Les juges de la Cour pénale internationale (CPI) ont délivré, ce lundi 27 juin 2011, des mandats d’arrêt pour crimes contre l’humanité commis en février 2011, à l’encontre de trois hauts responsables libyens dont Mouammar Kadhafi. Les magistrats ont aussi délivré des demandes de coopération à l’encontre des Etats pour leur arrestation.
Le Guide libyen Mouammar Kadhafi, son fils, Seif al-Islam Kadhafi et Abdullah al-Senoussi, le chef des renseignements militaires, font désormais l’objet d’un mandat d’arrêt international pour crimes contre l’humanité commis en Libye en février 2011.
Les juges de la Cour pénale internationale ont estimé que « suite aux événements en Egypte et en Tunisie, qui ont conduit au départ de leurs présidents respectifs, une politique officielle a été organisée au sommet de l’appareil d’Etat libyen », permettant « l’utilisation de tous les moyens de répression, y compris l’utilisation de la force meurtrière ». Ils estiment que Mouammar Kadhafi « a conçu et orchestré un plan visant à dissuader et étouffer par tous les moyens les manifestations de la population civile contre le régime ».
Le procureur, qui avait demandé l’émission de ces mandats d’arrêt en mai dernier, avait notamment ciblé les crimes commis à Benghazi, Tripoli et Misrata, où « des actes inhumains ont été infligés aux civils par les forces de sécurité, les privant de leurs droits fondamentaux en raison de leur opposition politique, réelle ou perçue, au régime de Kadhafi ».
Camouflage des crimes
Selon les trois magistrats, les forces de sécurité ont lancé des attaques à travers toute la Libye « contre la population civile qui manifestait contre le régime de M. Kadhafi » et suivant « un mode opératoire cohérent ». Les juges ne se sont cependant pas prononcés sur le nombre de morts provoqué par ces attaques, estimant impossible toute évaluation à ce stade, alors que les forces de sécurité libyenne ont aussi engagé une campagne « de camouflage » des crimes perpétrés.
Lisant la décision, la juge-présidente, Sanji Mmasenomo Monageng, du Botswana, a affirmé qu’ « en temps que Guide reconnu et incontesté de la Libye, Mouammar Kadhafi exerçait, durant toute la période visée, un pouvoir absolu et incontesté sur l’appareil libyen y compris sur les forces de sécurité. » Concernant son fils, Seif al-Islam, la juge a précisé que « bien que n’exerçant pas de fonction officielle, ce dernier est implicitement le dauphin de Mouammar Kadhafi et la personne la plus influente de son cercle rapproché. » Le troisième, Abdullah al-Senoussi, beau-frère du dirigeant libyen, est notamment suspecté d’avoir mis en œuvre cette politique d’Etat.
Coopération
Des mandats d’arrêt sont désormais lancés contre les trois suspects. Les juges ont aussi délivré des demandes de coopération à l’encontre des Etats. La Cour ne dispose pas de force de police propre, elle doit compter sur la coopération internationale pour arrêter les suspects. Inculpé depuis 2009, le premier chef d’Etat poursuivi par la Cour, Omar el-Béchir, le président du Soudan, est toujours libre. Les 116 Etats parties à la Cour ont l’obligation, au moins théoriquement, d’arrêter les trois responsables libyens s’ils se présentaient sur leur sol. Les pays membres de la coalition en Libye, la France et le Royaume-Uni ont, eux aussi, cette obligation de les arrêter.
Par Stéphanie Maupas / RFI – Article publié le : lundi 27 juin 2011