La Charte du Mandé : et si l’Afrique s’en inspirait ?

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La Charte du Mandé est parfois considérée comme la “première déclaration des droits de l’Homme de l’humanité”. Pour certains Africains, il faut s’en inspirer.

Elle établit les principes appelés à régir le nouvel empire du Mali à l’arrivée au pouvoir du prince mandingue Soundiata Keïta.

En 2009, elle a été inscrite au patrimoine immatériel de l’humanité par l’Unesco. Et aujourd’hui, certains Africains s’en réclament pour refonder l’Afrique.

La Charte de Kouroukan Fouga

La tradition orale veut que Soundiata Keïta ait rassemblé les notables, dans la clairière de Kouroukan Fouga qui se situe aujourd’hui dans le cercle de Kangaba, région de Koulikoro. Cela se déroule en 1236.

Le jeune empereur veut alors définir les règles de vie dans son empire. Il vient de battre son ennemi, Soumangourou Kanté. Le cruel roi du Sosso, envahisseur du Mandé, qui avait massacré les onze frères de Soundiata Keïta, est mis en déroute.

La Charte du Mandé est proclamée, dotée de 44 articles, qui organisent la vie sociale de l’empire.

Elle précise notamment les différents groupes sociaux et leurs rôles respectifs, la hiérarchie au sein de la société (Art. 1 à 4). Elle scelle aussi le cousinage à plaisanterie entre les Mandingues (Art.7), accorde des droits fondamentaux tels que celui à la vie ou à l’intégrité physique (Art.5).

La Charte permet aux femmes de choisir de fuir leur foyer avec leurs enfants, sans être poursuivies (Art. 11). Certains articles règlent également la valeur du bétail, la propriété et incitent à la protection de l’environnement (Art. 31 à 39).

Autre point saillant : dans son article 6, la Charte abolit l’esclavage par razzia.

Evidemment, certains articles peuvent prêter à sourire, comme l’article 17 : “Les mensonges qui ont vécu 40 ans doivent être considérés comme des vérités”, mais certains autres sont encore porteurs de modernité.

Par exemple, l’article 24 : “Ne faites jamais du tort aux étrangers”, ou 42 : “Dans les grandes assemblées, contentez-vous de vos légitimes représentants et tolérez-vous les uns les autres.”

Le serment des chasseurs

Mais les racines de la Charte du Mandé seraient plus anciennes encore. Dès 1222, sept principes moraux de base constituent déjà le Serment des chasseurs, qui lui sert de préambule. En voici la lecture :

Une tradition orale éparse

Pendant des siècles, les griots malinkés chantent les principes de la Charte qui prônent la paix sociale, l’inviolabilité de la personne humaine. Et c’est ainsi que ce texte – la plus ancienne Constitution connue du monde – est parvenu jusqu’à nous.

Sa retranscription s’est faite par étapes, entre 1949 et 1998, date de publication des ouvrages de référence de Youssou Tata Cissé, notamment.

L’histoire comme instrument de cohésion sociale

Certains historiens mettent cependant en doute la véracité historique de la Charte du Mandé, reconstituée au XXe siècle à partir de souvenirs oraux épars. Mais peu importe, de l’avis de Moussa F. Coulibaly, historien et ancien professeur à la chaire d’histoire de la faculté de géographie et d’histoire de l’Université de Bamako. Pour lui, ce texte a au moins le mérite d’exister.

“Qu’on ne cherche pas la petite bête pour des choses qui n’en valent pas la peine!, s’exclame-t-il. Ce que les historiens africains ont fait est possible. Je pense que cela peut être considéré comme historiquement valable”.

L’historien rappelle que “dans l’histoire européenne aussi, il y a beaucoup de choses qu’on a inventées. […] Dans l’histoire de Rome, Remus et Romulus, qui sont-ils ? [ …] Les Africains ont le droit de faire de leur histoire ce qu’ils entendent. Les Français le font bien : aujourd’hui encore, il existe une fête de Jeanne d’Arc.”

Selon Moussa F. Coulibaly, l’un des aspects positifs de la Charte est qu’elle représente “déjà là un point de départ pour un regroupement. […] C’est un document. Chacun peut trouver quelque chose là-dedans. Ce document transmet des valeurs dont les Africains d’aujourd’hui peuvent s’inspirer. Il n’est pas dit que les prendre et de les appliquer telles quelles. Non, il faut les adapter aux conditions nouvelles qui existent aujourd’hui.”

Certains intellectuels africains font d’ailleurs aujourd’hui référence à la Charte du Mandé comme une base possible pour refonder une Afrique plus en accord avec les populations du continent.

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4 COMMENTAIRES

  1. ADO, yugubane et Ogoba tous des ennemis de l’Afrique et des Africains, des malheureux et des aigris, mais comme on le dit souvent: les chiens aboient et la Caravane passe.

  2. Malgré que cette charte ait existé depuis 8 siècles, le Mali est incapable de bâtir un État solide, si les pays Africains l’adoptaient et devenaient comme le Mali actuel, l’Afrique gagnera le titre peu enviable de continent de merde.

  3. La charte du Mandé est un texte superbe. Il importe, quand même, de préciser que, transmis oralement, son origine comme son contenu sont contestés par la recherche historique la plus récente. A-t-elle été réellement promulguée par Soundiata Keita ou son entourage ? Est-elle la réécriture amplifiée, plus récente, d’un canevas du XIIIe siècle ? On ne saurait répondre avec précision. Ce qui est sûr, c’est que son contenu, tel que proposé aujourd’hui, est admirable. Si les États africains s’en inspiraient, ce serait le paradis sur terre.

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