RÉPLIQUE. Malgré sa rencontre avec Henri Konan Bédié pour “briser la glace”, le président ivoirien est déterminé à poursuivre sa route.
Après que la communauté internationale ait reconnu son élection, le président Ouattara révèle le tempo qu’il entend donner dans la situation actuelle en Côte d’ivoire. Mardi, lors d’un conseil politique du Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP), à Abidjan, portant sur les événements autour de la présidentielle, Alassane Ouattara, réélu pour un troisième mandat controversé, a assuré qu’il n’y aurait « pas de transition ».
Alassane Ouattara, seul maître à bord
Alassane Ouattara est également longuement revenu sur son tête-à-tête avec Henri Konan Bédié, le 11 novembre dernier à l’hôtel du Golf, objet de nombreuses rumeurs. En effet, c’est dans ce même hôtel d’Abidjan que les deux alliés d’alors avaient passé plus de quatre mois reclus pendant la crise postélectorale de 2010-2011. Rien de cela aujourd’hui.
« Pour tous ceux qui se font des idées sur une transition, ils peuvent toujours rêver : il n’y aura pas de transition en Côte d’Ivoire ! » a-t-il lancé, après avoir fait observer une minute de silence à la mémoire des victimes de la période électorale. « Avant le 11 (novembre, NDLR), j’ai demandé au Premier ministre Hamed Bakayoko de renouer le dialogue avec le PDCI-RDA et le FPI afin de leur permettre de reprendre leur place. Parce que ce sont vraiment les deux partis, en dehors du RHDP. »
Il a été réélu à la présidentielle du 31 octobre avec 94,27 % des voix (« comme diraient certains, un score stalinien », a ironisé Ouattara face aux cadres du parti au pouvoir, et ce, alors que le climat politique reste encore sensible). « D’où vient cette idée de transition ? Trois ans avant, on sait qu’il y a une élection, on s’assoit dans son salon et puis on dit qu’il y a une transition » a-t-il encore lâché sans citer de noms.
Dans le sillage de l’élection qu’ils avaient appelé à boycotter, l’opposition menée par l’ancien président Henri Konan Bédié et l’ex-Premier ministre Pascal Affi N’Guessan ont proclamé un « conseil national de transition » sans jamais en préciser le cadre légal. Après plusieurs jours de tensions, marqués par l’arrestation de plusieurs leaders, un dialogue a cependant débuté avec une rencontre, le 11 novembre, entre Alassane Ouattara et Henri Konan Bédié.
Tout en se disant « révolté » par les « 87 morts » (le gouvernement en avait décompté 85 jusque-là) causés par des affrontements pendant la période électorale, ainsi que par le fait que près d’un million et demi d’Ivoiriens n’ont pas pu voter en raison des actions de « désobéissance civile » lancées par l’opposition, le président Ouattara a invité au « pardon mutuel » et à la « tolérance ». « Il faut qu’on se parle, il faut arrêter ça », a-t-il dit. « Nous devons continuer à vivre ensemble dans la paix », a-t-il insisté.
L’étau se desserre sur l’opposition
Vendredi, l’opposition avait exigé des « actes d’apaisement » du pouvoir comme « préalable » à tout dialogue politique pour tenter de mettre fin aux violences électorales.
Quelques jours plus tard, il semble qu’elle ait été entendue puisque le blocus policier qui était en place depuis deux semaines devant la résidence à Abidjan du porte-parole de l’opposition ivoirienne Pascal Affi N’Guessan, lui-même incarcéré, a été levé lundi 16 novembre, a rapporté sa compagne à l’Agence France-Presse. « Ils (gendarmes et policiers) viennent de quitter les lieux, ils sont venus me dire au revoir », a déclaré Angéline Kili.
Ancien Premier ministre sous la présidence de Laurent Gbagbo, Pascal Affi N’Guessan est détenu dans un lieu tenu secret depuis son arrestation le 9 novembre, selon ses avocats, qui déplorent de ne pas avoir accès à lui.
Les autorités ivoiriennes avaient fait bloquer le 3 novembre par les forces de l’ordre les résidences des dirigeants de l’opposition après la proclamation par celle-ci d’un régime de « transition ». La justice ivoirienne a lancé des poursuites pour « complot contre la sécurité de l’État » contre plusieurs autres personnalités de l’opposition.
Le blocus de la résidence du chef de l’opposition, l’ex-chef de l’État Henri Konan Bédié, avait été levé le 11 novembre, jour de sa rencontre avec Alassane Ouattara, lors de laquelle les deux hommes ont entamé des pourparlers. Les résidences de deux autres responsables d’un autre parti d’opposition, Assoa Adou et Hubert Oulaye, ont été débloquées le 12.
En revanche, la résidence de l’ancien ministre Abdallah Mabri Toikeusse était toujours bloquée ce lundi, selon un de ses proches.
Amnesty International continue de demander « aux autorités ivoiriennes d’enquêter sur ces violences sanglantes et de traduire en justice les responsables », dans un communiqué.
Par Le Point Afrique
Publié le 18/11/2020 à 13:55 | Le Point.fr