Conflit libyen : La désunion Africaine

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L’un des représentants de l’OTAN  vient d’annoncer que la résolution 1973 de l’ONU autorise aussi à  viser Kadhafi.  Cela s’est traduit, il y a quelques jours,  par un bombardement massif de Tripoli, en guise de cadeau d’anniversaire au Guide qui  vient de souffler ses 69 ans le 7 juin passé. Plus le temps avance, plus nous voyons clairement se dessiner les mobiles réels de l’intervention occidentale en Libye. La démocratie évoquée à grands coups de médias occidentaux n’est qu’un prétexte fallacieux pour mettre le pays à genou et profiter de ses richesses. C’est la personne même de Kadhafi qui constitue les armes lourdes dont il est question de détruire pour « protéger les civils » en Libye.

L’Union africaine, qui n’est en réalité qu’une grosse expression vide tant nos dirigeants demeurent incapables de défendre leurs points de vue, a élaboré une feuille de route qui demande l’arrêt des hostilités et le début du dialogue inter-libyen afin de trouver une issue politique à la crise. L’OTAN ne l’entend pas de cette oreille et fait fi des appels des pays africains. Mais la grande surprise  est le Sénégal de Wade qui vient de se démarquer de la ligne de politique générale africaine. Dakar a accueilli une délégation des rebelles libyens pour déclarer peu après qu’il reconnait désormais la Transition comme seul pouvoir légitime de la Libye. Pour consolider  la position de son pays et malgré les mises en garde de ses agents de sécurité, Wade s’est rendu la semaine dernière à Benghazi en visite chez les rebelles.  A propos de Kadhafi, le président sénégalais a péremptoirement déclaré : « Aujourd’hui je te regarde dans les yeux pour te dire qu’il faut arrêter les tueries en décrétant un cessez-le-feu. Dans l’intérêt du peuple, il faut que tu te retires. Tu as prétendu que ton pouvoir était issu du peuple, mais tout le monde sait que tu as établi une dictature ».

Deux questions méritent, cependant, d’être posées à Mr Wade : les rebelles de Libye savent –ils qu’en démocratie, le pouvoir est conquis par votes et non par des armes ? Et de quelle légitimité peuvent jouir des individus qui ignorent ce que sont les urnes ?

Le Guide, par le passé, a accordé son soutien indéfectible à l’ANC dans sa lutte contre l’apartheid. Mandela, le plus sage et le plus respecté de nos leaders, a demandé à Bill Clinton que les sanctions économiques contre la Libye soient levées. Ce qui fut fait. Quand il était dans l’opposition au Sénégal et que ses partisans avaient commis des casses dans le pays, Wade fut emprisonné sous le régime d’Abdou Diouf. Kadhafi a obtenu sa libération sur promesse  que la Libye prendrait en charge les réparations des dégâts. Tripoli a offert  à notre continent un satellite de communication et a investi des milliards de dollars dans nos pays. Qu’est-ce que le Sénégal a bien pu faire pour l’Afrique ?

Il aurait été plus juste d’entendre un Mandela ou un président  ghanéen tenir un tel discours. En Afrique, le Sénégal est loin d’être un exemple de démocratie pour que son président se pose en donneur de leçon aux autres. Wade, 85 ans bien sonnés, a  l’intention de modifier la Constitution de son pays pour se présenter à … un troisième mandat consécutif  en 2012! D’ailleurs, il mijote dans sa tête un plan d’installation de son fils, Karim, aux commandes du pays dès qu’il aura eu l’âge de son père ou de sa grand-mère, c’est-à-dire 120 ans. « Il y a des chefs d’Etat qui ont fait beaucoup plus que trois mandats. L’âge est une obsession en Europe, mais pas en Afrique. Mon père a vécu 105 ans, ma grand-mère 120 ans, donc j’ai encore du temps devant moi ! On a l’âge de ses artères. Tant que je conserverai mes capacités physiques et intellectuelles, je n’envisagerai pas de partir. »  Affirmait-il dans un entretien à la « Tribune » en avril 2011.

Si l’on chuchotait à Dakar depuis peu, maintenant on le dit à haute voix que le Sénégal de Wade est devenu un cercle  familial autocrate. L’homme qui a connu pendant plusieurs années la galère de l’opposition  use de tous les moyens pour neutraliser ses concurrents.

Par ailleurs, nul n’a jamais vu un Libyen s’immoler  à cause de petites histoires de coupure d’électricité. Pendant que Wade tient des discours pompeux à l’Elysée ou à Benghazi, son pays se trouve plongé dans le noir. Les hommes d’affaires sénégalais se plaignent assez souvent  de ne plus pouvoir se livrer à leurs activités, faute d’électricité dans le pays. Les citoyens, quant à eux, ont vu leurs revenus en chute libre et nombreux sont ceux-là, réduits à un ou deux repas par jour ! Malgré la grogne qui se fait entendre de plus en plus fort, Wade n’en a cure. Pour narguer son propre pays et démontrer que le Sénégal est le plus démocratique au monde, il envisage son troisième mandat présidentiel  qui lui tient plus sur le coeur que des maternités privées de courant. Son ministre de l’énergie, qui n’est autre que son propre fils, ne réussit pas pour l’instant à réaliser les grandes promesses faites aux populations.

