Comme nous l’avons déjà écrit ailleurs, le spectacle donné au monde dans la gestion de la crise ivoirienne est affligeant. Confusion, amateurisme et irresponsabilité de part et d’autre, et particulièrement, dans les actions de prévention des conflits et de gestion de l’après crise. Les comptes rendus et reportages de bon nombre de médias européens, en général, et français, en particulier, sont étranges voire même en contradiction avec la réalité des faits. C’est d’ailleurs leur stratégie à eux…
La dégradation du conflit ivoirien nous ramène à des années en arrière, qui nous fait craindre une situation génocidaire. Certaines interventions de prévention et de gestion des conflits sur le terrain devraient tenir compte des enseignements tirés par M. Ahmedou Ould Abdallah, expert des Nations Unies, homme de culture, d’expériences et fonctionnaire engagé pour la Paix véritable et le développement du continent. Ces leçons sont contenues dans des entretiens données au journaliste Stephen Smith, qui a interrogé l’ancien Représentant spécial des Nations Unies au Burundi au moment où se déroulait le plus grand génocide africain contemporain (le génocide rwandais de 1994). Ces enseignements sont nombreux. Nous rappelons un certain nombre d’enseignements afin d’enrayer les cycles de guerre qui ne cessent d’appauvrir davantage les peuples d’un continent en proie déjà à d’innombrables calamités. Il est clair qu’à l’avenir, il faudrait éviter de prendre des dispositions ou mesures visant à dépouiller un président élu démocratiquement de tous ses attributs constitutionnels ou de procéder à la distribution des portefeuilles comme on l’a fait dans la crise ivoirienne, en octroyant des postes de souveraineté et sensibles à des « rebelles ». Car, les rencontres et accords de Linas-Marcousssis/Kléber n’avaient pas pour but de se transformer en assemblée constituante, de distribution de postes ministérielles, mais à renouer le dialogue et dégager les pistes de la Paix. Connaissant les protagonistes et le contexte, ces accords étaient inapplicables. Que faire pour l’avenir? Les raisons de renverser un dirigeant sont nombreuses et elles peuvent être justifiables. Simplement, il faut que la prise de pouvoir par la force, soit exceptionnelle. Ceci semble de moins en moins le cas en Afrique, dont bon nombre de pays ont traversé une crise économique sévère. Cette situation ouvre la voie à toutes les aventures, comme le dévoile le procès actuel des mercenaires ayant voulu s’accaparer du pétrole équato-guinéen, en renversant l’actuel président Théodoro Obiang Nguema Mbazogo. Pire, c’est une catastrophe de confier des postes à des " rebelles " pour soit disant, réconcilier tout le monde, ou constituer un gouvernement " d’union nationale " pour créer les conditions de la paix! De telles solutions ont montré leurs limites par le passé. L’incurie, la perfidie, le désir de vengeance des uns et la convoitise des autres finissent toujours par refaire surface, au mépris des conditions de vie des populations, de plus en plus misérables. Au Libéria, la communauté internationale a anobli les chefs de guerre en les regroupant au sein d’une présidence collégiale, dénommé maladroitement, le Conseil d’Etat. Réduire les présences étrangères : En effet, une forte présence (militaire) étrangère exacerbe les tensions dans les pays en crise et, loin de les résoudre, pérennise et multiplie les problèmes.
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Sur cette base, des gendarmes et militaires africains, bien entraînés, sous la houlette du Nigeria ou de l’Afrique du Sud, et soutenus financièrement et logistiquement par l’Union africaine, les Nations Unies, les Etats Unis et l’Union européenne devraient prendre le relais des militaires occidentaux sur le terrain. Sinon, il y a des risques de surenchère et de chantage sur les occidentaux. Confier la gestion des conflits à des parties n’ayant pas intérêt au conflit La gestion de ces conflits doit être confiée à des protagonistes de l’action internationale qui ont le moins d’intérêt dans le conflit en cours. Eviter d’utiliser les anciennes puissances coloniales dans les anciennes colonies. Même si celles ci peuvent jouer un rôle dans la recherche de solutions. Tenir tête aux entrepreneurs de guerre. Dans bon nombre de pays en développement, ce sont aujourd’hui les entrepreneurs de guerre, des affairistes et toute sorte de brigands qui, auprès des laissés-pour-compte de la mondialisation, réussissent à incarner un destin. La communauté internationale doit apprendre à leur tenir tête, même et surtout quand ils maintiennent en otage toute une population. La solution ne consiste pas à leur céder ou à faire monter les enchères en se faisant prendre au piège de l’humanitaire, des valeurs universelles. Chacun doit prendre ses responsabilités et répondre de son action… Il ne faut plus tolérer des folies collectives, des hécatombes. La communauté internationale doit cesser d’être, face aux crimes, l’apprenti sorcier anonyme.
A suivre !
Serge Olivier
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