ABIDJAN (AFP) – jeudi 30 décembre 2010 – 18h18 – Les exactions en Côte d’Ivoire se sont réduites ces derniers jours selon l’ONU, mais les risques d’affrontement demeurent avec la menace des partisans de Laurent Gbagbo de prendre d’assaut à "mains nues" le QG de son rival Alassane Ouattara à Abidjan.
"Nous remarquons une baisse drastique (des exactions) par rapport à la semaine qui allait du 16 au 23" décembre, a déclaré Simon Munzu, directeur de la division des droits de l’Homme de l’Opération des Nations unies en Côte d’Ivoire (Onuci).
Il a précisé qu’au cours de la semaine écoulée ont été déplorés six morts, trois disparitions, vingt enlèvements ou arrestations et onze blessés.
Au total, il y a eu 179 morts depuis la mi-décembre, pour la plupart des partisans de Ouattara selon l’ONU. Des chiffres contestés par le gouvernement Gbagbo qui parle de 53 morts, dont 14 membres des forces de sécurité qui lui sont loyales, depuis la présidentielle du 28 novembre.
La tension a baissé avec l’entrée en scène de médiateurs mandatés par la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cédéao). Ils tentent d’éviter une intervention militaire pour renverser le régime Gbagbo, une menace brandie par cette organisation pour que Ouattara, reconnu par la communauté internationale, soit installé au pouvoir.
Après une mission mardi à Abidjan, les présidents Boni Yayi (Bénin), Ernest Koroma (Sierra leone) et Pedro Pires (Cap-Vert), doivent revenir lundi après avoir rendu compte de leurs premiers entretiens avec Gbagbo et Ouattara à Goodluck Jonathan, chef d’Etat nigérian et président en exercice de la Cédéao.
Le Ghana a déjà averti qu’il n’enverrait pas de troupes chez son voisin ivoirien.
Mais, tout en disant préférer l’option diplomatique, Ouattara a appelé jeudi à "aller vite". "Il est temps d’agir et de sortir de cette situation".
Il venait d’adresser ses "voeux à la Nation" pour 2011 depuis son QG, un hôtel où il est retranché avec son gouvernement. Le Golf hôtel est soumis à un blocus routier des forces pro-Gbagbo et protégé par la mission onusienne Onuci et l’ex-rébellion des Forces nouvelles (FN).
C’est ce lieu symbolique qu’entend prendre après le 1er janvier Charles Blé Goudé, leader des "jeunes patriotes" pro-Gbagbo, qui a appelé ses partisans à le "libérer" à "mains nues".
L’arrivée à l’hôtel de milliers de partisans de Gbagbo où ils seront confrontés aux blindés de l’Onuci est potentiellement explosive, d’autant que la mission de l’ONU est considérée par le camp Gbagbo comme alliée à Ouattara.
La mission onusienne a déjà subi récemment plusieurs incidents. Une de ses patrouilles a essuyé des tirs mercredi d’origine inconnue et a dû répliquer par des tirs de sommation devant une foule hostile.
Le camp Ouattara, plutôt démuni à l’intérieur du pays, gagne du terrain sur le plan diplomatique avec la reconnaissance d’ambassadeurs qu’il a désignés et en appelle à la communauté internationale pour éviter ce qu’il nomme "un génocide".
Le conseiller spécial de l’ONU chargé de la prévention du génocide, Francis Deng, s’est déclaré "très inquiet" de la situation, plus particulièrement d’informations selon lesquelles des maisons où vivent des opposants à Gbagbo seraient "marquées pour identifier leur ethnie".
Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a déploré la "dégradation de la situation humanitaire" suite aux violences post-électorales et ses secouristes ont traité près de 600 blessés, dont 300 cas graves depuis la présidentielle du 28 novembre.
La Fédération internationale des Sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge a lancé un appel durgence de plus d’un million d’euros pour renforcer l’assistance aux quelque 20.000 réfugiés fuyant les violences.
Isolé sur le plan international, Gbagbo peut cependant se réjouir de l’arrivée jeudi à Abidjan de deux soutiens: l’ancien ministre socialiste des Affaires étrangères Roland Dumas et Jacques Vergès, des avocats français qui n’ont pas tardé à s’en prendre à l’ex-puissance coloniale, accusée d’ingérence.
AFP