Les Etats-Unis viennent de décider de la création d”un commandement unifié des forces américaines en Afrique. Dénommé Africom, il va coiffer toutes les activités de défense des USA sur notre continent, sauf en Egypte. L’oncle Sam renforce ainsi sa surveillance de l’Afrique, très convoitée, sous prétexte de lutte contre le terrorisme international.
Le ministère américain de la Défense a décidé de créer un commandement unifié pour l”Afrique sous l’appellation Africom. Cette restructuration géopolitique vise à coordonner toutes les activités militaires et sécuritaires américaines dans l”ensemble de notre continent très convoité dans le repositionnement géopolitique en cours depuis la fin de la guerre froide.
« Ce nouveau commandement renforcera notre coopération avec l”Afrique en matière de sécurité et nous offrira de nouveaux moyens d”accroître les capacités de nos partenaires en Afrique », affirmait le président George W. Bush le 6 février dernier. « Il nous permettra d”intensifier nos efforts en vue d”apporter la paix et la sécurité aux peuples d”Afrique et de promouvoir nos objectifs communs en matière de développement, de santé, d”éducation, de démocratie et de croissance économique en Afrique ».
L”Africom doit commencer à fonctionner le 30 septembre 2008. Il aura alors à sa tête un chef militaire de haut grade, à quatre étoiles et de même rang que les autres commandants régionaux de par le monde. L”équipe de transition pour le futur commandement a pour le moment son quartier général à Stuttgart (Allemagne), siège du Commandement européen des forces armées américaines. Le ministère de la défense souhaiterait cependant qu”il soit par la suite transféré dans un pays africain.
Jusqu”ici, les activités militaires des Etats-Unis en Afrique étaient partagées entre les commandements européen, central et pacifique, situation que le ministre de la défense, Robert Gates, a qualifiée de « dispositif désuet remontant à la guerre froide ». Maintenant que l’impérialisme l’a emporté sur le communisme, il faudra changer de stratégie.
« La création de l”Africom nous assurera une approche plus efficace et plus intégrée que ne le fait la division actuelle de l”Afrique entre les différents commandements », a déclaré M. Gates, le 6 février, à la commission sénatoriale des forces armées. En réalité, il s’agit de mieux contrôler l’Afrique. Il n’est un secret pour personne que l’Afrique, surtout le traditionnel « pré-carré français », est très convoitée par la Maison Blanche. Ils s’attaquent ainsi aux zones d’influence française car conscients que les Etats-Unis ne peuvent plus compter sur l’Hexagone dans leur belliqueuse et expansionniste politique. Les Américains ont encore en travers de la gorge, l’opposition de la France à l’envahissement de l’Irak même si la suite a donné raison aux Français.
Les Etats-Unis veulent également contrôler l’Afrique pour mieux contrer des groupes terroristes comme les Salafistes du GSPC d’Algérie. Il s’agit aussi de se positionner par rapport à l’avancée vertigineuse sur le continent africain d’une puissance concurrente comme la Chine. Ce pays qui s’éveille fait autant peur aux Européens qu’aux Américains. Et une présence américaine mieux coordonnée est toujours un atout précieux pour se préserver des parts de marchés. Surtout que les Chinois s’attaquent à des bastions comme l’Angola où les Américains étaient très influents du temps de la guerre froide.
Embourbés en Irak, détestés à Beyrouth (Liban) et à Damas (Syrie), de moins en moins tolérés en Arabie Saoudite… les sources d’approvisionnement des Etats-Unis en pétrole commencent à se faire rares. Surtout qu’ils ne peuvent plus se tourner vers l’Amérique latine dont les pays sont en train de basculer un à un dans l’antilibéralisme.
Abandonner l’Afrique et ses gisements de pétroles prometteurs aux Chinois serait une erreur géostratégique qui peut coûter cher à l’avenir. Il faut rappeler à ceux qui doutent encore de vrais enjeux de la restructuration géostratégique, que ces commandements régionaux unifiés servent à coordonner les intérêts militaires des Etats-Unis dans le monde. Leurs chefs font office de diplomates et, si cela s”avère nécessaire, ils prennent le commandement d”opérations militaires régionales.
« Les Etats-Unis vont solliciter l”avis des dirigeants africains quant à la manière dont le commandement pour l”Afrique pourra réagir aux défis. Nous collaborerons étroitement avec nos partenaires africains en vue de déterminer un lieu approprié pour ce nouveau commandement », a promis George Bush.
Comme on le voit, on ne demande pas l’avis des dirigeants africains sur la nécessité de la création de ce commandement sur leur continent, mais sur son lieu d’implantation. Ce qui n’est pas d’ailleurs surprenant parce que nos pays sont de plus en plus trop dépendants de l’aide financière américaine pour refuser quoi que ce soit à la Maison Blanche. Seule certitude cependant : les Africains n’ont pas dénoncé les bases militaires françaises pour tomber sous le joug d’un commandement militaire américain.
Moussa Bolly
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