Ancien protégé d’Omar Bongo, le diplomate Jean Ping défie ce 27 août le président sortant, Ali Bongo, dans un scrutin à un seul tour.
Plus de 628 000 électeurs sont appelés aux urnes ce 27 août pour élire leur chef d’État pour les sept prochaines années, dans un scrutin à un seul tour. Officiellement, il y a dix candidats en lice pour le fauteuil présidentiel. Les résultats de l’élection présidentielle seront publiés 72 heures après le scrutin, a promis jeudi le président de la Commission électorale nationale autonome et permanente (CENAP), René Aboghe Ella. Une première pour ce petit pays d’Afrique centrale, d’1,6 million d’habitants, plongé dans le marasme économique à cause de la chute des cours des matières premières, pétrole en tête. Qui succédera à Ali Bongo, en fonction depuis septembre 2009, après des élections les plus contestées de l’histoire du pays ? Le suspense est à son comble, à tous les niveaux. Tout paraît inédit dans cette quatrième élection présidentielle que vit le pays. À tel point que le secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon a « appelé » vendredi « tous les Gabonais à exercer leur devoir civique de façon responsable et compte sur la tenue d’élections pacifiques et crédibles ».
Dix candidats sur la ligne de départ
Dans cette élection, deux candidats se détachent : Ali Bongo Ondimba, 57 ans, élu en 2009 après la mort de son père Omar resté 41 ans au pouvoir, et l’ancien patron de l’Union africaine Jean Ping, 73 ans, plusieurs fois ministre sous Bongo père. Alors que le président-candidat partait largement favori pour un nouveau septennat face à une opposition dispersée, le rapport de force s’est rééquilibré avec l’alliance de l’opposition autour de Jean Ping le 16 août, deux autres poids lourds de la vie politique locale s’étant désistés. « Il y a un risque de voir revenir certaines personnes qui ont fait tant de mal à notre pays », a déclaré vendredi Ali Bongo en visant Jean Ping, au terme d’une campagne à l’américaine menée à grand renfort de moyens.
Au même moment, l’opposant numéro 1 promettait à des milliers de partisans « la première alternance et la deuxième indépendance » du Gabon, qui n’a connu que trois présidents depuis la fin de la colonisation française le 17 août 1960. La campagne entre les deux candidats a été délétère, marquée par de violentes invectives. L’opposition a demandé en vain l’invalidation de la candidature d’Ali Bongo, répétant qu’il est un enfant du Nigeria adopté par son père, et qu’il ne peut de ce fait gouverner. Une quinzaine d’activistes de la société civile sont toujours détenus depuis leur interpellation le 9 juillet lors d’une manifestation anti-Bongo. Le syndicaliste enseignant Jean-Rémi Yama a appelé à voter Jean Ping depuis sa cellule, à l’image d’une société civile assez remontée contre le président en place. Huit autres candidats sont restés en course après le retrait de quatre candidats au profit de Jean Ping. Mais leurs chances semblent assez minces. Jean Ping a bénéficié du ralliement de Casimir Oyé Mba, ancien Premier ministre, de Guy Nzouba Ndama, ancien président de l’Assemblée nationale, de Léon Paul Ngoulakia, un cousin du président Bongo, et de l’indépendant Roland Désiré Aba’a Minko.
Campagne toxique
Mais à la veille de l’élection présidentielle, les règlements de comptes se poursuivaient comme cela avait été le cas depuis le début de la campagne électorale. Cette fois, les partisans du président sortant Ali Bongo Ondimba et son principal rival Jean Ping s’accusent de fraudes massives organisées avec le rachat de cartes d’électeurs. « À Oyem (Nord) où je suis en ce moment, des équipes (pro-Ali Bongo) font du porte-à-porte pour racheter les cartes aux gens », a déclaré à l’AFP une figure de la société civile, l’opposant Marc Ona. « Surtout dans les villages, ils profitent de la pauvreté des gens qui ne comprennent pas le sens du vote », accuse-t-il, avançant un prix entre 10 000 et 50 000 francs CFA (15 et 75 euros). Au Gabon, le salaire minimum s’élève à 80 000 francs CFA par mois.
« Certaines équipes de Jean Ping dans le 4e arrondissement de Libreville achèteraient des cartes d’électeurs. Ils veulent organiser l’abstention dans des fiefs d’Ali Bongo. Ces gens-là (qui vendent leur carte, NDLR) ne voteront pas », assure de son côté à l’AFP le porte-parole du gouvernement et du président-candidat, Alain-Claude Bilie-By-Nze.
Des élections scrutées
Des dizaines d’observateurs de l’Union européenne (UE) et de l’Union africaine (UA) sont déployés dans tout le pays pour suivre les opérations de vote et de dépouillement. Cette présence va-t-elle garantir une élection « transparente, libre et démocratique » comme l’affirme le pouvoir ? Autre polémique : les listes électorales comportent de nombreuses incohérences, selon un économiste gabonais, Mays Mouissi. Il pointe une soixantaine de localités avec « beaucoup plus d’électeurs inscrits sur la liste électorale que d’habitants ». Beaucoup d’habitants de la capitale Libreville sont inscrits dans leur village d’origine, rétorque le porte-parole du président-candidat, Alain-Claude Bilie-By-Nze.
Chaque camp connaît les rouages du système
« Nous savons qu’Ali Bongo va essayer de tricher, tout comme il l’a fait en 2009 », a déclaré M. Ping au quotidien américain USA Today. « Mais nous savons comment il va tricher et nous ferons tout pour prévenir cela », a ajouté l’ex-patron de l’Union africaine, qui a reconnu avoir été lui-même témoin de fraudes électorales quand il était au coeur du système avec l’ancien président et père de l’actuel, Omar Bongo Ondimba. Des invectives qui ne surprennent personne, car cette élection intervient alors que le Gabon est indépendant depuis le 17 août 1960, mais n’a connu que trois présidents élus : Léon Mba (1960-1967), Omar Bongo Ondimba (1967-2009) et Ali Bongo Ondimba (2009 à ce jour).
Le Chinois qui a traité les Gabonais de cafards et qui voudrait être leur Président. Vive le Président des cafards.
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