Le journaliste ouzbek Muhammad Bekjanov, 62 ans, a été libéré mercredi 22 février 2017 après 18 ans de prison. Cet ancien rédacteur en chef d’un journal d’opposition figurait parmi les journalistes emprisonnés depuis le plus longtemps au monde. Incarcéré en 1999 et soumis à la torture, Muhammad Bekjanov retrouve enfin la liberté.
Il a passé plus de 18 ans derrière les barreaux en Ouzbékistan, ex-république soviétique d’Asie centrale. « J’ai été libéré de la colonie pénitentiaire il y a une demi-heure », a déclaré Mouhammad Bekjanov, mercredi soir, à la Radio Free Europe. « Je vais bien, je suis juste un peu fatigué. Mes cheveux sont devenus entièrement blancs en 18 ans. »
Mouhammad Bekjanov était directeur de publication du quotidien d’opposition ouzbek Erk. Il écrivait des articles critiques au sujet du gouvernement d’Islam Karimov, resté président du pays après l’indépendance de 1991, jusqu’à sa mort en septembre 2016. Après une série d’attentats à Tachkent, en 1999, le journaliste avait été condamné à 15 ans de prison pour complicité lors d’un procès décrié.
Johann Bihr, responsable du bureau Europe de l’Est et Asie centrale à Reporters sans frontières (RSF), salue cet épilogue : « On est évidemment extrêmement soulagés et très, très heureux de la libération de Muhammad Bekjanov, qui est lauréat du prix RSF pour la liberté de la presse en 2013. C’est un des journalistes emprisonnés depuis le plus longtemps au monde, et chaque jour de sa détention était un authentique scandale. »
Il reste du chemin à l’Ouzbékistan pour parvenir à l’ouverture
« Muhammad Bekjanov était exilé en Ukraine lorsqu’il a été kidnappé par les services secrets ouzbeks en 1999 à Kiev, et emmené de force à Tachkent pour y être jugé. Il a été soumis à la torture de manière extrêmement cruelle et répétée. Il a été atteint de tuberculose, il a une hernie, il a perdu une partie de son ouïe du fait des coups et de la tuberculose non traitée », relate Johann Bihr.
En 2012, la peine de M. Bekjanov avait été prolongée de cinq ans. Mais en décembre dernier, l’ancien Premier ministre Chavkat Mirzioïev a été élu président, avec 88,6 % des suffrages. Depuis sa nomination, il a donné quelques signes d’un éventuel assouplissement du régime. Il a notamment gracié un célèbre prisonnier politique.
L’Ouzbékistan « est classé 166e sur 180 dans notre classement mondial de la liberté de la presse », rappelle le responsable de RSF. L’ambassade des Etats-Unis en Ouzbékistan a qualifié la libération de Muhammad Bekjanov de « pas positif de la part du gouvernement d’Ouzbékistan ». Les autorités américaines appellent les autorités ouzbèkes à libérer plus de « journalistes, militants et prisonniers religieux ».
Publié: le 23-02-2017 par rfi.fr