La patronne du FMI sauve sa tête

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Kristalina Georgieva conserve la direction du FMI. Elle était accusée d’avoir exercé des pressions en faveur de la Chine quand elle était à la Banque mondiale. Le conseil d’administration estime que les preuves contre elle sont insuffisantes. Il aura fallu 8 réunions du conseil pour clore cette affaire embarrassante pour les institutions internationales.

Le premier actionnaire du FMI, les Etats-Unis, avec 16,5% du capital, et le deuxième, le Japon, ont fini par se rallier aux arguments des pays européens. Ces derniers ont apporté un soutien massif à l’économiste bulgare, qui est issue de leur zone, puisque l’Europe désigne le directeur du Fonds depuis sa création. À leurs côtés, on retrouve la Russie et la Chine. LE pays justement qui pose problème à Washington. À première vue pour l’administration américaine il était hors de question de laisser à la tête du FMI, une organisation qui brasse des centaines de milliards de dollars, une personne soupçonnée de favoritisme pro-chinois. Kristalina Georgieva conserve son poste, mais désormais sous la haute surveillance de Janet Yellen. La secrétaire au Trésor a tenu à donner cette précision à l’issue du conseil d’administration. Elle veut, dit-elle, à tout prix préserver l’intégrité et la crédibilité du FMI.

Le FMI est-il devenu le nouveau champ de bataille de la rivalité entre la Chine et les Etats-Unis ?

Pékin pèse de plus en plus lourd sur le plan économique et exige d’être traité en conséquence dans les institutions internationales. Pour y parvenir tous les moyens sont bons, y compris la menace. Une montée en puissance effrayante pour les Américains mais aussi pour leurs alliés, tous sont encore marqué par le traumatisme du coronavirus. Quand l’Organisation Mondiale de la Santé, perçue comme inféodée à Pékin, a minoré les informations en provenance de Chine, et elle a été par la suite incapable de travailler librement sur place pour enquêter sur les origines de la pandémie. C’est aussi parce que la Chine exigeait de voir son pouvoir élargi au sein de la banque mondiale que Kristalina Georgieva aurait fait pression sur les enquêteurs du classement Doing Business en 2017. Il fallait éviter le déclassement de ce pays pour ne pas le froisser au moment où sa participation financière était bienvenue.

De prestigieux économistes de la gauche américaine ont apporté leur soutien à la directrice du Fonds en dénonçant une conspiration des conservateurs américains

C’est l’autre grille d’analyse de cette polémique. Le prix Nobel Joseph Stiglitz parle d’un « nouveau maccarthisme ». David Malpass, l’actuel président de la Banque mondiale, est dans son viseur. Celui qui a été nommé par Donald Trump a commandé l’enquête sur la manipulation du Doing business. Il serait à la manœuvre, pour déstabiliser une dirigeante remuante, décoiffante pour un FMI longtemps acquis au fameux consensus de Washington.

En arrivant il y a trois ans, Kristalina Georgevia revoit les priorités. La lutte contre les inégalités, la cause des femmes, celle du réchauffement climatique deviennent ses nouveaux mantras. Avec la pandémie, elle propose et obtient la mise à disposition d’un fonds de 650 milliards de dollars et elle s’active pour apporter au plus vite des facilités financières aux pays les plus fragiles. Cette économiste issue d’un pays en développement n’a pas révolutionné le fonds, mais elle a amplifié une inflexion déjà sensible dans les débats depuis plusieurs années. Elle a encore deux ans de mandat pour continuer le travail, mais dorénavant avec l’ombre du soupçon sur son action.

RFI

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