La situation en Côte d’Ivoire semble bloquée. Ni Laurent Gbagbo ni son opposant Alassane Ouattara ne veulent céder ; le second ayant pourtant été proclamé vainqueur par la Commission électorale indépendante (CEI) aux dépens du premier.
La quasi-totalité de la communauté internationale a appelé M. Gbagbo à reconnaître sa défaite. Quels sont les leviers dont disposent l’ONU, l’Union africaine (UA) ou les bailleurs de fonds de la Côte d’Ivoire pour faire plier M. Gbagbo, qui s’accroche au poste qu’il occupe depuis dix ans ?
• Thabo Mbeki et l’Union africaine : une difficile médiation
Dans leur grande majorité, les Etats africains tentent de faire entendre raison aux "deux présidents". Dès les premières heures de la crise, samedi 4 décembre, l’UA a dépêché sur place l’ancien président de l’Afrique du Sud, Thabo Mbeki, pour une "mission d’urgence".
L’UA n’a pourtant reconnu qu’en creux la défaite de M. Gbagbo, appelant la Côte d’Ivoire à respecter les résultats "tels que proclamés" par la CEI, qui a désigné M. Ouattara vainqueur. En jouant la prudence, l’UA aurait souhaité ne pas savonner la planche à M. Mbeki.
Selon Philippe Hugon, chercheur à l’Institut de relations internationales et stratégiques (IRIS), il est peu probable que cette médiation aboutisse, notamment car la précédente mission de M. Mbeki, entre 2004 et 2006, s’était soldée par un échec.
De son côté, la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest doit tenir un sommet extraordinaire mardi à Abuja pour évoquer la situation en Côte d’Ivoire.
• La Banque mondiale et la Banque africaine de développement : des milliards de dollars de dette
"Contrariées" par la situation politique, la Banque mondiale et la Banque africaine de développement vont "réévaluer l’utilité et l’efficacité de [leurs] programmes" en Côte d’Ivoire. "Nous souhaitons poursuivre le travail avec les Ivoiriens en matière de lutte contre la pauvreté, mais il est difficile de le faire avec efficacité dans un contexte d’incertitude et de tension prolongées", ont expliqué les deux banques dans un communiqué commun.
La Banque mondiale avait lié l’effacement de trois milliards de dollars de dette extérieure de la Côte d’Ivoire – évaluée au total à 12,5 milliards de dollars – à la tenue d’une élection présidentielle.
• L’Union européenne : "sanctions ciblées" et menaces sur la coopération
La porte-parole de la chef de la diplomatie européenne, Catherine Ashton, a indiqué que cette dernière était disposée à "suivre les procédures qui prévoient des sanctions s’il n’y a pas une résolution rapide à cette situation de crise". Elle n’a toutefois pas détaillé ces éventuelles sanctions.
Outre les "sanctions ciblées" contre ceux qui "font obstacle à la transition pacifique", Mme Ahston s’est également dit prête à "prendre des décisions en matière de coopération". L’aide au développement actuellement programmée par l’UE en faveur de la Côte d’Ivoire, sur plusieurs années, s’élève à 254,7 millions d’euros.
• La France : 600 entreprises dans la balance
Ancienne puissance coloniale, la France a apporté un soutien sans réserve à M. Ouattara. Outre les paroles du président de la République depuis l’Inde, le Quai d’Orsay a indiqué que "l’heure en Côte d’Ivoire [était] à la recherche d’une transition ordonnée, sereine et digne qui permettra[it] à tous les acteurs économiques de poursuivre leurs activités et partant de continuer d’œuvrer au développement du pays".
Selon l’Agence France-Presse, les six cents entreprises françaises implantées en Côte d’Ivoire représenteraient 30 % de ce pays d’Afrique de l’Ouest. La diplomatie française n’a pas indiqué si elle envisageait d’appeler ces entreprises à y cesser leurs investissements pour affaiblir M. Gbagbo.
Le Monde.fr – 06.12.10 | 22h44