La Côte d'Ivoire, un théâtre politique qui s'agite

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ABIDJAN (AFP) – samedi 16 décembre 2006Rumeurs de coup d’Etat, déclarations fracassantes, appel à manifestations: le monde politique ivoirien se fait peur tous les jours, mais pas au point de menacer le statu-quo installé depuis quatre ans.

La dernière péripétie, mardi, fut l’annonce théâtrale par les Forces de défense et de sécurité ivoiriennes (FDS), soutiens du président Laurent Gbagbo, d’un projet de "coup d’Etat" imminent contre le chef de l’Etat.

Aucune preuve tangible de ce complot n’a été dévoilée depuis.

L’opposition a dénoncé une "manipulation" de M. Gbagbo visant à alimenter un climat de peur pour la décourager de manifester contre le président samedi.

Les coups d’éclat politiques se sont multipliés ces dernières semaines, alimentant la tension, notamment à Abidjan, mais les incidents sont restés limités, bien que parfois meurtriers.

"La Côte d’Ivoire est un théâtre d’opérations. Mais pas au sens où il se passe quelque chose… au sens où c’est un théâtre", note un responsable européen.

Car la situation du pays, elle, n’a pas changé depuis quatre ans et la tentative de coup d’Etat de la rébellion des Forces nouvelles (FN), qui se sont emparées du Nord, contre M. Gbagbo, qui tient toujours le Sud.

L’ONU et la France participent au maintien du statu-quo, avec 7.000 Casques bleus et 3.500 soldats français déployés entre les deux camps pour garantir le cessez-le-feu.

Pour débloquer le processus de paix, l’ONU mise sur le Premier ministre Charles Konan Banny, qu’elle a imposé à M. Gbagbo pour organiser des élections sans cesse repoussées depuis fin 2005.

Le 1er novembre, elle l’a doté avec la résolution 1721 de "pouvoirs élargis" pour prendre des décisions, y compris sans l’aval de M. Gbagbo.

Mais dès le lendemain, le président, qui conserve les leviers du pouvoir dans le Sud, a réaffirmé qu’il n’accepterait aucune remise en cause de ses pouvoirs.

"Dès le départ, Gbagbo a cassé la résolution. Et la communauté internationale, qui a des crises plus graves à régler, n’a pas réagi", explique un diplomate occidental.

Depuis, MM. Gbagbo et Banny s’observent en évitant chacun de franchir la ligne rouge, malgré un premier et vif affrontement récent par médias interposés dans l’affaire des déchets toxiques.

"M. Gbagbo n’a pas provoqué l’ONU en limogeant Banny. Et ce dernier s’est gardé d’hypothéquer son avenir politique en démissionnant. Au milieu, l’ONU et la France se sentent piégées", ajoute le diplomate.

Le 8 décembre, M. Banny a annoncé la prochaine reprise des opérations d’identification des populations en vue des élections.

Vendredi, la rébellion des FN lui répondait en refusant le schéma d’identification qu’il propose.

M. Gbagbo refuse quant à lui d’entamer l’identification avant le désarmement des rebelles… qui refusent de désarmer sans identification.

L’été dernier, le même désaccord avait paralysé le processus de paix.

Fin octobre, le représentant de l’ONU pour les élections en Côte d’Ivoire, Gérard Stoudmann, dénonçait la "mauvaise volonté" des "seigneurs de guerre (du) Nord confortablement installés dans une situation quasi féodale" et de ceux qui, au Sud, "profitent de la situation pour faire toute sorte d’affaires".

Deux mois après le début de cette "dernière" année de transition, selon l’ONU, la situation n’a guère évolué.

"On est reparti pour une année blanche", soupire un diplomate africain. "Ceux qui tiennent les armes, et contrôlent donc les richesses, au Nord comme au Sud ne veulent pas lâcher le gâteau. Et cela peut durer des années".

Vendredi, le président Gbagbo a annoncé qu’il ferait des propositions de sortie de crise avant la fin du mois, en prenant "l’engagement que les élections (auront) lieu l’année prochaine".

Source: AFP

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