Le cas vénézuélien en est une illustration, plus particulièrement les arguments mensongers de certains médias et pouvoirs portant sur l’interdiction par le pouvoir en place d’un parti qui n’existe pas.
Dans le cadre de l’élection présidentielle anticipée qui se déroulera dans quelques semaines au Venezuela, la Cour suprême de justice (TSJ) dit que Maduro aurait exclu “la principale coalition d’opposition” du scrutin. Sauf que cette coalition n’existe pas ! Rendons justice à @LeMediaTV pour sa volonté de rectifier rapidement le tir. Les autres médias le feront-ils ?
Car comment ne pas comprendre le trouble de nombreux militants qui croient que le président du Venezuela a exclu l’opposition du scrutin ! S’il était vrai que Maduro interdit à ses adversaires de se présenter, on se trouverait évidemment face à l’intronisation d’un dictateur. Et on serait tenté, non sans raison, de “prendre ses distances”. Voire de comprendre ou de justifier les sanctions Etats-Uniennes/européennes, la guerre économique, les menaces d’invasion par Trump et les violences paramilitaires lors de l’insurrection de la droite en 2017… Or c’est faux.
L’opposition vénézuélienne peut bien sûr participer aux élections présidentielles qui se tiendront au cours du premier trimestre 2018, et peut présenter ses candidats. La Cour Suprême de Justice n’a exclu aucun parti mais une étiquette, celle de la coalition de droite appelée MUD (Mesa de Unidad Democratica). Cette sentence ne fait qu’appliquer la loi. Au Venezuela comme dans n’importe quel Etat de droit, les inscriptions aux élections se font légalement par parti. La Constitution vénézuélienne n’autorise pas qu’un candidat soit affilié à deux partis politiques à la fois (double militantisme).
Précisons qu’un jugement de la Cour Suprême du 5 janvier 2016 et l’article 32 de la Loi sur les partis politiques interdisent qu’une coalition puisse présenter un candidat si un ou plusieurs de ses partis qui aurait boycotté les élections précédentes, ne s’est pas encore réinscrit auprès du Conseil national électoral (CNE). Les partis de droite qui ont boycotté le scrutin de décembre 2017 savent depuis cette époque qu’ils doivent se réinscrire auprès du CNE. Les partis qui ont participé à la dernière élection n’ont pas à se réinscrire et peuvent présenter leurs candidats sans refaire cette démarche.
Même si depuis quelques semaines l’opposition a reçu l’injonction de Washington de se retirer des négociations ouvertes en 2017 avec le gouvernement bolivarien et de boycotter les présidentielles pour renforcer l’image internationale d’une dictature, plusieurs de ses représentants se sont rassis ce lundi 29 janvier 2018 à la table de négociations. Un des observateurs internationaux de ces discussions, l’espagnol Rodriguez Zapatero, a critiqué les sanctions européennes parce que loin de contribuer au dialogue, elles renforcent les secteurs radicaux de l’opposition qui préfèrent une confrontation violente.
Le vrai problème de la droite vénézuélienne, qui va de l’extrême droite aux centristes libéraux, c’est que depuis 9 mois, elle ne parvient pas à se mettre d’accord sur sa stratégie électorale et à désigner un candidat unique. En s’engageant dans des violences lors des manifestations de 2017 (attentats à la bombe, incendies de maternités, assassinats de passants, lynchages racistes, etc.), elle a perdu un grand nombre d’électeurs des classes moyennes qui se tournent vers l’abstention. Du coup, le seul espoir de la droite vénézuélienne, c’est de présenter un candidat unique à la présidentielle afin que ces électeurs des classes moyennes se retrouvent sur lui.
L’opposition et les grands médias dénoncent aujourd’hui l’anticipation des présidentielles votée par l’Assemblée nationale constituante. Or… cette anticipation est une vieille revendication de l’opposition et des gouvernements occidentaux : “On veut des élections générales, tout de suite !”. On mesure aujourd’hui la mauvaise foi de ces secteurs qui au lieu de s’en féliciter, en tirent prétexte pour de nouvelles sanctions…
Ce scrutin présidentiel sera le 25ème en 19 ans de révolution. L’importante victoire du chavisme aux élections municipales du 10 décembre 2017 avait déjà confirmé – comme lors des votes de juillet et d’octobre – l’abîme entre l’image martelée par les médias d’une “dictature” et une démocratie qui bat des records en matière d’élections.
Lors du scrutin de décembre, le Conseil des experts électoraux d’Amérique Latine (CEELA) a rappelé par la voix de son président, le juriste Nicanor Moscoso, que les partis de droite comme de gauche ont déclaré être satisfaits du déroulement des 9 audits préalables au vote : Ce processus d’audit est inédit et unique dans la région. Il permet que toutes les étapes du processus, tout ce qui est programmé et tout ce qui fait partie du processus soit contrôlé par des techniciens et par les membres des différents partis politiques délégués devant le Centre national électoral. (..) Le 11 décembre, au lendemain du scrutin, le CEELA a donné lecture de son rapport final : Le processus de vérification citoyenne s’est déroulé en toute normalité et avec succès. On a pu constater que le nombre de bulletins de votes en papier introduits dans les urnes et le nombre de votes électroniques enregistrés par les machines, coïncident à 100 %. C’est ce système double – vote électronique + vote papier pour vérification, qui a fait dire à l’observateur Jimmy Carter que de tous les systèmes électoraux qu’il a pu observer dans le monde, que le vénézuélien est “le meilleur”.
Voici par ailleurs la réponse officielle du Venezuela bolivarien au président français M. Macron qui depuis le sommet de Davos a réclamé de “nouvelle sanctions contre le Venezuela pour ses dérives autoritaires” :
Le gouvernement de la République bolivarienne du Venezuela rejette énergiquement les déclarations inacceptables émises le vendredi 26 janvier par le président de la République française, Emmanuel Macron, dans lesquelles il déconsidère le gouvernement démocratique du Venezuela et demande à intensifier les sanctions de l’Union européenne contre le peuple vénézuélien, ce qui constitue un geste inamical de la part du leader d’une nation avec laquelle le Venezuela a cultivé des liens historiques et fraternels.
La République bolivarienne du Venezuela observe avec préoccupation que l’Etat Français en appelant au délit et à l’adoption de mesures contraires au droit international, ne fragilise pas seulement le principe de la libre détermination des Peuples et à la non-intervention dans les affaires intérieures des états souverain mais abandonne son précepte de “Liberté, Egalité, Fraternité”, en prétendant se constituer en une copie fidèle du gouvernement hégémonique des Etats-Unis qui, obstinément, cherche à faire sombrer le peuple vénézuélien et attiser les conflits dans le pays.
Finalement, il est inacceptable pour la République bolivarienne du Venezuela que le président de la République française prétende mettre en cause la légitimité, la pertinence et la transparence des pouvoirs publics et des institutions inscrites dans notre Constitution. En ce sens, le gouvernement bolivarien exhorte le gouvernement français à poursuivre les liens bilatéraux par la voie d’un dialogue constructif et respectueux qui se traduisent par des relations mutuellement fructueuses, et éloignées des vieilles pratiques intimidatrices de la France colonialiste dépassée.
Caracas, le 29 janvier 2018
(Traduction : Jean-Michel Hureau)
Thierry Deronne