Contrairement aux médiateurs et négociateurs Blaise Compaoré et Thabo M’Beki, le rôle que joue en ce moment le président malien Amadou Toulani Touré dans la crise ivoirienne se fait à l’abri d’yeux et d’oreilles indiscrets. Le statut de président en exercice de l’UEMOA confère en effet aujourd’hui au malien une position déterminante dans l’application des sanctions économiques et financières prises par les institutions financières internationales contre le Gouvernement de M. Gbagbo. Ce dernier a lui aussi dépêché son ministre des finances à Bamako.
C’est en début de semaine que le président Malien Amadou Toumani a reçu la visite du président de la Banque mondiale M. Robert Zoellick. L’institution financière internationale venait de geler ses financements à la Côte d’Ivoire dans la perspective d’un blocus financier.
Dans la même veine, le visiteur a invité le président en exercice de l’UEMOA, à savoir, M Amadou Toumani Touré à suivre la voie ainsi tracée. Une réunion d’urgence de l’institution monétaire africaine doit se tenir dans les prochains jours à Bamako. Mais l’on imagine d’ores et déjà que les marges de manœuvres des pays membres de l’Union Monétaire Ouest Africaine sont très étroites quand bien même la Côte d’Ivoire est et demeure jusqu’à ce jour la locomotive de cette partie du continent. En clair, les pays membres de l’organisation entérineront la décision des institutions de Breton-Wood (FMI et Banque Mondiale). Qu’à ce ne tienne !
La riposte du Gouvernement Gbagbo
A la suite du président de la Banque Mondiale, c’est le ministre des Finances du Gouvernement Gbagbo qui a été, à son tour, reçu par Koulouba. Si officiellement du côté malien, rien, absolument rien n’a filtré de ce passage éclair, de sources bien informées, le visiteur était porteur d’un message de Gbagbo invitant le président malien à plaider sa cause lors de la prochaine réunion de la CEDEAO sur la Côte d’Ivoire, ce vendredi à Abuja au Nigeria et celle de l’UEMOA prévue à Bamako et relatives aux sanctions économiques et financières incitées par la Banque Mondiale.
En attendant, le camp du président sortant, Laurent Gbagbo vient de réussir la prouesse de payer intégralement ses fonctionnaires. Le Ministre des finances Désiré Dallo a en effet pu mobiliser la masse salariale mensuelle pour un montant total de 93 milliards de FCFA. Il s’est même payé le luxe de payer, mercredi dernier, 23 milliards de F CFA au titre des arriérés de salaires. Une bouffée d’oxygène à la fois pour les fonctionnaires, les militaires y compris, et le Gouvernement Gbagbo dans le contexte actuel.
L’Etat ivoirien, comme s’il cherchait à narguer davantage les institutions de Breton-Wood s’est, en outre, acquitté des arriérés de créance de la Banque mondiale pour un montant de 508 millions F CFA. Et pour légitimer la signature de son ministre des Finances, le Gouvernement Gbagbo a également réglé les encours sur les bons de Trésor des partenaires financiers nationaux, à savoir les opérateurs économiques et les banques de la place.
Cette performance de l’Etat ivoirien dans le contexte du moment n’aurait été possible sans la filière café-cacao encore sous le contrôle effectif du pouvoir de Laurent Gbagbo.
En tout état de cause, l’arme économique ne semble pour l’instant avoir effet sur le camp de M Laurent Gbagbo, du moins, à court terme. Le temps reste pourtant son meilleur allié et le pire ennemi de son adversaire Alassane Dramane Ouattara.
B.S. Diarra