« En Afrique, le risque d’un pouvoir anachronique »

0
Le président nigérian sortant, Muhammadu Buhari, le 9 février, à Lagos. Sunday Alamba/AP
Le président nigérian sortant, Muhammadu Buhari, le 9 février, à Lagos. Sunday Alamba/AP

Des millions de jeunes citoyens africains n’ont souvent connu qu’un seul leader, aux manettes depuis plusieurs décennies, explique la journaliste du « Monde » Marie de Vergès dans sa chronique.

Chronique « Vu d’ailleurs ». Un duel de septuagénaires s’annonce au Nigeria pour l’élection présidentielle du 16 février. Dans l’un des rôles-titres, le président sortant, Muhammadu Buhari, est âgé de 76 ans. Atteint de problèmes de santé, celui que certains ont surnommé « Baba Go Slow » (« Papa va doucement ») a démenti, en décembre 2018, être mort et avoir été remplacé par un clone. « Je suis vraiment moi, je vous assure », a-t-il lancé afin de tordre le cou aux rumeurs qui ne cessaient d’enfler depuis qu’il a passé plusieurs mois à l’étranger, en 2017, pour se faire soigner d’une maladie à la nature tenue secrète.

Face à lui, le richissime businessman Atiku Abubakar, ancien vice-président (1999-2007) et principal opposant, est lui-même âgé de 72 ans. Cette affiche ne reflète guère la démographie d’un pays dont 60 % de la population a moins de 25 ans. Et interroge sur la capacité d’une élite vieillissante à répondre aux aspirations, voire aux besoins essentiels, de cette jeunesse, dans un Nigeria riche en pétrole, mais qui compte le plus grand nombre de pauvres sur la planète.

Lire aussi  Elections au Nigeria : la jeunesse en marge du jeu politique

Le géant d’Afrique de l’Ouest est loin d’être un cas isolé sur le continent. Les Algériens n’ont également pas fini de spéculer sur l’état de santé de leur chef d’Etat, Abdelaziz Bouteflika. A 81 ans, celui qui ne s’est plus exprimé en public depuis un accident vasculaire cérébral (AVC) survenu en 2013, et demeure cloué dans un fauteuil roulant, va briguer un cinquième mandat en avril. L’annonce de sa candidature, dimanche 10 février, était attendue. Elle vient malgré tout renforcer les désillusions d’un pays où un tiers des moins de 25 ans sont au chômage.

Au Gabon encore, le président, Ali Bongo, 60 ans, victime d’un AVC en octobre 2018, est parti poursuivre sa convalescence au Maroc pour un temps indéterminé. Il a été la cible, en janvier, d’un putsch avorté, témoignant du malaise qui règne dans ce petit Etat pétrolier en quasi-vacance de pouvoir. Le Camerounais Paul Biya (86 ans le 13 février) séjourne régulièrement en Suisse et gouverne à distance, si ce n’est par l’absence. En 2004, il avait déjà dû, lui aussi, faire taire les spéculations qui le donnaient pour mort.

Manque d’alternances démocratiques

La liste n’est pas exhaustive. Un certain nombre de pays africains sont gouvernés par des chefs d’Etat à la santé vacillante et, partant, gravement menacés de paralysie. Sur le continent, la moyenne d’âge des présidents atteint 66 ans. Un record, même si d’autres dirigeants, ailleurs dans le monde, ont également atteint un âge canonique. Aux Etats-Unis, par exemple, Donald Trump a 72 ans et Nancy Pelosi, la patronne démocrate de la Chambre des représentants, en a 78.

……lire la suite sur https://www.lemonde.fr

Commentaires via Facebook :