Kenya: 10 tués dans des représailles au lendemain d’un nouveau raid tribal

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Au moins dix personnes ont été tuées jeudi dans un raid de représailles contre un village du sud-est du Kenya, au lendemain d’une attaque similaire dans cette région où des violences entre deux tribus rivales ont fait quelque 150 morts depuis août.

Les raisons exactes de ce cycle de violences dans le delta de la Tana restent peu claires mais pourraient s’expliquer, selon certains observateurs, par l’approche des élections générales de mars 2013, le redécoupage électoral et la démographie ayant modifié les rapports de force politico-ethniques dans la zone.

Le 4 mars, outre un successeur au chef de l’Etat Mwai Kibaki – qui ne se représente pas – et de nouveaux députés, les Kényans éliront pour la première fois des sénateurs, des gouverneurs et certains responsables locaux, exacerbant les ambitions au niveau local.

“Il y a dix morts et deux blessés dans un état critique, ayant des blessures par balles, des coupures dues à des coups de machettes et des brûlures”, a déclaré jeudi à l’AFP Caleb Kilunde, un responsable de la Croix-Rouge kényane dans la zone, où tribus orma et pokomo s’affrontent depuis l’été, en un cycle d’attaques et de représailles.

Les dix victimes tuées jeudi sont cinq enfants, deux femmes et trois hommes, a précisé la Croix-Rouge kényane sur sa page Facebook, ajoutant que 19 maisons avait été incendiées.

Le village de Kibusu, peuplé de Pokomo – communauté essentiellement composée de cultivateurs – a été attaqué jeudi à l’aube, 24 heures après celui de Nduru, situé à quelque km de là et peuplé d’Orma – des éleveurs en grande majorité. Neuf personnes, dont deux assaillants, avaient péri lors du raid contre Nduru mercredi.

Le chef de la police de la province kényane de la Côte a confirmé l’attaque. “Nous avons un problème dans la région”, a simplement déclaré Aggrey Adoli jeudi sans plus de détails.

Les rivalités sont ancestrales et parfois sanglantes autour des pâturages ou des points d’eau entre Orma et Pokomo, installés autour du delta de la Tana, région pauvre et isolée, située à environ 400 km au sud-est de Nairobi et à une quarantaine de km de la côte.

des différends instrumentalisés à des fins électorales

Mais certains observateurs et habitants de la région estiment que les violences en cours depuis l’été, inédites par leur ampleur et leur intensité, n’ont plus rien à voir avec les anciens différends et suspectent des hommes politiques locaux d’attiser les rivalités traditionnelles à des fins électorales.

“Les causes principales de la violence sont l’inégale répartition des ressources et les interférences politiques”, a expliqué à l’AFP Milly Lwanga, de la Commission de la cohésion et de l’intégration nationale, mise en place après les violences post-électorales de fin 2007 et début 2008.

“Les politiciens se servent des populations pauvres pour créér des divisions entre les communautés”, a-t-elle ajouté.

Un vice-ministre kényan, par ailleurs député de la région, avait été inculpé en septembre d’incitation à ces violences et limogé. Et mercredi, M. Adoli a affirmé que la police était sur le point de boucler son enquête sur des politiciens locaux qui auraient financé ou organisé les violences dans le delta.

“Nous allons mettre la main dessus très bientôt” et “ils seront poursuivis avant les élections, car l’enquête est à un stade avancé”, a assuré M. Adoli, refusant de donner les noms ou le nombre d’individus visés.

Le déploiement d’un millier de membres des forces spéciales de la police en septembre dans la région avait temporairement ramené le calme, même si les tensions restaient vives entre les deux tribus.

Mais mi-décembre, 45 personnes – dont 14 assaillants – avaient à nouveau été tuées dans l’attaque du village orma de Kipao par des miliciens pokomo.

L’incapacité apparente de la police à ramener l’ordre, à deux mois des élections, inquiète au Kenya, où la contestation des résultats du précédent scrutin, fin décembre 2007, avaient dégénéré en affrontements ethniques, faisant plus d’un millier de morts et 600.000 déplacés, dont un grand nombre sont toujours hébergés dans des camps.

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