La ville américaine de Ferguson a connu mardi soir une deuxième nuit agitée après l’exonération par la justice du policier qui a abattu un jeune Noir. Dans le reste du pays, d’autres manifestations de soutien à la victime ont éclaté.
La petite ville américaine de Ferguson a connu mardi soir une deuxième nuit agitée en réaction à l’exonération du policier ayant abattu un jeune Noir, tandis que des manifestations spontanées de protestation ont éclaté à travers les Etats-Unis.
“Je suis ici dehors pour soutenir Michael Brown et sa famille et pour voir la justice être rendue!” Michael Jackson, 48 ans, habitant des environs de Ferguson, a fait le déplacement mardi soir dans cette petite ville du Missouri où le jeune Noir de 18 ans Michael Brown, désarmé, a été abattu par un policier blanc, Darren Wilson, le 9 août dernier. Letisha Brooks, 17 ans, dont le lycée était fermé mardi en raison des émeutes de la veille, a quant à elle souligné être dans la rue “pour voir Darren Wilson finir en prison”.
La colère de Barack Obama
Trois fois plus nombreux que la veille, près de 2.200 militaires équipés de matraques et de boucliers ont quadrillé la ville et fait usage de gaz lacrymogènes. De nombreux manifestants ont été interpellés, plaqués au sol et emmenés, selon Matthieu Coache, l’envoyé spécial de BFMTV à Ferguson. De fait, les violences ont été moins nombreuses dans la nuit, et les magasins pillés la veille ont pu être barricadés.
Barack Obama a laissé éclater sa colère contre les casseurs. “Brûler des bâtiments, mettre le feu à des voitures, détruire des biens, mettre des gens en danger: il n’y a aucune excuse pour cela, ce sont des actes criminels”, a tranché le président américain lors d’un discours à Chicago. “Il existe des moyens constructifs d’exprimer ses frustrations”, a poursuivi le chef d’Etat, reconnaissant qu’il existait, au sein de nombreuses communautés, le sentiment tenace que “les lois ne sont pas toujours appliquées de la même manière et de façon équitable”.
Une foule de manifestants blancs à New York
Après trois mois de délibérations, un grand jury a conclu lundi que le policier Darren Wilson avait agi en état de légitime défense en tirant douze coups en direction de Michael Brown, qui l’avait d’abord frappé au visage avant de prendre la fuite. L’avocat de la victime a déploré que “dans toute l’Amérique, à New York, à Los Angeles, en Californie, à Cleveland, les jeunes garçons de couleur sont tués par les policiers”. A Cleveland, justement, dans l’Ohio, des manifestants ont défilé mardi soir pour protester contre la mort d’un garçon noir de 12 ans, tué le week-end dernier par un policier alors qu’il manipulait une arme factice dans la rue avec deux camarades.
A New York, plusieurs manifestants réclamant justice pour Michael Brown ont été interpellés dans la soirée de mardi, a indiqué la police sans donner de chiffre exact. Deux personnes avaient déjà été arrêtées lundi soir. Un groupe de manifestants s’était donné notamment rendez-vous à Union Square avant de commencer à marcher dans les rues en changeant sans cesse de direction pour échapper au contrôle de la police. “La prison pour les policiers meurtriers!”, “Nous demandons justice pour Ferguson”, pouvait-on lire sur leurs pancartes. Selon le correspondant de BFMTV à New York, Jean-Bernard Cadier, la foule, en majorité blanche, dénonçait le racisme mais aussil’ensemble du système judiciaire américain, jugé “coupable”. Des centaines de manifestants sont également descendus dans les rues de Los Angeles, Boston et Philadephie ainsi qu’à Nashville, dans le Tennessee.
Le père du procureur tué par un Noir
Le leader des droits civiques, Al Sharpton, a multiplié mardi les appels au calme. “Ce ne sont pas les cendres des bâtiments en feu de Ferguson qui doivent entretenir la mémoire de Michael Brown”. A ses côtés, l’avocat de la famille du jeune Noir Benjamin Crump a critiqué “un système judiciaire cassé”, dénonçant les “relations de proximité” entre le procureur – dont le père policier a été tué par un Noir – et la police de St Louis, dans le Missouri. Il a pointé des contradictions dans le témoignage du policier, déplorant que ce dernier n’ait subi aucun contre-interrogatoire. Le policier, qui est toujours en congé administratif, n’est cependant pas à l’abri de toute poursuite, même s’il a été innocenté sur le plan pénal. Le ministre de la Justice Eric Holder a rappelé que deux enquêtes fédérales sont en cours et promis des conclusions rapides “pour rétablir la confiance” entre la police et la communauté noire.