D r. Issa Ben Zakour, à propos de la référence évacuation dans le district sanitaire de Ségou «La caisse de solidarité a cessé de fonctionner depuis avril 2009 et la vie des femmes enceintes est en danger»

0

Reconnu comme une stratégie efficace de lutte contre la mortalité maternelle et néonatale, la référence évacuation est confrontée à des difficultés dans la région de Segou. Depuis 2009, la mobilisation des quotes parts constitue un goulot d’étranglement. Ce qui n’est pas sans risque car beaucoup de femmes risquent de perdre leur vie en donnant la vie. Les partenaires, en l’occurrence les associations de santé communautaire, les mairies et les conseils de cercles, ont arrêté de s’acquitter de leurs cotisations. Dans l’entretien qui suit, Dr Issa Ben Zakour, médecin-chef du Centre de santé de référence de Segou, nous donne des explications par rapport au non fonctionnement des caisses de solidarité.

L‘Indépendant : Parlez-nous de la référence évacuation au niveau de votre district sanitaire

 Dr Issa Ben Zakour : La référence évacuation est un système qui consiste à transporter les femmes en difficulté d’accouchement du Cscom jusqu’au niveau du centre de santé de référence pour pouvoir bénéficier des soins adéquats et de qualité. Cette référence évacuation fonctionne sur la base d’une caisse qu’on appelle caisse de solidarité alimentée par des cotisations des différents partenaires. Ces partenaires sont en l’occurrence les associations de santé communautaire, les mairies et les conseils de cercle.

Dans la pratique comment est organisée la référence évacuation ?

Dès que la femme vient dans un centre de santé communautaire pour un travail d’accouchement et qu’il y a des difficultés et que l’agent de santé se rend compte que cette femme ne peut pas accoucher au Cscom, en ce moment, il fait un appel Rac au niveau du CSREF ou par le téléphone mobile. L’ambulance aussitôt mobilisée va  chercher la femme au niveau du Cscom pour le centre de santé de référence. La plupart du temps, l’accouchement se solde par une césarienne. Pour les districts sanitaires qui n’ont pas de bloc opératoire surtout les chefs-lieux de région, comme c’est le cas à Ségou, nous transportons directement les femmes à l’hôpital Nianankoro Fomba. Je crois c’est le cas aussi à Tombouctou et Mopti.

Et La caisse de solidarité ?

Cette caisse de solidarité est alimentée par les cotisations des partenaires et c’est sur la base d’une clé de répartition. Une fois que cette caisse est alimentée, la femme en difficulté d’accouchement est évacuée gratuitement.

Qu’est-ce qui explique les difficultés d’alimentation de votre caisse de solidarité ?

Les difficultés sont nombreuses. Dans un premier temps,  nous avions cru que c’était dû au coût élevé de la césarienne. Je crois que c’est ce qui a motivé le gouvernement du Mali à prendre un décret, en 2005, pour rendre gratuit l’acte de la césarienne. Ce que la population doit payer, c’est uniquement les frais de transport. Et ces frais de transport pour une césarienne tournent autour de 20 000 F CFA. Donc, compte tenu de cette gratuité de la césarienne, nous avons fait une nouvelle clé de répartition de la cotisation pour cette caisse. Nous nous sommes dit que les charges étant amoindries, les gens vont commencer à payer. Mais malheureusement,  on se rend compte qu’au niveau de la région de Ségou la quasi-totalité des caisses sont arrêtées. Au cours de nos différentes assemblées générales d’information et les ateliers de plaidoyer, les raisons évoquées sont, entre autres, le faible pouvoir d’achat des populations, la difficulté de mobilisation des fonds pour les collectivités (Mairies, Conseils de cercle). En ce qui concerne mon district sanitaire, la caisse a cessé de fonctionner depuis avril 2009. Cela veut dire que ce sont les parents qui payent le transport des femmes en difficulté de leur résidence à l’hôpital Nianakoro Fomba

Est-ce qu’au niveau de votre district sanitaire, la référence évacuation est courante ?

Au  niveau de mon district sanitaire, généralement, le système de référence évacuation porte sur des prévisions et il s’agit des femmes enceintes qui vont accoucher au cours de l’année. On fait des calculs par rapport à cela. Mais en 2010, le nombre de femmes que nous avons eu à évacuer par ambulance  avoisine les 40 %, comparativement à l’année 2009, où nous avons pratiquement évacué 80% des femmes enceintes. Présentement, ce taux a chuté parce qu’il y a eu beaucoup de difficultés dans le fonctionnement de la caisse de solidarité. Pratiquement, la caisse n’a plus de fonds. L’évacuation se fait aux frais des familles. Vous conviendrez avec moi que dans ces conditions, il sera très difficile pour les gens de mettre la main à la poche. C’est ce qui explique ce faible taux d’évacuation par l’ambulance.

Quelles sont les pistes à explorer pour bien organiser la référence évacuation ?

