Burkina Faso / Marche meeting de l’opposition politique : Une marée humaine pour « l’avertissement du 23 Août »
Dès 7 heures, ils étaient là sur le terrain vague situé à 100 m du rond-point de la patte d’oie sur le boulevard France-Afrique. Animations d’artistes, coups de sifflets jusqu’à 8h30 ou les responsables des partis et formations politiques ont commencé à arriver. A 9h 30, tous les ténors sont là. On s’affaire à « engager les hostilités ». C’est avec l’hymne national, les poings levés, les balais en l’air, ou la main sur la poitrine que les marcheurs se mettent en place après les consignes sécuritaires données par le responsable à l’organisation, Ablassé Ouédraogo.
9h 50 minutes, début effectif de la marche. Très vite, les rangs se resserrent, et grossissent au fur et à mesure que les marcheurs arpentent le boulevard France-Afrique. La foule est compacte, noire, et s’étend sur des kilomètres. Impossible de voir où commence le cortège, ni où il prend fin. Les slogans sont à la pelle. (« Libérez Kossyam !!!! », « Blaise héiiiiii ! On ne veut pas du référendum !!! » « Non, non et non à la modification de l’article 37 de notre constitution », « Notre Ebola c’est B….. »).
Les pancartes rivalisent de messages. (« Homme fort= parole respectée », « Mon cher Blaise, ne finit pas comme Gbagbo », « Blaise retourne en caserne, pas de pouvoir à vie au Faso »). Le camion qui transporte le chef de file de l’opposition et les présidents des partis et formations politiques de l’opposition avance difficilement. Il est encadré par les bénévoles constitués en service d’ordre du Chef de file de l’opposition (CFOP). C’est dans cette ambiance, dans le calme et la discipline que les marcheurs ont parcouru les 8km 400 allant du Terrain vague situé à environ 100 mètres du Rond-Point de la Patte d’Oie- Route Ouaga 2000, jusqu’à la station PETROFA -Route Lycée des Nations et Universalis–Route Savane FM–Route Marché de Pag-layiri pour regagner le point de ralliement, deux heures après.
Les langues se délient
Chaque marcheur tenait à dire quelque chose pendant le trajet dès qu’un journaliste tendait son micro. « N’écrivez pas beaucoup, montrez juste les images, ça suffira, les faits sont têtus », nous lancera un manifestant. Un autre, la voix enrouée, nous confie ceci, « Je suis venu dire au président du Faso que nous n’avons pas besoin d’hommes forts. Les hommes forts, ce sont ceux qui prennent les armes contre leur peuple, ceux qui détournent les biens publics pour leur familles et amis. A notre siècle, nous avons besoin de grands hommes, comme Thomas Sankara, Nelson Mandela, Patrice Lumumba. Qu’il nous respecte et nous écoute. Sinon le peuple est débout et déterminé ».
Celui-là dit être venu de Dori avec une centaine d’autres jeunes, à l’appel du président de son parti, Arba Diallo. Il appelle la jeunesse à prendre ses responsabilités. « 27 ans, c’est trop ! Il ne faudra pas qu’il gâche ce qu’il a fait ! On n’a pas pris de l’argent pour marcher, contrairement à d’autres », lâchera un autre. « Il n’est ni architecte, encore moins contremaitre, qu’il laisse les chantiers, nous allons les achever », tranche cet autre marcheur.
« Quand le peuple se met debout, les hommes forts tremblent »
Un seul speech a lieu après la marche, contrairement aux meetings précédents, et c’est bien entendu le chef de file de l’opposition qui l’a livré. Pendant une dizaine de minutes, Zéphirin Diabré a salué l’engagement des milliers de marcheurs, sortis crier leur raz-le bol. « Quand le peuple se met debout, les hommes forts tremblent. Quand le peuple se met debout, les hommes forts restent des hommes aux pieds d’argile. Quand le peuple se met débout, les hommes forts se cachent » a-t-il dit avant de fustiger ceux qui ont tout fait pour que la marche n’ait pas lieu.
Comme pour dire que tout s’est passé sans problèmes contrairement aux raisons sécuritaires que la municipalité avait avancé pour refuser l’itinéraire demandée, le chef de file de l’opposition a lancé, « nous avons fait 8 km, est-ce qu’il y a eu une seule boutique qui a été cassée ? Est-ce que nous avons volé quelqu’un ? Est-ce qu’il y a eu de la violence ? » a interrogé le chef de file de l’opposition à la foule qui a répondu « Non » en cœur. Alors, il a demandé au maire de laisser le service d’ordre du CFOP assuré l’ordre dans la ville si sa police municipale est incapable de le faire. C’est une preuve de responsabilité que l’opposition a démontrée selon lui.
Cette mobilisation que Zéphoron Diabré a qualifiée d’historique, plus importante que celle du 18 janvier, montre que l’opposition monte en puissance et que son programme politique rencontre l’assentissent du peuple. « Nous espérons que les gens qui sont assis à Kosyam et qui boivent le champagne vont bien écouter, bien entendre et suivre nos conseils. Héiiiii !, on ne touche pas à l’article 37 de la constitution… Nous espérons que l’avertissement du 23 août a été entendu, s’il n’est pas entendu, il y aura d’autre avertissement, plus costauds, plus déterminants, plus engageants » a-t-il poursuivi.
En attendant les prochains mots d’ordres
Le principal animateur du meeting a réaffirmé l’attachement de l’opposition au dialogue et à l’unité nationale, même si sur l’article 37, il n y a pas de compromis possible. « Ceux qui sont en train de mettre en danger la paix sociale et l’unité nationale, sont ceux sont d’en face qui s’entêtent à vouloir organiser un référendum » a martelé Zéphirin Diabré avant de demander aux marcheurs : « Restez dans la discipline et à l’écoute des mots d’ordre qui seront lancés pour les combats à venir ». « Jamais nous n’allons vous trahir, jamais nous ne prendrons des décisions contraires à vos intérêts » a-t-il conclu aux environs de 12h 30. C’est dans le calme et au son de la musique que les milliers de manifestants se sont dispersés.
Tiga Cheick Sawadogo
Photos : Bonaventure Lawasselea Paré
par Lefaso.net
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