Les causes réelles de la prise de position de Wade contre Kadhafi ont été dévoilées lors du sommet du G8 à Deauville. Sarkozy, en sa qualité d’hôte, a invité Wade et son fils à titre exceptionnel. Histoire de les présenter au président américain, Obama. Celui-ci, à en croire les rumeurs,  est  allergique au clan « Wade » et ne daigne aucunement rencontrer le maitre de Dakar. Il parait que Wade, se croyant patriarche des leaders politiques africains, ne digérait pas que les portes de la Maison Blanche lui soient fermées pendant que d’autres « dictateurs » du continent y étaient accueillis par un Président mulâtre, tel son fils Karim. Pour s’attirer les grâces de l’homme le plus puissant de la planète, le clan « Wade » a décidé de jouer gros, quitte à sacrifier les intérêts africains, à se démarquer de la résolution de l’Union Africaine adoptée sur la Libye.  Un deal aurait été conclu avec Sarkozy qui se chargerait d’ériger le pont reliant Dakar et Washington. En guise de reconnaissance, Wade soutiendrait les ambitions martiales de l’Elysée et romprait avec la ligne commune de L’UA afin d’affaiblir les positions  de cette dernière sur le traitement du dossier libyen. A Deauville les images qui ont fait le tour du monde montraient un Wade comblé de bonheur d’avoir été présenté à Obama. Karim, appelé de la main par Sarkozy, se présenta promptement devant le maitre de la Maison Blanche. « Tu es plus grand que moi ? » se serait intéressé  Barak. « Je suis plus long que vous, mais on ne peut pas être plus grand que le président des Etats Unis !», aurait rétorqué Karim.

Sur ce, le tour était joué, la liaison tant souhaitée établie. Intérêts africains ou UA ? Connaissent plus ! On annonce déjà que la rencontre Obama-Wade serait prévue pour septembre prochain.

En reconnaissant les rebelles de Libye, Wade oublie les braises  qui couvent sous les cendres dans son propre pays.  Le Sénégal n’est-il pas confronté depuis des années déjà au même problème de rébellion et de séparatisme ? Wade, pour des raisons de relations personnelles qu’il veut coute que coute établir avec Obama, vient de lancer un signal qui sera sans doute capté partout sur le continent par ceux qui nourrissent des intentions mal veillées : la rébellion peut gagner et se faire reconnaitre à l’instar de la Libye.

Il faudrait souligner le fait que le Sénégal a toujours été le bémol en Afrique quand il s’agit de parler d’union ou d’adopter une  ligne commune de défense des intérêts africains.  L’éclatement en 1960 de la Fédération du Mali en est un exemple éloquent. C’est impensable en Europe qu’un seul pays se dérobe de la ligne générale adoptée sur des questions d’intérêt national. L’attitude du Sénégal vient encore une fois d’étayer la thèse que l’Afrique a du chemin à faire sur le plan de l’intégration, de l’union et de la coordination de sa politique. Car à tout moment, l’un  de nos leaders, sinon plusieurs à la fois, joue la fausse note pour des causes purement personnelles, qui n’ont rien à avoir avec les intérêts suprêmes du pays ou du continent. Nous resterons écrasés tant que nous ne serons pas effectivement unis !

Après tout, nous nous étonnons qu’on nous manque de respect ou que nous croupissions dans la pauvreté. Malgré nos ressources colossales, nos leaders africains ont choisi de maintenir l’Afrique dans la servitude et dans la misère. L’important, c’est de se maintenir dans le fauteuil présidentiel en modifiant incessamment les Constitutions sous le regard souriant et silencieux des « pères de la démocratie ».

La jeunesse africaine doit retenir que les ressources naturelles ne sont pas éternelles. Elles finiront un beau jour. Ce jour, les Wade et autres ne seront plus parmi nous. Nous nous retrouverons donc avec un continent vidé de richesses et dont nul n’a besoin. Alors l’existence de la race Noire sera mise en péril.

Si nous bénéficions encore aujourd’hui de « quelque estime » de la part de l’Europe, c’est parce que notre sous-sol est gorgé de matières. Ces richesses doivent servir de garantie de notre survie dans le futur.

Mais hélas ! Il y a des leaders africains qui n’en ont aucun souci.  Donc, Il est impérieux pour nous, jeunes d’Afrique, de songer à notre avenir dès aujourd’hui. Plus tard, ce sera trop tard.

Kénédugufama

Fédération de Russie.

 

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