L’ancien chef du gouvernement vient d’être exclu, ce mercredi 27 novembre, de la Haute assemblée, par un vote de ses pairs qui fait suite à sa condamnation pour fraude fiscale à un an de prison. « C’est un jour amer, un jour de deuil », a déclaré Silvio Berlusconi après l’annonce de sa déchéance. Son parti Forza Italia a décidé de passer dans l’opposition. Le président du Conseil Enrico Letta, qui a obtenu la confiance du Parlement sur le budget la nuit dernière, juge désormais sa majorité plus «soudée» et « unie ».
Silvio Berlusconi a perdu son poste de sénateur parce qu’il a été condamné à 4 ans de prison dont 3 ont été amnistiés. Or la loi prévoit que toute personne condamnée à au moins deux ans de prison est inéligible pendant 6 ans. Donc le Sénat devait organiser un vote pour décider de son renvoi.
Cette décision de justice qui fait tomber le Cavaliere date du 1er août dernier. Ce jour-là, la Cour de cassation a confirmé le verdict rendu en mai dans le procès Mediaset, un procès pour fraude fiscale. 7 millions d’euros de pertes pour l’État, à cause d’un système de caisses noires et de montages douteux dans la gestion de son empire médiatique.
Silvio Berlusconi pourrait donc se retrouver en prison, dès ce soir, après son exclusion du Sénat. Mais c’est peu probable. Il lui reste en réalité 9 mois à purger sur cette peine. Or à la fois à cause de son âge, 77 ans, et pour ne pas rajouter encore de tensions politiques, elle devrait se transformer en travaux d’intérêt général, comme l’ont demandé ses avocats.
Mais comme le rappelle la presse italienne, Silvio Berlusconi a toujours détesté les magistrats, et toutes les gentillesses qu’il leur a adressées pendant ses 20 ans de vie politique pourraient se retourner contre lui, on n’est pas à l’abri d’une surprise (cf. encadré).
Il semble néanmoins que ce soit la fin du Cavaliere, au sens propre du terme, puisque Silvio Berlusconi a perdu son titre de Chevalier de l’ordre du travail. Mais est-ce la fin du Caïman, comme on le surnomme en raison de sa cuirasse à toute épreuve ? Personne ne peut le dire.
Ce qui est certain, c’est que Silvio Berlusconi est désormais inéligible, il ne pourra prétendre à aucun mandat électif pendant 6 ans. Il n’a plus de passeport, il est limité dans ses déplacements et ses contacts.
Mais il affirme qu’il restera à la tête de son parti Forza Italia, et, sa carrière l’a amplement démontré, il a toujours su rebondir et revenir sur le devant de la scène. Suite à cette condamnation, il a déjà demandé au président de la République de le gracier, Girogio Napolitano a refusé. Silvio Berlusconi souhaite aussi la révision du procès, et il a même déposé un recours devant la Cour européenne des droits de l’homme.
Cette dernière appréciera d’ailleurs sans doute ce dernier éclat verbal à lire dans son prochain livre. « Mes enfants se sentent comme les juifs sous Hitler », a -t-il écrit, en se référant à l’acharnement dont il se dit victime.
L’avenir politique de Silvio Berlusconi semble donc s’assombrir, même s’il faut reconnaître cette constante : le Cavalliere a toujours été haï ou adulé. Et il reste encore très populaire auprès d’une partie de la population. Aux législatives du printemps dernier il a récolté à la tête du parti le Peuple de la Liberté (PDL) 10 millions de voix, et il a joué un rôle clé dans la laborieuse mise en place du gouvernement de coalition droite-gauche.
Mais c’est surtout la scission du PDL qui rebat les cartes, et risque de compliquer la tâche d’Enrico Letta. Le parti s’est scindé entre Forza Italie, recréé par Silvio Berlusconi, et qui est passé dans l’opposition, et le nouveau Centre droit qui demeure, lui, dans la coalition.
Le gouvernement doit donc désormais faire face à deux oppositions, celle de la droite de Forza Italia et celle du mouvement 5 étoiles du populiste Beppe Grillo.
La première condamnation définitive d’une longue suite de procès
La condamnation à l’origine de la chute de Silvio Berlusconi est la première à avoir abouti, dans sa longue histoire judiciaire.
Silvio Berlusconi est entré en politique en mai 94, et dès l’année suivante il était en effet déjà cité dans un procès pour financement illégal. Condamné en 97 pour « faux en écriture », il a néanmoins été blanchi en appel. Tout au long de ces 20 dernières années Silvio Berlusconi n’a eu de cesse de contourner la justice, même si celle-ci a semble-t-il réussi à le rattraper.
Et ce n’est pas fini…
Le 11 février prochain, il doit comparaitre pour corruption de sénateur. Il est accusé d’avoir acheté un sénateur de gauche pour le faire passer dans son camp, à l’époque où la droite cherchait à faire tomber le gouvernement de Romano Prodi.
Il y a aussi le procès pour prostitution de mineure et abus de pouvoir, le fameux scandale Rubygate. Dans cette affaire Silvio Berlusconi a été condamné à 7 ans de prison et interdit de mandat public à vie. Mais il a fait appel. Le nouveau procès devrait avoir lieu l’an prochain.
Il est également inquiété dans plusieurs autres affaires : violation du secret de l’instruction, incitation à déclarations mensongères devant la justice, publication illégale, etc.
Source: rfi.fr