Pour moi, il faut organiser les villages. Il faut que les habitants des villages arrivent à mettre en place un système de mobilisation des ressources comme les tontines, les cotisations collectives, parce que l’un des maillons faibles de notre dispositif c’est l’absence de prise en charge de la femme entre le village et le Cscom. Donc, avec la décentralisation en cours, il faut cette organisation sous la coupole des maires. Il faut aussi que les villageois payent leur quote-part à travers leur Asaco.  J’avoue que souvent beaucoup d’Asaco se plaignent que le nombre de femmes attendues est trop élevé pour eux parce que c’est en fonction de ce nombre qu’on applique le  coût unitaire de la césarienne. Donc, finalement, le dispositif que nous avons trouvé, c’est de donner un montant forfaitaire que chaque Asaco doit payer de façon trimestrielle. Et au bout de 6 mois, on fait une évaluation à mi-parcours de la caisse et ensuite lancer une autre cotisation trimestrielle. Donc ce n’est plus au prorata ; mais un forfait que nous avons imposé aux Asaco. Une autre piste est le développement de l’intercommunalité parce qu’il y a beaucoup de communes qui, à elles seules, ne parviendront jamais à se prendre en charge. Or, dans le cadre de la santé, il y a beaucoup d’aires de santé qui sont partagées entre deux communes se trouvant dans une même aire de santé. Je pense que cela pourrait aider nos communes à faire face à ce problème.

Réalisée par Ramata TEMBELY

 

 

Santé de la reproduction et grossesses non désirées

Le GP-DFC sensibilise  les étudiantes de l’IFAB

Le Groupe Pivot-Droits et Citoyenneté des Femmes (GP-DCF) vient d’initier une causerie-débat sur la santé de la reproduction plus précisément sur les grossesses non désirées à l’Institut de Formation Agro-Sylvo-pastoral. Cette activité, qui s’inscrit dans le cadre de la journée panafricaine de la femme, a permis de mieux sensibiliser les filles face au fléau de la grossesse non désirée. 

Le Groupe Pivot-Droits et Citoyenneté des Femmes  (GP-DCF) est une organisation de huit associations œuvrant à mieux défendre les droits de la femme et  l’équité homme-femme.

Cette organisation, présidée aujourd’hui par Mme Traoré Nana Sissako, n’est pas restée en marge des festivités de la Journée panafricaine de la femme. C’est dans ce cadre, avec l’appui du RECOFEM, qu’elle a initié une série de causeries-débats. 

Le jeudi 4 août dernier, les  étudiantes de l’Institut de Formation Agro-Sylvo-pastorale (IFAB) étaient à l’école du Groupe Pivot-Droits et Citoyenneté des Femmes. Il s’agissait d’une causerie-débat pour les sensibiliser sur la santé de la reproduction, plus précisément sur les grossesses non désirées, thème international de la Journée panafricaine de la femme. Le choix de cet établissement, selon son Directeur, Mohamadoun Bathily, est parti du constat que le taux de grossesse y augmente d’année en année. Ce qui joue sur la scolarité des étudiantes.

Mme Kané Nana Sanou et Bébé Ouane représentaient le GP-DCF à cette causerie-débat. Durant deux heures d’horloge, Me Djourté Fatimata Dembélé, avocate de son état, a expliqué la grossesse non désirée et ses conséquences.

Selon elle, la grossesse non désirée est une grossesse non souhaitée pour une raison quelconque. Elle survient pendant une période non voulue mettant la femme en difficulté par rapport à son environnement social, notamment les études, l’activité économique, la situation familiale…

"La survenue d’une grossesse non désirée suppose que non seulement la femme n’était pas protégée pour éviter la grossesse, mais qu’elle ne l’était pas lors des relations sexuelles avec son partenaire. Ce défaut de protection pose plusieurs problèmes dont l’une des suites réside dans la contamination par les IST-Sida. Cette situation est lourde de conséquences pour la femme en ce qui concerne sa santé physique et mentale" a déclaré Me Djourté.

Raison pour laquelle, selon la conférencière, le thème doit être pris en charge par la loi relative à la santé de la reproduction adoptée par l’Assemblée nationale en 2002. La santé de la reproduction suppose, aux dires de Me Djourté, que «toute personne peut mener une vie sexuelle responsable, satisfaisante et sa risque. Les hommes et les femmes ont le droit égal de liberté, de responsabilité, d’être informés et d’utiliser la méthode de planification ou de régulation des naissances de leur choix, qui ne sont contraire à la loi». 

Pour être à l’abri d’une grossesse, la femme peut agir de plusieurs manières, selon la conférencière. Il s’agit d’observer la chasteté, d’éviter d’entretenir des rapports sexuels pendant la période correspondant à la période de fécondation et de pratiquer la contraception.           

Alou Badra HAIDARA

 

Commentaires via Facebook :