Le nord du Burkina, zone d’action d’Ansarul Islam

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Des soldats burkinabè marchent dans une rue à Ouagadougou, Burkina Faso, le 17 janvier 2016.

La récente attaque de commissariats dans le nord du Burkina, après un raid sans précédent en décembre contre l’armée burkinabè (12 soldats tués), illustre la dégradation de la situation sécuritaire dans la province du Soum, le long de la frontière malienne.

Les attaques de lundi à Tongomayel et Baraboulé et celle de décembre à Nassoumbou – le raid le plus meurtrier jamais mené contre l’armée – ont été revendiquées par le groupe Ansarul Islam, inconnu jusque-là.

Son chef est Malaam Ibrahim Dicko. Homme le plus recherché du pays, ce prêcheur radical originaire de Djibo, chef-lieu du Soum, à moins de 300 km au nord de Ouagadougou, se présente comme le “commandeur des croyants” d’Ansarul Islam.

Dans son communiqué de revendication de décembre, Malaam utilise un vocabulaire propre aux groupes jihadistes qualifiant les troupes burkinabè de “croisés” et ses combattants tués de “martyrs”. Il promet que “cette attaque ne sera pas la dernière (…) La bataille se poursuivra jusqu’à ce que nos terres soient régies par la loi d’Allah”.

Il est difficile d’estimer la taille et la puissance du groupe. Mais, selon plusieurs observateurs des activités jihadistes, Ansarul Islam comprendrait moins d’une centaine d’hommes. Selon des sources sécuritaires burkinabé, le groupe de Malaam a été “assez réduit” “au gré des arrestations et des feux combinés des armées burkinabè et malienne.

Ses sources de financement sont inconnues, mais une source sécuritaire n’exclut pas que l’argent puisse venir “des groupes jihadistes maliens avec lesquels Malaam est ami et des trafics de drogues et de cigarettes”.

Les populations délaissées

Les populations du nord, d’ethnie peul dans un pays majoritairement mossi, ont souvent l’impression d’être délaissées par le pouvoir central de Ouagadougou.

“Les gens comme Malaam profitent des frustrations. Des communautés se sentent marginalisées”, commente une source sécuritaire

De plus, l’insécurité a aggravé les problèmes économiques avec des marchés tournant parfois au ralenti. Si beaucoup d’habitants rejettent les groupes – l’islam soufiste pratiquée au Burkina étant tolérant -certains adoptent une neutralité bienveillante à l’égard des jihadistes.

Dans le Soum, la collaboration avec les forces de sécurité n’est pas sans conséquence. Au moins six personnes dont plusieurs conseillers municipaux, soupçonnés d’être des “informateurs”, ont été tués ou blessées par des individus non identifiés. Les hommes de Malaam sont soupçonnés d’en être les auteurs. Les forces de sécurité pensent aussi que les hommes armés qui ont menacé des enseignants dans deux écoles près de Djibo fin janvier faisaient partie d’Ansarul Islam. Ils exigeaient qu’on arrête d’enseigner le français pour lui préférer le Coran et l’arabe.

Les jihadistes savent aussi jouer sur le levier social. Selon un officier burkinabè, grand connaisseur des questions jihadistes, Malaam Ibrahim Dicko a d’abord créé une association pour la promotion de l’islam dénommée “Association islamique Al-Irchad”. Son but officiel était de “diffuser les préceptes de tolérance et d’amitié de l’Islam”, de “cultiver l’entente et la paix entre les frères musulmans d’une part, et entre les fidèles musulmans et ceux des autres religions d’autre part”. Selon un responsable administratif du Soum, Malaam distribuait de l’argent et était particulièrement à l’écoute des jeunes.

Pourquoi l’armée est-elle à la peine ?

Le nombre de militaires burkinabè déployés dans le nord est tenu secret mais des renforts y ont été envoyés depuis des mois. Mais “c’est une armée désarmée”, souligne un observateur qui rappelle les mutineries qui ont conduit le pouvoir à désarmer la troupe pour n’équiper et n’armer que des unités triées sur le volet.

Résultat: l’armée régulière est sous équipée et sous entraînée. Elle n’est pas rompue au combat alors qu’elle doit affronter des jihadistes déterminés souvent prêts à mourir. Les autorités ont pris conscience du problème et ont entrepris une réforme et demandé des formations à la France et aux Etats-Unis.

“Il y a une réelle volonté du gouvernement de combattre les groupes terroristes”, souligne une source diplomatique occidentale alors que sous le régime de Blaise Compaoré, le pouvoir burkinabè entretenait des liens avec de nombreux groupes et avait été relativement préservé par les attaques.

Enfin, “nous sommes dans un contexte de frontières poreuses. Les groupes passent du Niger au Mali, du Mali au Burkina sans problème alors que ce n’est pas le cas des forces de sécurité”, souligne une source militaire européenne.

Publié: le 1 mars 2017 par voaafrique

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