par manque de courage des dirigeants occidentaux. Mais, les activistes de ce lobby et leurs acolytes doivent toujours avoir à l’esprit qu’un Etat né dans la cruauté et la violence à l’égard de ses voisins ne pourra jamais prospérer !
Kader Toé