En plus d’être un drame social, la prostitution des mineures en Afrique devient un véritable problème sanitaire et une entrave au développement. L’avenir de nombreuses adolescentes en Afrique est en danger. Beaucoup d’entre elles s’impliquent dans des activités sexuelles prématurées, qui éventuellement posent des menaces non seulement à leur bien-être, mais aussi au développement de leurs communautés par extension. C’est un défi majeur car ce phénomène affaiblit les efforts des gouvernements et des organisations concernées dans leur combat d’assurer un service de santé publique de qualité aux populations. En 2011, le taux d’infection au SIDA est de 48% chez les prostituées de la région de Ziguinchor, 16,4% à Dakar, 37% à Kaolack, 17% à Thiès, 28% à Mbour.
La question au Sénégal est un véritable coup de poing pour la société. Elle passe par plusieurs formes : on observe la prostitution professionnelle pratiquée par des femmes qui y ont dédié leur vie entière et le « mbaraan », type de prostitution souvent pratiqué par des jeunes âgées de 13 à 18 ans. Le « mbaraan », un phénomène en prolifération au Sénégal, voit de plus en plus de jeunes filles pratiquer une quasi-prostitution pour arrondir les fins de mois ou accéder à un mode de vie supérieur. À Dakar en particulier et dans l’ensemble du pays, une catégorie de jeunes filles échangent leurs charmes contre de petites sommes d’argent pour acheter des pacotilles, perruques et vêtements coûteux. Le « mbaraan » consiste aussi à avoir plusieurs partenaires réguliers qui offrent de l’argent et des cadeaux. Aujourd’hui, ce qui est plus grave c’est que les jeunes s’adonnent à des modifications de leur anatomie pour plaire encore plus. Les adolescents utilisent des médicaments pour allonger et grossir leur sexe, chez les garçons. Quant aux filles elles s’injectent du jumbo dans l’anus pour faire gonfler leurs fesses. D’autre part, la multiplication des partenaires favorise évidemment les maladies sexuellement transmissibles (MST) et en particulier le SIDA. C’est le cas notamment en zone rurale où l’usage du préservatif reste marginal.
Dans toutes les régions du monde, les adolescents jouent un rôle très important dans le processus de développement : c’est la force qui fait bouger les économies, ce sont les futurs leaders. Il est donc important que les gouvernements, les institutions et organisations concernées, y compris bien sûr les parents, mettent en place des mesures pour y remédier. Faute de quoi l’Afrique risque de perdre ses mains fortes qui se chargeraient de ses ressources. Les conséquences de la prostitution infantile et des activités sexuelles prématurées (de la part des adolescentes) sont énormes sur la santé publique, le bien-être de la jeunesse et le développement de l’Afrique en général.
Au Sénégal, sur le plan éducatif, cela se traduit par l’abandon scolaire en raison de la grossesse précoce. Les grossesses des adolescentes et le VIH / SIDA touchent notamment des adolescentes en préparation pour l’enseignement supérieur. Sur le plan médical, dans le cas de la grossesse précoce par exemple, il en résulte des complications de santé y compris les incidents élevés de faible poids de naissance, les bébés nés prématurément, dont certains deviennent des déficients mentaux. Il en résulte aussi la transmission de maladies sexuellement transmissibles (MST), y compris le VIH / SIDA à la suite de rapports sexuels non protégés. Sur le plan social, la grossesse chez les adolescentes entraine un taux élevé de tentative d’avortement, le suicide et l’abus de drogues, la prolifération des bâtards avec des avenirs incertains et l’augmentation d’une population caractérisée par un taux de dépendance élevé. En ce qui concerne les infections du VIH / SIDA, les victimes sont stigmatisées ; cette pratique affaiblit la lutte contre la pandémie. Et enfin, sur le plan économique, le taux de chômage des adolescents est à la hausse. Le chômage a un impact négatif sur la migration en Afrique et au Sénégal dans le sens où ces adolescents vivant dans des zones rurales se déplacent vers les villes à la recherche d’emplois non-existants. Cette migration crée des problèmes sanitaires en particulier, ceux qui vagabondent dans les rues des grandes villes mettant ainsi la pression sur les infrastructures sociales et les dépenses du gouvernement.
Les principaux acteurs doivent revoir leurs stratégies de lutte contre la grossesse précoce et travailler de façon plus proche avec les écoles et les médias. Les parents doivent être sensibilisés à leur rôle parental. La pauvreté étant une des principales causes de ce phénomène, les acteurs doivent surtout chercher à éliminer la pauvreté populaire abjecte. Outre ces mesures, les programmes télé doivent être revus de manière à favoriser des images instructives au détriment de films érotiques ou à caractères pornographiques.
Abdoulaye A. Traoré,
Doctorant en sociologie
S’il y avait que le Sénégal
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