En France aussi, on est ensemble !

0

Ceux qui se sont rassemblés, ce soir-là, étaient de simples gens qui disaient NON à l’insupportable, NON à l’intolérable. Ils sont sortis ce soir-là, Place de la République à Paris, comme dans toutes les grandes villes de France, pour brandir des crayons et défendre la liberté d’expression et de pensée. Les crayons de Charlie Hebdo ne plaisaient pas forcément à tous ceux qui étaient rassemblés, contrairement à ce que beaucoup semblent croire ! Nombre d’entre eux, d’ailleurs, n’avaient même jamais lu le journal satirique. La question n’était pas là. Ceux qui sont sortis ce soir-là étaient de simples gens vivant en France. Quelles que soient leurs appartenances politique, religieuse et culturelle, ils sont sortis au nom des libertés dont d’autres femmes et hommes sont privés sous d’autres latitudes. Les 2 jours qui ont suivi ont projeté chacun au-delà de Charlie. Le jeudi, l’assassinat d’une jeune policière municipale dans une commune limitrophe de Paris, puis le vendredi, les deux prises d’otages. Trois jours de terreur.

La même terreur que celle qui s’était abattue Rue de Rennes en 1994, et dans les stations métro-RER St Michel en 1995, et Port Royal en 1996, pour ne parler que de cette période-là. Créer la terreur, c’est le but du terrorisme. Frapper à l’aveugle pour terroriser les populations. Semer la terreur, c’est assurer une médiatisation internationale à la cause qu’on prétend juste, provoquer un appel d’air et attirer de nouveaux adeptes. Beaucoup de voix se sont élevées lorsque les Charlie ont été assassinés, pour affirmer qu’ils «l’avaient bien cherché avec leurs caricatures » ! Une enseignante raconte même qu’au cours d’un échange avec sa classe, une des collégiennes avait dit «non, franchement, tuer ça se fait pas. Encore, y aurait que ceux qui ont fait les dessins, je ne dirais rien, mais là, y a les autres» … !

Beaucoup n’apprécient pas l’émoi international que ces assassinats suscitent, alors que tant de femmes, d’hommes et d’enfants sont victimes d’un terrorisme similaire ailleurs dans le monde, sans que personne ne sorte pour dire NON. Beaucoup ont clamé que «la France» était responsable de tant de maux dans le monde qu’il ne fallait pas s’apitoyer sur une poignée de Français assassinés. Beaucoup ont réagi dès qu’ils ont su que, comme d’autres hauts responsables d’Etat, IBK participerait à la «Marche républicaine» du dimanche 11 janvier, aux côtés de François Hollande à Paris. Les Maliennes et Maliens lui reprochent en effet d’être plus prompt à pleurer la mort de Français que celle de ceux qui tombent dans le septentrion sous le feu et la violence des terroristes. Aucune de ces voix n’est à ignorer car elles font écho à certaines conversations en ville, dans les villages ou sur les réseaux sociaux. Le mal-être, la frustration et la colère aveuglent quelques jeunes et peuvent effectivement les conduire jusque dans les filières terroristes. La plupart de ceux qui marchent pour dire NON ne l’ignorent pas. Ils marchent pour que rien ne vienne encore élargir le lit du Front national en France, et celui de groupes extrémistes et partis politiques ailleurs, car tous n’attendent que cela pour parvenir à leurs fins. Ceux qui marchent ne soutiennent pas les politiques douteuses de la France et de l’Occident en général, passées et actuelles. Ils marchent pour dire NON aux terrorismes qui piétinent les libertés et les vies, où qu’ils agissent. Ils marchent en France parce qu’ils y vivent, et que des actes criminels viennent d’y être commis. Ils marchent comme tous les citoyens qui en ont la liberté n’hésitent pas à le faire dans leur pays quand leurs concitoyens en sont victimes. L’immense majorité de ceux qui se dressent pour dire NON savent que tous ceux qui tuent au nom de ce qu’ils appellent Islam outragent, d’abord et avant tout, la religion et la culture de millions de Musulmans de par le monde. Quand les prises d’otages ont été terminées le vendredi 9 janvier, François Hollande s’est exprimé pour «montrer notre détermination contre tout ce qui peut nous diviser» et annoncer  «je serai là dimanche, et j’appelle tous les Français à se lever pour porter ces valeurs de démocratie, de liberté, de pluralisme.» Il aurait dû appeler tous ceux qui vivent sur le territoire français à se lever, et ne pas réduire son adresse à «tous les Français». Il aurait dû, car, dans un moment de tension extrême, le choix des mots est plus important que jamais.

Françoise WASSERVOGEL

 

Commentaires via Facebook :