Etats-Unis: émoi après l’arrestation d’un sans-papiers filmée par sa fille

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Jocelyn Avelica (c), ses soeurs Fatima (d) et Yuleni (g), le 3 mars 2017, à Los Angeles
Jocelyn Avelica (c), ses soeurs Fatima (d) et Yuleni (g), le 3 mars 2017, à Los Angeles

Los Angeles (AFP) – Une vidéo poignante où l’on entend sangloter une adolescente pendant qu’elle filme l’arrestation de son père sans-papiers juste à côté du collège où il déposait l’une de ses quatre filles suscitait l’indignation vendredi aux Etats-Unis.

L’affaire relance aussi la crainte que l’administration Trump, qui a fait de l’expulsion de millions d’immigrés en situation illégale une priorité, en arrête désormais dans des lieux où les autorités ne menaient pas jusqu’alors ce type d’opération: les écoles, hôpitaux, tribunaux, lieux de culte, etc.

Romulo Avelica-Gonzalez, Mexicain de 48 ans qui vit aux Etats-Unis depuis 27 ans et travaillait dans un restaurant, a été arrêté mardi aux abords du collège Academia Avance du quartier de Highland Park à Los Angeles, par deux policiers en vestes bleues barrées des lettres jaunes “police”.

L’incident a été filmé par sa fille de 13 ans Fatima, qu’on entend sangloter et gémir à l’arrière de la voiture où se trouvait aussi la mère des quatre soeurs, toutes nées aux Etats-Unis.

La vidéo a fait le tour d’internet et des médias américains.

“Nous étions effrayées et tristes”, a raconté à l’AFP l’adolescente timide au téléphone.

Ce matin-là, elle était brièvement sortie de chez elle acheter un en-cas avant de partir à l’école et avait vu une “voiture suspecte” banalisée stationnée près de chez eux.

Son père a ensuite emmené ses deux plus jeunes filles au collège, déposant d’abord Yuleni, 12 ans. Puis à environ 700 mètres de l’école, deux voitures de police ont encadré la sienne, allumant leurs gyrophares et l’amenant à s’arrêter.

“Il leur a demandé ce qu’il avait fait de mal, ils lui ont dit de se taire, l’ont menotté et mis dans une voiture”, poursuit Fatima. Sa mère lui a alors demandé d'”être forte”.

“Nous n’aurions jamais cru que ça pourrait nous arriver”, assure Fatima, même si des agents de l’immigration étaient déjà venus une fois chez eux. Leur père n’avait pas ouvert.

Ses filles lui ont parlé au téléphone depuis mardi: “il nous a dit qu’il était fier de nous, que nous étions fortes”, explique Jocelyn, 19 ans, une des soeurs ainées de Fatima.

– En centre de détention –

D’après l’agence fédérale de l’immigration, il avait fait l’objet “de plusieurs condamnations pénales, y compris pour conduite sous l’influence de substances en 2009, et d’un ordre d’expulsion du territoire remontant à 2014”, mais d’aucun crime violent.

Emi MacLean, avocate de l’association de défense des travailleurs immigrés NDLON, précise qu’il avait notamment utilisé un faux autocollant d’immatriculation de voiture, à une période où il lui était impossible en tant que sans-papiers de passer un permis de conduire. Une infraction qui remonte à il y a environ 20 ans.

M. Avelica-Gonzalez se trouve actuellement dans un centre de détention à Adelanto, dans le désert californien (sud-ouest). “Nous voulons le faire libérer sous caution pour qu’il puisse combattre son expulsion aux côtés de sa famille”, souligne Mme MacLean.

“Nous espérons qu’il sera bientôt de retour avec nous, nous voulons que notre famille soit réunie”, dit Fatima.

Depuis quelques semaines les agents de l’immigration ont multiplié les coups de filets très médiatisés pour placer en détention des immigrés en situation irrégulière. Le président républicain, qui a fait de l’expulsion de millions de sans-papiers une priorité, a dit viser d’abord les criminels.

Pour Emi MacLean, si des expulsions pour des infractions pénales non violentes avaient déjà lieu sous l’administration Obama, le gouvernement de Donald Trump “va plus loin en procédant à des arrestations aux abords des écoles qui étaient jusqu’alors considérés comme des lieux refuges, où les parents peuvent emmener leurs enfants sans peur”.

L’arrestation de M. Avelica-Gonzalez avait “créé un sentiment de terreur” dans leur communauté qui compte d’autres sans-papiers, poursuit Jennifer Cuevas, porte-parole du groupe scolaire Academia Avance.

Son directeur Ricardo Mireles observe que les établissements comme le sien avaient jusqu’à présent pour politique de ne jamais demander le statut migratoire des familles. “Dorénavant nous faisons le contraire pour nous assurer que chacune à un plan si un proche est arrêté”, explique-t-il.

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